[CRITIQUE] Tour de France (2016)

Par Pulpmovies @Pulpmovies

Réalisé par : Rachid Djaïdani


Avec :
Gérard Depardieu, Sadek, Louise Grinberg


Sortie :
23 Novembre 2016


Durée: 
1h35min


Distributeur :
Mars Films

Synopsis : Far’Hook est un jeune rappeur de 20 ans. Suite à un règlement de compte, il est obligé de quitter Paris pour quelques temps. Son producteur, Bilal, lui propose alors de prendre sa place et d’accompagner son père Serge faire le tour des ports de France sur les traces du peintre Joseph Vernet.

Malgré le choc des générations et des cultures, une amitié improbable va se nouer entre ce rappeur plein de promesses et ce maçon du Nord de la France au cours d’un périple qui les mènera à Marseille pour un concert final, celui de la réconciliation.

2/5

Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs, le passage éclair de Tour de France aurait pu rester noyé dans les flots d’un rythme cannois entêtant. Mais c’était sans compter sur le discours de Gérard Depardieu, qui s’est ouvert au parterre de critiques sur le mode de la confession intime. « Pardonnez moi, je suis fatigué de vivre et effrayé de mourir ». L’occasion pour lui d’apparaître en souverain dans un film déjà trop vieux.

Plaidoyer pour un nouveau cinéma français.

Le numéro d’avril des Cahiers du Cinéma titrait « Cinéma Français, vive les excentriques ! », de quoi prévenir un mois en amont de ce que serait la 69ème édition du Festival de Cannes. Si le festival sert toujours de baromètre, ici il nous montrait le champs des possibles d’un nouveau souffle du cinéma français porter par l’excentricité. ( Ma Loute, Bruno Dumont). Si certains nous ont laissé entrevoir une autre perspective dans l’hexagone, d’autres, comme Rachid Djaïdani, avec son Tour de France, ne vont en réalité pas nous emmener bien loin. Cette nouvelle excentricité française promet d’éclater l’ensemble sclérosé, avec de nouvelles expériences, de la confiance en ce que l’on exprime et de la joie de l’exprimer. Ici, Rachid Djaïdani manque de fraîcheur, et injecte avec la précision d’une poche à douille des instants de fraîcheur. Incisant son film de morceaux musicaux interprétés par Sadek, le film s’enlise dans un faux rythme, et n’arrivera jamais à dépasser l’allure du téléfilm.

La boucle est bouclée.

Mais de Tour de France, tout n’est pas à jeter. Après avoir retirer tout le gras de cette farce parfois grotesque, il reste une rencontre. Soit l’histoire d’un rappeur, Far’Hook, et d’une souche du cinéma français, Gérard Depardieu qui partent bon en mal an sur les traces du peintre Joseph Vernet. C’est tout ce tissu qui s’amplifie à l’écart des gags bouffis qui fait de Tour de France une balade finalement agréable. Rachid Djaïdani dessine une aquarelle un peu trop noyée dans l’imaginaire collectif de la réconciliation nationale, et qui fait ressortir les fragilités de réalisation du jeune cinéaste. Il avait déjà servi une mauvaise chronique urbaine avec Rengaine, en 2010, ne sachant pas se placer entre une revendication politique assumée et une romance zélée. Il semblerait alors que ce jeune cinéma revanchard d’un système trop embourgeoisé soit voué à l’échec. Enfermé dans un discours non réfléchi et peu abouti, c’est à peine si les fondations du colosse tricolore ont tremblé.

Pour trouver du bon à Tour de France, il faut éviter de voir ce film comme un manifeste politique, mais plutôt comme une zone franche cinématographique où chacun est pardonné d’être son propre cliché. Gérard, en roue libre, joue le meilleur rôle de sa vie, celui de l’acteur français qui ne brille plus que par l’épuisement d’un jeu dont ont ne se lassera jamais, ou presque. On ne pourrait que conseiller à l’acteur d’éviter à l’avenir les passages répétés à Marseille.

De Tour de France, il ne restera que Gérard Depardieu, qui trône en monarque absolu sur l’oeuvre de Rachid Djaidani à qui le film n’a appartenu que le temps d’une pensée.