Genre : horreur, gore, trash (interdit aux - 18 ans)
Année : 1988
Durée : 58 minutes
Synopsis : Un peintre trouve une sirène dans les égoûts et l'emmène chez lui. Mais celle-ci commence à se couvrir de pustules et à saigner. Le peintre décide alors de faire le portrait de celle-ci en utilisant son sang.
La critique :
A l'origine, Hideshi Hino est un mangaka essentiellement connu pour ses publications d'histoires horrifiques gores et ultra violentes. C'est à partir des années 1970 qu'il se construit une certaine renommée dans l'univers du manga à travers les exactions de tueur en série déviants, de morts-vivants se délectant de chair humaine et autres créatures difformes et à l'appétit aiguisé.
En 1985, il participe à la production de Devil's Experiment, le premier volet de la série Guinea Pig. Certes, le concept de ce moyen-métrage est de facture conventionnelle puisqu'il raconte "l'histoire" (vraiment un terme à guillemeter...) d'une jeune femme anonyme atrocement suppliciée par des agresseurs masqués sur fond de snuff movie.
Profondément marqué par cette expérience cinématographique et par les mutations de la société nippone, Hideshi Hino réalise dans la foulée Flower of Flesh and Blood, soit l'histoire d'un samouraï qui kidnappe à son tour une jeune femme, la torture, la dilapide et la démembre ; avec pour but de réaliser une oeuvre d'art morbide et eschatologique. Le moyen-métrage s'inscrit dans le sillage et la continuité de Devil's Experiment. Hideshi Hino aurait reçu un paquet d'un fan anonyme contenant une vidéo de ce meurtre, ainsi qu'une épître exhaustive, relatant les divers supplices infligés à la victime.
Une enquête est même ouverte par la police mais ne débouche sur aucune piste. Parallèlement, l'acteur américain, Martin Sheen, ressort profondément marqué par cette expérience cinématographique et contribue, malgré lui, à la notoriété du film.
Très vite, Flower of Flesh and Blood devient la nouvelle égérie du cinéma extrême. Certains fans exaltent les qualités artistiques et technique du moyen-métrage. Flower of Flesh and Blood, un leurre ou un vrai snuff movie ? La question suscite à la fois la polémique et les quolibets. Fort de cette expérience et plébiscité par les fans du cinéma extrême, Hideshi Hino est de retour, trois ans plus tard (donc en 1988), avec Mermaid In A Manhole, soit le quatrième volet de la saga Guinea Pig.
Hideshi Hino sait qu'il est évidemment attendu au tournant. Cette fois-ci, point de snuff movie ou de légende urbaine turpide et fallacieuse. Le cinéaste réalise un film dans la foulée des productions gores et horrifiques des années 1980, notamment Basket Case (Frank Henenlotter, 1982) et Street Trash (James Michael Muro, 1987).
Narquois, Hideshi Hino décide de rompre avec la dialectique de Devil's Experiment et Flower of Flesh and Blood. Pourtant, les apparences sont trompeuses puisque le film relate à nouveau la relation ambigüe qui se noue entre un peintre et sa nouvelle égérie. Attention, SPOILERS ! Un peintre découvre dans les égouts le fruit de ses rêves, une sirène, qui ne tardera pas à montrer des signes de dégradation physique. L'artiste installe la sirène dans une baignoire et entreprend de réaliser une peinture, utilisant les substances purulentes qui se dégagent du corps de son modèle.
Par certains aspects, Mermaid In A Manhole n'est pas sans rappeler le cinéma et l'univers peu ragoûtant de David Cronenberg période 1980, avec La Mouche (1986), Scanners (1981) et Videodrome (1983).
Là aussi, le sang coule à flots en fonction des délires oniriques et des expérimentations d'un peintre japonais. Ce dernier trouve, par hasard, dans les égoûts la femme de ses rêves (je renvoie au synopsis), en l'occurrence une sirène. Pourtant, une fois débarquée dans l'atelier de l'artiste, le corps de la créature légendaire se délite et ne tarde pas à se couvrir de pustules érubescentes.
Hagard, le peintre assiste béat à de multiples effusions sanguinaires. Niveau gore, Hideshi Hino fait preuve d'une grande prodigalité et multiplie, à satiété, les mutilations ; avec ce corps qui se dépérit et se languit sous le pinceau aiguisé (c'est le cas de le dire...) du peintre. Bientôt, ce sont des vers marins qui se meuvent sur la poitrine et le visage de la sirène. Les esprits les plus impressionnables sont donc priés de quitter leur siège et d'aller faire un petit tour.
Inutile de comparer Mermaid In A Manhole à Flower of Flesh and Blood. Visiblement, Hideshi Hino a abandonné le réalisme cru au profit d'une pellicule gore, trash et égrillarde. Les prothèses et la profusion de sauce tomate sont hélas visibles à l'écran. Non, Mermaid In A Manhole n'est pas destiné à reproduire le choc et l'uppercut assénés par Flower of Flesh and Blood.
Toutefois, la conclusion finale se montre beaucoup plus éloquente. Hideshi Hino convie le spectateur à sonder et à s'interroger sur l'esprit azimuté de son peintre schizoïde. Mermaid In A Manhole reste également le dernier chapitre valable de la franchise. Paradoxalement, il préfigure aussi le marasme de la saga, avec les deux épisodes suivants (Android of Notre Dame et Devil Doctor Woman), qui sombreront définitivement dans l'humour graveleux et licencieux.
Note : 11/20