Le Droit de Tuer ?

Le Droit de Tuer ?
Dans une bourgade du Mississippi marquée par les violences racistes, Carl Lee Hailey, après le viol de sa fille de dix ans par deux Blancs, engage un jeune avocat, Jake Brigance. Il lui confie sa crainte de voir l'affaire finir en non-lieu. Quelques heures plus tard, Carl Lee se fait justice en abattant les deux violeurs. Bien décidé à sauver la tête de son client, Jake Brigance va être entraîné dans la terrible spirale de la violence.

Le Droit de tuer ? - 13 Novembre 1996 – Réalisé par Joel Schumacher
Avika Goldsman c'est le scénariste que tout amateur de film de super-héros ne souhaite plus voir associé à une adaptation de comics, car les deux Batman qui l'a coécrit sont mauvais à un point qu'il vaut mieux dans le fond en rire ... Cependant il n'a pas toujours connu l’échec, il a même connu quelques très beaux succès, auprès de Ron Howard par exemple, avec l'oscar du meilleur scénario adapté en 2002 pour un « Homme d'Exception ». Mais si Ron Howard fut l'un des réalisateurs avec lequel il a le plus travaillé, il fut a ses débuts l'un des collaborateurs réguliers de Joel Schumacher, le réalisateur de Batman Forever, de Batman et Robin, mais aussi de celui qu'il y a entre les deux, l'éprouvant « Le Droit de Tuer ? »
L'histoire se situe Clanton, une petite ville de l'état du Mississippi marquée par les violences racistes. Des actes commis par des nostalgiques de la ségrégation et du K.K.K qui n'ont que faire de la vie d'une personne de couleur. Un jour deux d'entre eux, deux suprémacistes blancs s'en prennent à une jeune fille de dix ans l'innocente Tonya Hailey, qu'ils violent et torturent avant de la laisser pour morte. Mais heureusement, les deux violeurs sont vite arrêtés et mis en prison, en attente de leurs jugements. Une donnée que Carl Lee Hailey le père de Tonya ne peut envisager, car il pense qu'ils seront acquittés. Il fait par de ses doutes à l'avocat Jack Brigance, laissant ainsi transparaître des envies de vengeance, que le dit avocat ne prendra pas aux sérieux. Sauf qu'il aurait du ! Le jour du procès Carl déboule dans le hall du tribunal et abat froidement les deux agresseurs de sa fille, avant d’être arrêté quelques heures après … Et alors que Brigance devait défendre les droits de Tonya, il se retrouve à tenter d'éviter la peine capitale à Carl, dans un procès qui va bien au delà de ce qu'on lui reproche.
Eh bien au final c'était plutôt pas mal ! Joel Schumacher réussit un drame éprouvant au contexte particulièrement électrique. Le réalisateur adapte le roman « Non Coupable » de John Grisham qui est sa deuxième incursion dans l'univers de l'auteur américain après celle du roman « Le Client » en 1994. Ce qui lui permet d'aborder des sujets de fonds particulièrement intéressants, comme la peine de mort, la vengeance et le racisme. Sauf qu'il faut attendre les phases de procès pour ça et qu'entre temps Joel Schumacher conte une histoire que l'on sent venir sans trop forcer ou s'accumule par instants les facilités. C'est dommage, car le film ne se ménage pas pour construire une ambiance pesante, lourde et moite ou on sent la chaleur envahir chaque coin de l'écran que l'excellent travail du chef'op Peter Menzies Jr transmet à l'écran. Mais cela reste suffisamment bien rythmé et interprété pour que l'on ne s’ennuie pas.
L'action se situe dans l'état du Mississippi, un ancien état ségrégationniste ou les lois Jim Crow furent scrupuleusement suivies jusqu'à leurs abolitions en 1964 (Civil Right Act) par le président Lyndon Baines Johnson. Ce fut aussi un état ou l'organisation raciste le Ku Klux Klan prospéra pendant de longues années et qui existe encore malgré tout de nos jours. Des le début le film montre que rien n'est réglé dans cet état, le viol gratuit et abjecte de la fille de Carl juste par ce qu'elle est noire montre que le racisme est encore bien présent. Mais après l'assassinat des violeurs de la petite Tonya par Carl, les partisans du K.K.K décomplexés ne se cache plus et ils font tout pour faire condamner Carl, quitte à enlever, torturer ou intimider l'environnement de l'avocat Jack Brigance. Quant à lui, il doit convaincre un jury composé exclusivement de blanc pour lui éviter la peine de mort, ce qui donne au final un dernier plaidoyer plein d'émotion ou Brigance fait réaliser aux jurés une chose ! Et si la petite Tonya avait été une petite fille blanche ?
Un dernier plaidoyer de Brigance qui doit éviter à Carl la peine de mort, un sujet qui porte à débat et qui est encore en vigueur dans 38 états américains. Il se confronte ici à la situation de Carl qui s'est fait justice lui même en vengeant sa propre fille. Il a tué les deux violeurs, de peur qu'ils soient acquittés. Par cet acte, il risque la peine de mort. Un geste qu'il ne regrette par, car pour lui ce n'est que justice. Un cas qui pose des questions épineuses. De par son acte doit il être condamné, à mort ou non ? Si on écarte la peine de mort, oui car son geste est inacceptable, mais peut-on occulter pour autant ce qu'il s'est passé ? Oublier le destin tragique de sa fille ? Oublier les conséquences pour la victime ? Oublier le choc ? Oublier l'impuissance qu'il a ressentie ? Oublier la colère ? Mais peut-on cautionner son geste et laisser l'émotion prendre le pas sur la raison ? Si on suit le film, oui il le faut, mais c'est une posture à minima, car cela ne peut être toujours ainsi, car cela ne peut effacer les différences, cela ne peut pas rendre les gens moins racistes et la manifestation de joie après le verdict final ne masque pas les protestations d'une Amérique raciste. Seul la fin (Oui c'est assez niais et clichés) entre Brigance et son client Carl laisse entrevoir une porte ouverte vers quelque chose de meilleur, vers un début de changement des mentalités ….
Quant au casting il est vraiment pas mal ! Tout d'abord, il y Sandra Bullock, la star montante de Speed dans un rôle particulièrement subtil, où elle apporte un œil neuf à l'histoire, mais surtout un point de vue divergent sur la question de la peine de mort, ainsi qu'un réel contrepoids à l'ambition de l'avocat. Jack Brigance est joué par un Matthew McConaughey vraiment convaincant qui donne beaucoup de soi pour être crédible et surtout il use de son accent naturel avec beaucoup de charme. Samuel L. Jackson joue Carl Lee Hailey et il se révèle aussi brillant qu'à l'accoutumée, ceci dit je ne sais pas si c'est la proximité à l'époque de Pulp Fiction, mais je m'attendais a certains moments à voir Jules Winfield au tribunal. On trouve aussi Donald Sutherland en avocat rayé du barreau et militant pour les droits civiques; le fils Sutherland avec Kiefer qui joue Freddie Lee Cobb, un suprémaciste blanc qui veut a son tour venger la mort de ses frères et tous les deux sont assez convaincant. Il y a aussi Oliver Platt, Patrick McGoohan, Ashley Judd en madame Brigance et l'inévitable Kevin Spacey en avocat de l’accusation aussi con que très compétent ...

Oeuvre poignante pour réflexion percutante ! 
Le Droit de Tuer ?