[CRITIQUE] – Elvis & Nixon (2016)

Par Pulpmovies @Pulpmovies

Réalisé par : Liza Johnson


Avec : 
Michael Shannon, Kevin Spacey, Alex Pettyfer, Colin Hanks, Evan Peters


Sortie :
 20 juillet 2016


Durée: 
1h26


Distributeur :
Warner Bros. France

Synopsis :

La rencontre improbable et méconnue entre Elvis, la plus grande star de l’époque, et le Président Nixon l’homme le plus puissant du monde. Deux monuments que tout oppose.

4/5

Elvis & Nixon est le troisième long-métrage de Liza Johnson mais le premier à bénéficier d’une sortie en France, étant donné que Return (2011) et Hateship Loveship (2013) n’ont pas eu cette opportunité. Comme son titre l’indique, le nouveau film de la réalisatrice américaine traite d’un événement pour le moins improbable : la rencontre entre Elvis «  The King » Presley » et le président Richard Nixon à la Maison-Blanche. Une entrevue immortalisée par une photographie devenue la plus consultée des archives du Congrès aux Etats-Unis.

Nous avons donc d’un côté Elvis Presley : légende vivante du rock’n’roll et icône culturelle sans précédent. Et de l’autre Richard Nixon : président républicain des Etats-Unis d’Amérique encore au début de son mandat. Rien ne laissait présager que ses deux personnalités finiraient par se rencontrer, et encore moins lors d’un tête-à-tête privé au sein même du Bureau ovale ! Une initiative venue tout droit du natif de Memphis qui, dans un élan pour le moins farfelu, pris l’avion pour Washington, rédigea une lettre de 6 pages à l’attention du chef d’Etat et se présenta devant la Maison-Blanche afin de la lui remettre en mains propres. Alarmé par la gangrène que représentait la drogue au sein de la société américaine, le King lui proposa ses services en vue de devenir un agent infiltré du Bureau des narcotiques et des drogues dangereuses. Rien que ça !

Avec Michael Shannon et Kevin Spacey à l’affiche,  nous étions bien certains d’une chose : celle d’être enchantés par d’excellentes performances d’acteurs, assurance sur laquelle nous ne nous sommes pas trompés ! Ils nous gratifient effectivement d’une composition délicieuse en puisant chacun à leur manière dans la diction, la gestuelle et autres mimiques de l’intéressé. Le comédien fétiche de Jeff Nichols (Midnight Special) s’illustre une nouvelle fois en s’accommodant d’un Elvis pugnace, un brin timbré mais sûr de lui tandis que l’interprète de Frank Underwood (qui est décidément un homme politique dans l’âme) ne perd rien de son charisme légendaire, incarnant un Nixon bougon farouchement opposé à l’idée de recevoir le King avant de revenir sur ses positions : pas franchement populaire auprès des jeunes, il réalise que le savoir à ses côtés lui permettrait de redorer son image… de plus sa fille a lourdement insisté pour obtenir un autographe ! Si cette entrevue imposée peut facilement sonner comme un caprice de star de la part de la vedette de Jailhouse Rock, on remarque chez elle une certaine lassitude d’être adulé uniquement pour ses tubes, perruques, costumes, lunettes, et regrette qu’en réalité, on ne sache pas qui est véritablement l’enfant de Memphis. A travers sa demande saugrenue, on décèle un homme qui se cherche, un homme en quête d’identité.

Idole incommensurable face à un président décrié, leur rencontre semblait au premier abord lié deux âmes que tout oppose. Leur rencontre sonne tel un match de boxe, une guerre d’égos où chacun tente de se démarquer, même s’ils réaliseront qu’ils sont liés par de fortes similitudes : attitude réactionnaire, amour des armes à feux et de l’Ordre, mépris envers la contre-culture, les gauchistes ou même les Beatles ! Fabuleux et désopilants, les comédiens font le show et représentent naturellement LE point fort du long-métrage. Parmi les seconds rôles nous retrouvons Colin Hanks et Evan Peters (X-Men Apocalypse) qui eux aussi s’amusent comme des fous en interprétant les conseillers de Nixon, qui contrairement à leur patron étaient tout de suite enthousiastes à l’idée de cette rencontre. Mention également à Alex Pettyfer, très convaincant dans la peau de Jerry Schilling, ami fidèle et associé du chanteur de Love Me Tender.

D’une durée de 86 minutes, la faible longueur d’Elvis & Nixon n’est en aucun cas un défaut et permet d’éviter certaines digressions qui auraient nui à la narration. Au contraire le film progresse avec efficience et contient son lot de scènes cocasses, de dialogues ciselés et de rythme pour maintenir le spectateur éveillé. Il en est de même avec la mise en scène de Liza Johnson qui tend à reconstituer l’ambiance des 70’s grâce à une photographie, couleurs et costumes soignés. Ajouter à cela une bande sonore catchy aux accents principalement soul et rhythm’n’blues (Sam & Dave, Rufus Thomas, Otis Redding) avec des touches jazz fusion (Blood, Sweat & Tears), gospel (Sister Rosetta Tharpe) et  rockabilly (Creedence Clearwater Revival). Sont également évoqués de faits marquants de l’époque comme les manifestations contre la guerre du Viêt-Nam ainsi que les revendications des mouvements hippie et Black Panthers.  Enfin, on remarque que la fascination autour d’Elvis s’exerce surtout auprès du public blanc. Seuls les Afro-Américains semblent indifférents au mojo du King malgré son statut de superstar.

Elvis & Nixon est une réflexion stimulante sur les années 70 et sur le pouvoir médiatique portée par des comédiens en roue libre. Liza Johnson transforme l’anecdotique en une page d’Histoire délirante et surréaliste !