Synopsis : " Craignant que Superman n'abuse de sa toute-puissance, le Chevalier noir décide de l'affronter : le monde a-t-il davantage besoin d'un super-héros aux pouvoirs sans limite ou d'un justicier à la force redoutable mais d'origine humaine ? Pendant ce temps-là, une terrible menace se profile à l'horizon... "
Le cinéma est un art de sensations. Comme l'on dit assez souvent pour achever une conversation dont on ne voit pas le bout : " il en faut pour tous les goûts ". En effet, à l'instar de la peinture, de la sculpture ou de la musique, il y a dans le cinéma, de quoi procurer du plaisir à n'importe quel spectateur. Certains films réussiront même à contenter plusieurs publics simultanément grâce à un spectacle qui réunira avec force et conviction le drame à la comédie ou le grand spectacle à la comédie par exemple. Cataloguer un film c'est l'enfermer dans un carcan dont il sera finalement plus prisonnier qu'autre chose, même si en effet, c'est bien pratique de dire de tel ou tel film qu'il est un drame ou une comédie. Chaque spectateur aura un ressenti qui lui sera propre à la sortie d'une salle de cinéma ou à lors de l'amorce du générique de fin. Deux avis peuvent être les mêmes, mais les ressentis ne le seront jamais. De par leurs maladresses, leurs choix artistiques ou scénaristiques, certaines œuvres cinématographiques réussissent à diviser les spectateurs au point qu'ils ne sachent que dire.
À la question : " Que pensez-vous de ce film ? " , si la réponse est un simple " euh ", ce n'est pas que le film est une purge immonde, c'est simplement que le spectateur ne sait pas encore s'il a été touché ou non par l'histoire qui lui a été contée et la façon dont elle a été contée. Attendu comme le messie des films de super-héros depuis son annonce au Comic-Con en juillet 2013, Batman V Superman : Dawn of Justice a depuis réussi l'exploit de passer du statut de plus grand film de super-héros en devenir au statut de film de super-héros qui a le plus divisé de la décennie. L'on croyait que cet affrontement de choc allait faire qu'une bouchée de la Civil War de chez Marvel. Bonne blague. Crucifié par la critique, ainsi que par les spectateurs, Batman V Superman ne réussit à dépasser les 900 millions de dollars de recette à l'international alors que son concurrent direct à quant à lui dépassé le milliard. Et avec facilité. Quand est-il vraiment et comment Zack Snyder a-t-il fait pour rater à tel point ce film ?
La réponse est simple et peut-être résumée en un mot : producteurs. Il a déclaré il y a peu, se dédouanant par la même occasion, que la Warner (producteur/distributeur du film à l'international) a eu peur d'une version de 3 heures. Il faut savoir que dès le moment où la durée d'un film dépasse les 2h30, c'est en moyenne une séance par jour et par cinéma qui est supprimée. Pour un film aussi attendu que celui-ci, ça fait bien évidemment peur aux producteurs, puisque ça représente pour eux une rentrée moindre d'argent. Comme par magie, la durée du film est donc passée de 3h02 à 2h33 générique compris. Tout le monde est content, le film peut sortir à l'international. Et là c'est le drame. Finalement, le film n'a pas dépassé le milliard à cause d'un bouche à oreille catastrophique, mais avec la durée initiale qui n'est autre que celle de l' Extended Cut aujourd'hui disponible, mais l'aurait-il fait avec un bon bouche-à-oreille et une durée de plus de trois heures ? Peut-être que oui... peut-être que non. Dans tous les cas, les journalistes américains qui avaient dit par le passé que Batman V Superman était un naufrage reviennent aujourd'hui sur leurs propos, déclarant que la version Extended Cut aurait dû être la version officielle du film et non un " bonus " pour la sortie vidéo. Puisque oui, le montage cinéma du film Batman V Superman n'était clairement pas bon.
Personnages sous-exploités, intrigues survolées... le film ressemblait à un enchaînement de séquences faites pour introduire de nouveaux personnages et plus particulièrement la fameuse Justice League. Cette version manquait d'harmonie et la bande originale composée à quatre mains par Hans Zimmer et Junkie XL, qui se pose ici comme successeur du premier, représentait bien ce manque d'harmonie. On avait comme l'impression étrange que des plans, des scènes avaient été retirés du montage, laissant tout de même jouée la musique sans faire de montage particulier. Un montage au hachoir fait dans la simple idée de descendre la durée du film, sans se soucier de la lisibilité du long-métrage, ainsi que des enjeux et personnages qui constituent son scénario. Batman V Superman : Dawn of Justice Extended Cut nous le prouve parfaitement. La bande originale est toujours la même, le film est toujours le même dans le fond, mais il devient ici lisible, harmonieux et le scénario paraît d'une richesse affolante. D'une richesse affolante, non pas que ses enjeux soient fondamentalement plus fort, mais de par le nombre de personnages et arcs narratifs qui sont ici traités et développées avec efficacité.
