Terriens - Earthlings ("Faites la connexion")

Par Olivier Walmacq

Genre : Documentaire (interdit aux - 16 ans)
Année : 2005
Durée : 1h35

Synopsis : Ce documentaire relate le traitement des animaux destinés à la nourriture, à l'habillement, aux divertissements et aux recherches scientifiques.

La critique :

Le réalisateur Shaun Monson fait partie de ces activistes écologistes farouchement engagés dans la cause animale. Vétilleux, le cinéaste américain débute sa carrière en l'an 2000 avec Bad Actors. En 2001, il enchaîne avec Holy War Un-holy Victory. Mais c'est en 2005 que Shaun Monson crée la controverse, les anathèmes et la polémique avec Terriens (de son titre original Earthlings).
Pour l'anecdote, le documentaire nécessitera cinq longues années de recherche, de reportages et d'investigations en caméra cachée. Dans la version américaine, c'est Joaquin Phoenix qui tient le rôle du narrateur. Dans la version française, c'est un certain Maxime Ginolin, un autre activiste écologique, qui vient prêter sa voix monocorde et un brin emphatique.

Si Terriens provoque en effet les quolibets, il suscite à l'inverse les louanges de la profession artistique. Il obtient notamment la récompense du meilleur film documentaire dans différents festivals en 2005. L'objectif de Earthlings ? Montrer et surtout dénoncer les mauvais traitements subis par les animaux dans plusieurs domaines et secteurs de notre industrie capitaliste. Les premières secondes de Terriens ont le mérite de présenter les inimitiés : "Les images que vous allez voir ne représentent pas des cas isolés, mais des normes de l'industrie en ce qui concerne l'élevage des animaux pour la compagnie, l'alimentation, l'habillement, le divertissement et la recherche".
D'une durée de 95 minutes, Terriens se divise en cinq sections bien distinctes et intitulées : 

1. Animaux domestiques
2. Nourriture
3. Habillement
4. Divertissement
5. Science.

Dès l'introduction, Earthlings annonce son caractère idéologique. Le documentaire s'ouvre donc sur un débat philosophique. Tout d'abord, le titre du film est loin d'être aléatoire. Nous sommes tous "Terriens" claironne péremptoire le narrateur du documentaire. De facto, il existe une analogie et une connexion intrinsèque entre les différentes espèces de la planète. Autrement dit, ceux qui violent ce principe appartiennent à la catégorie des spécistes.
Dès lors, le documentaire établit une curieuse juxtaposition entre les mauvais traitements subis par les animaux et les actes racistes (exemple, le Klu Klux Klan) et antisémites (les Nazis). Terriens tance et fustige la blessure infligée par Darwin à l'Humanité. Il n'y aurait donc pas d'espèce dominante.

Pourtant l'homme, à travers son histoire, s'est octroyé le droit de malmener Dame nature.  A partir de là, Terriens se transmute soudainement en documentaire coup de poing et en guerre contre les dérives du capitalisme à tous crins. Dans la première section, le film se focalise sur nos chers animaux domestiques et vilipende (entre autres...) les animaleries. Enfermés dans des cages, souvent privés de nourriture et dénués de toute socialisation avec leurs pairs, chiens et chats développent des comportements inquiétants. Plus de 16 millions seraient euthanasiés.
Hélas, le processus à base de barbituriques se transmuent régulièrement en chambre à gaz. Puis dans la seconde partie, intitulée "Nourriture", le documentaire nous convie à visiter les abattoirs. 

Derechef, les animaux destinés à finir dans nos assiettes sont régulièrement rudoyés, suppliciés, torturés et dilapidés. Après cette critique au vitriol de l'industrie agro-alimentaire, c'est le marché vestimentaire qui en prend pour son grade. Ainsi, plusieurs millions d'animaux sont chassés, emprisonnés puis massacrés pour confectionner de la fourrure. Dans la quatrième section ("Divertissement"), c'est le spectacle du cirque et ses corollaires qui sont rabroués par le film.
La plupart du temps, le dressage des animaux ne s'effectue pas par le biais de la récompense. C'est plutôt à coup de bâton et de cravache que les éléphants dociles obéissent. Le zoo est lui aussi fustigé puisque les animaux sont exposés tels des objets destinés à flagorner le grand public. Puis, ce sont les corridas qui sont vivement semoncés par le film, notamment pour leur caractère sanglant, sauvage et barbare.

Dans la dernière partie, intitulée "Science", le long-métrage dénonce les expérimentations perpétrées sur des animaux, en particulier les singes, victimes (entre autres...) de vivisections. Shaun Monson opacifie son propos en s'appuyant sur de nombreuses vidéos d'animaux torturés, abattus et/ou à l'agonie. Autant le dire tout de suite. Terriens ne fait pas la dentelle et propose de nombreuses séquences de barbarie d'une violence inouïe. Certes, le documentaire assène bel et bien l'uppercut annoncé.
Sa grande force repose dans son message anti-capitaliste.
Le film pousse un véritable cri d'alarme contre l'exploitation des animaux pour servir les vils intérêts d'un marché pernicieux et expansif (qu'il soit agro-alimentaire, vestimentaire et/ou lucratif). Earthlings pointe et morigène les effets délétères de la mondialisation. La grande force de ce capitalisme fallacieux repose sur sa capacité à transformer nos pulsions primitives et reptiliennes en produits de consommation courante.
Toutefois, malgré ses indéniables qualités, ce documentaire n'est pas exempt de tout reproche, à l'image de son message laconique : "Nous sommes tous Terriens". Certes mais encore... Qu'on le veuille ou non, nous sommes bel et bien différents. 
C'est aussi cette même altérité qui différencie les espèces, d'où la tendance du film à raisonner (parfois) un peu trop simplement...

Note : ?

 Alice In Oliver