[CRITIQUE] Hibou (2016)

Par Pulpmovies @Pulpmovies

Réalisé par : Ramzy Bedia

Avec : Ramzy Bedia, Elodie Bouchez

Sortie le : 6 juillet 2016

Durée : 1h23

Distributeur : Gaumont Distribution

3D : Oui – Non

Synopsis :

Rocky est un homme discret. Il est heureux mais n’existe dans le regard de personne. Un soir en rentrant chez lui, il découvre un hibou “Grand Duc” sur son canapé qui le fixe intensément. Il comprend qu’il doit agir. Le lendemain, arrivé à son bureau, il revêt un déguisement de hibou sans que personne n’y prête la moindre attention. Jusqu’au jour où il rencontre une panda…

2/5

Lorsque Ramzy est venu nous présenter son Hibou, on avait envie de croire en son projet : un premier long métrage auquel l’acteur, ici réalisateur et scénariste, a consacré plus de quatre ans. Son objectif ? Se détacher de l’image d’un éternel déconneur, et mettre l’humour au service de la tendresse. Hibou, c’est l’histoire d’un type paumé qui n’existe aux yeux de personne et qui, du jour au lendemain, décide de tout faire pour être remarqué. Tout, quitte à basculer dans l’excès et la caricature.

Hibou se veut être une fable sur le vivre ensemble et l’acceptation de soi : faut-il à tout prix chercher à se faire remarquer par les autres ? Est-il nécessaire de jouer un personnage pour être accepté, mais surtout apprécié par ses collègues, ses amis, ses proches ? Peut-être est-ce là ce que présume Rocky, employé dans une entreprise pharmaceutique, ignoré par ses pairs (voire méprisé par d’autres) alors qu’il est bien difficile de passer à côté de son bureau/capharnaüm personnel. Il mène une petite vie tranquille, alignant sagement ses boites de thon dans ses placards, dans un environnement tout aussi anonyme : si le film a été tourné au Québec, Ramzy souhaitait donner l’impression d’un entre-deux, entre le Canada et la France, un espace inconnu. Une ville américanisée (il n’y a qu’à voir les voitures, l’agencement des rues) où les gens parlent d’euro et lisent Le Parisien : on ne s’y retrouve pas vraiment, et c’est sûrement l’intention (on sent là un petit air de Gondry et de L’Écume des jours), mais le tout reste très confus.

Pourquoi ces costumes de hibou et de panda ? Comme ça. Ce dernier est venu à l’esprit de Ramzy après avoir vu les amusantes publicités où l’animal renverse tout sur son passage car personne ne le remarque. Dans le film, aucune réelle explication n’est donnée. Si le hibou est une évidence, l’arrivée du Grand duc dans l’appartement de Rocky est toujours aussi énigmatique. L’animal, bien qu’il serve à nourrir quelques gags rapidement répétitifs, ne fait que de la figuration, et reste au cœur de quelques plans de transition sans grande logique. À quoi bon se déguiser en piaf ? Le costume est mis au service d’une métaphore de l’identité, sous de multiples facettes : il représente l’être que Rocky voudrait voir aimé de tous, mais est aussi cette enveloppe qui le protège de l’extérieur, n’ayant pas confiance en lui-même et en les autres.

Tout ce qui pourrait donner lieu à cette réflexion sur l’identité n’est finalement qu’à peine effleuré au profit de gags tournant très vite dans le même registre, auxquels contribuent quelques invités comme Eric Judor (évidemment !) ou Philippe Katerine (déjà présent dans La Tour 2 Contrôle infernale). Le duo se sépare pour mieux se retrouver, comme s’ils étaient finalement incapables de faire quelque chose l’un sans l’autre. Quant à la présence du chanteur, elle ressort plus de la private joke qu’autre chose, n’apportant pas un grand intérêt à l’intrigue. Hibou manque de rythme, de substance et de véritables enjeux : l’intrigue autour du père de Rocky, complexé par la disparition d’un de ses objets fétiches, et la romance naissante entre le hibou et le panda (Elodie Bouchez, très attachante malgré tout !) se résolvent en deux temps, trois mouvements, donnant une film une morale cliché au possible. La tendresse et la poésie que l’on cherche à nous vendre, martelée en tête d’affiche, ne sont au final que mièvrerie et niaiserie complète, comme l’un des derniers plans où les deux amoureux se regardent longuement, beaucoup trop longuement.

Il y avait pourtant de la bonne volonté. Celle de sortir des sentiers battus de la comédie française avec ses thèmes bien trop récurrents, celle de vouloir s’inspirer de Gondry, Tati, ouvertement cités par Ramzy comme références. Même l’esthétique laisse parfois à désirer, comme ces insertions numériques du hibou sur des plans aériens, que l’on croirait sortis d’un cross-over entre Sharknado et un nouveau Owlnado.

On se retenait de le dire depuis le début : Hibou, c’est vraiment pas chouette.