Chacun des personnages, qu'il soit primaire ou secondaire - Loïs Lane n'est pas qu'une compagne aux agissements idiots, car apeurée, mais également une journaliste hors pairs qui va tout faire pour prouver que Superman n'est pas une menace - va, par le biais de ce nouveau montage, gagner en profondeur et réellement apporter sa pierre à l'édifice. Édifice menant à l'affrontement entre Batman et Superman. Combat qui arrive après plus de deux heures de films. Combat qui s'avère être la cerise sur le gâteau, la conclusion d'une construction scénaristique qui a fait en sorte qu'on en arrive à cet affrontement. En effet, l'affrontement entre Batman et Superman n'est pas qu'un simple combat, c'est un amoncellement d'actions, de réflexions et remises en question qui amènent à une affiliation et à un combat. Batman V Superman : Dawn of Justice est un film qui, par le prisme de l'affrontement de deux super-héros aux idéologies qui leur sont propres, met en avant le questionnement autour de la supériorité et de la peur de l'autre. Superman étant la représentation du pouvoir, de l'inarrêtable et Batman la représentation du peuple, de l'homme terre-à-terre qui se bat sans pouvoirs qu'avec l'aide de gadgets. Un questionnement aboutissant sur un autre, celui de l'humain.
L'humain est au centre de ce scénario et de la mise en scène signée Zack Snyder. Snyder a toujours été un excellent faiseur, mais un faiseur qui stylise autant qu'il le peut. Il stylise et esthétise les émotions, jusqu'à parfois trop en faire. Ce qui en déroute beaucoup, mais à l'inverse plaît également à beaucoup. Batman V Superman ne déroge pas à la règle et offre son lot de plans dégoulinants de symboles. Il en fait parfois trop - la musique en ajoute également une couche ce qui n'aide pas - mais c'est ce qui va finalement donner du caractère à son film et caractériser par la même occasion les personnages. Superman est un personnage qui ne parle pas énormément, il est la représentation d'un symbole avant tout et sa simple mise en scène va réussir à faire transparaître son ressenti à l'image. Zack Snyder est généreux, trop généreux, allant jusqu'à oublier de retravailler ses dialogues aux dépens de cette générosité visuelle, mais ce terme va finalement être plus mélioratif que péjoratif. C'est ce qui caractérise sont cinéma, c'est ce qui caractérise ce Batman V Superman : Dawn of Justice Extended Cut.
En Conclusion :
Batman V Superman : Dawn of Justice Extended Cut est le film qui aurait dû être projeté au cinéma à compter du 23 mars 2016. Plus qu'une simple introduction à la Justice League, Batman V Superman est un film qui traite de la place du super héros dans le monde auquel il appartient et du regard que l'on porte sur lui. Grâce à une mise en scène généreuse, mais également méticuleuse sur certains points, Zack Snyder réussit à donner à caractériser et à donner sa place à chacun des personnages. Si Lex Luthor s'avère toujours aussi insupportable et Wonder Woman reste encore et toujours celle qui arrive au moment opportun pour donner un bon coup de pied, Lois Lane gagne en intérêt, à l'instar de Batman qui devient le véritable maître fondateur de la Justice League. Riche homme d'affaires qui se dit être un philanthrope, mais dont le sombre passé de justicier ne serait que le moyen d'exprimer sa colère. Le film devient avec ce montage, harmonieux, agréable et d'une fluidité remarquable grâce à une jolie communion entre l'image et le son, mais n'est pas parfait pour autant. Subsistent quelques défauts qui ne pouvaient être gommés avec un nouveau montage. Des facilités scénaristiques, introduction foireuse des autres personnages de la Justice League, ainsi qu'un manque de subtilité qui va de pair avec la grandiloquence de la mise en scène de Zack Snyder, viennent entacher cette œuvre cinématographique, mais n'en font en aucun cas un mauvais film. Bien au contraire, c'est un excellent divertissement qui prouve que l'on peut faire un film de super héros tragique, dynamique et visuellement époustouflant.