La Maison des 1000 Morts ("Cours lapin ! Cours !!!)

Par Olivier Walmacq

Genre : horreur, gore, trash (interdit aux - 16 ans)
Année : 2003
Durée : 1h29

Synopsis : Deux jeunes couples se lancent à la recherche du docteur Satan, une légende locale. Surpris par un terrible orage, ils se réfugient dans une mystérieuse demeure où réside une famille pour le moins étrange. Celle-ci se compose de membres adeptes du cannibalisme et de rites sataniques. Le cauchemar peut commencer.

La critique :

De son propre aveu, Rob Zombie a toujours voué une fascination pour Charles Manson, un serial killer américain tristement célèbre. Le tueur en série fonde une étrange secte, "La Famille", qui se livre à plusieurs séries d'assassinats barbares, dont celui de Sharon Tate, la femme de Roman Polanski en 1969. Cette histoire de "famille", guidée par le meurtre et ses instincts primitifs, encourage Rob Zombie à se tourner vers le cinéma horrifique. Dans un premier temps, l'ex-chanteur et musicien, devenu cinéaste, réalise le clip vidéo de The Crow : Salvation. Impressionnés, les producteurs décident de lui laisser sa chance.
C'est dans ce contexte que Rob Zombie signe son tout premier long-métrage, intitulé La Maison des 1000 Morts. Contre toute attente, ce premier essai rencontre un certain succès dans les salles aux Etats-Unis.

Mieux, La Maison des 1000 Morts est louangé par de nombreux fans. Le film est considéré comme une véritable bouffée d'oxygène dans un cinéma d'horreur moribond. Parallèlement, La Maison des 1000 Morts renoue ce lien indéfectible avec les longs-métrages chocs et extrêmes des années 1970. Impossible de ne pas penser à Massacre à la Tronçonneuse (Tobe Hooper, 1974), mais surtout à sa suite, donc Massacre à la Tronçonneuse 2 (Tobe Hooper, 1984).
Le long-métrage exhume et ressuscite ce mythe de la famille américaine grivoise et égrillarde, cloîtrée au beau milieu de nulle part, qui s'adonne au cannibalisme et aux rites sataniques. Thèmes sur lesquels nous reviendrons. La distribution du film réunit Sid Haig, Bill Moseley, Sheri Moon, Karen Black, Chris Hardwick et Erin Daniels.

Attention, SPOILERS ! Deux jeunes couples se lancent à la recherche du docteur Satan, une légende locale. Surpris par un terrible orage, ils se réfugient dans une mystérieuse demeure où réside une famille pour le moins étrange. Celle-ci se compose de membres adeptes du cannibalisme et de rites sataniques. Le cauchemar peut commencer. Certes, en apparence, le script est à la fois classique et laconique. En vérité, l'intérêt de La Maison des 1000 Morts ne repose pas vraiment sur son scénario.
La grande force du film réside dans son ambiance eschatologique, presque apocalyptique et de fin du monde. On en revient toujours à cette fascination archaïque et morbide pour la Famille Manson, dont la famille Firefly est le digne épigone. Mais Charles Manson n'est pas le seul tueur en série pressenti dans ce long-métrage.

Par exemple, le personnage du Capitaine Spalding, un clown au sourire infatué, est une allusion à John Wayne Gacy, un autre serial killer notoire. A travers La Maison des 1000 Morts, le but de Rob Zombie n'est pas forcément de comprendre ni de ratiociner sur les raisons qui poussent les membres de la famille Firefly à torturer, dilapider, séquestrer, supplicier et cannibaliser leurs victimes.
Encore une fois, l'intérêt du film réside dans des forces obscures, énigmatiques et indicibles qui conduisent tout un clan à se livrer à des rituels morbides. Par exemple, sous ses airs faussement goguenards et avenants, le capitaine Spalding est un personnage vulgaire et outrancier, n'hésitant pas à kidnapper des touristes ou des personnes de passage pour le compte de sa petite famille de décérébrés. 

A l'inverse, ses compagnons d'infortune dévoilent promptement leur vrai visage. Très vite, La Maison des 1000 Morts se transmute en huis clos étouffant et anxiogène. Faits prisonniers et atrocement torturés, les deux couples doivent subir les acrimonies et les anathèmes de marginaux azimutés et totalement déshumanisés. Ce même processus de déshumanisation conduit l'héroïne du film dans une sorte de cave infernale, ou plutôt de soupirail, menant tout droit vers l'enfer.
Dans ces limbes infernales, d'étranges créatures s'adonnent à de terribles expériences sur des êtres humains. Hurlements de douleur, cris d'orfraie, main sectionnée, yeux exorbités et tortures à satiété font partie des tristes réjouissances. Pendant longtemps, la société de production Universal Pictures refusera de sortir le film dans le circuit "normal", un terme qui semble voué à l'opprobre et aux gémonies par un Rob Zombie plus indocile que jamais.

Pourtant, le cinéaste montre de véritables qualités derrière la caméra. Clairement, Rob Zombie possède un grand potentiel et un véritable univers. En l'occurrence un univers cauchemardesque nimbé par des dynamiques familiales complexes, sauvages et surtout meurtrières. Ici, point de héros qui débarque pour sauver les victimes. En outre, ce sont les tortionnaires qui sont les vraies stars du film.
Point non plus de happy-end. D'ailleurs, Rob Zombie s'affirme déjà comme un érudit de virtuosité et de technicité. Le réalisateur n'est pas seulement un fan de Massacre à la Tronçonneuse et de ses nombreux succédanés. Rob Zombie exalte le vieux cinéma d'épouvante des années 1940 au détour de plusieurs clins d'oeil, entres autres, La Maison de Frankenstein (Erle C. Kenton, 1944).
Seul petit bémol : le scénario du film un peu trop élusif et qui n'exploite pas suffisamment la folie meurtrière de ses différents tortionnaires. Encore une fois, La Maison des 1000 Morts possède un énorme potentiel. Rob Zombie aurait encore pu davantage exagérer ses meurtres et ses supplices via de nombreuses séquences chocs. Mais ne soyons pas trop sévères.
Le réalisateur poursuivra les hostilités avec un second volet , l'excellent The Devil's Rejects, en 2005.

Note : 15/20

 Alice In Oliver