Critique: Suicide Squad

Par Captainblogbuster @dionombo

C’est tellement jouissif d’être un salopard ! Face à une menace aussi énigmatique qu’invincible, l’agent secret Amanda Waller réunit une armada de crapules de la pire espèce. Armés jusqu’aux dents par le gouvernement, ces super-méchants s’embarquent alors pour une mission-suicide. Jusqu’au moment où ils comprennent qu’ils ont été sacrifiés. Vont-ils accepter leur sort ou se rebeller ?

Après Batman v Superman: l’Aube de la Justice, nous continuons d’avancer dans le DCEU (DC extended universe) qui se met tout doucement en place. Un DCEU qui n’a pas démarré sous les meilleurs auspices avec un Man of Steel et surtout un Batman v Superman qui ont énormément divisé et donné des sueurs froides à la Warner. Avant de découvrir Wonder Woman, le studio nous propose, avant la Justice League, son tout premier film sur une équipe de l’écurie DC: la Suicide Squad.
Une team qui pourrait être pour la Warner/DC ce qu’a été Les Gardiens de la Galaxie pour Marvel Studios: une équipe atypique qui a tout les atouts pour nous offrir un film différent des autres comics book movies. Le réalisateur David Ayer (Fury, Sabotge) a t-il réussi à nous livrer un film qui sort des sentiers battus?


La réponse est non. Et pourtant, sur le papier, la recette faisait rêver: une équipe de vilains au service du gouvernement qui effectue des missions suicidaires contre des remises de peine. Pourquoi la mayonnaise n’a pas prit? Tout simplement parce que, comme Batman v Superman, le film n’a pas tenu ses promesses: une recette alléchante pour un résultat mitigé.
Le problème vient en premier lieu que ce groupe qui devait être constituée d’assassins, de vermines de la pire espèce, de salopards est en réalité composée de « gentils méchants »! Ce qui devait être une équipe peu conventionnelle n’est finalement qu’une banale équipe. On recherche à tout moment ce petit truc qui ferait d’eux des pourritures: abattre un soldat de sang froid, trahison etc etc… Il n’en est rien! Les membres de cette équipe sont tout sauf des méchants…


Une chose aurait dû nous mettre la puce à l’oreille: la promotion excessivement cool et colorée de ce film. Je vous invite à revoir la toute première bande annonce de ce film (celle de la comic con 2015) et de la comparer à celle des mois suivant: le ton est radicalement différent.
Est ce que David Ayer avait il prévu un film plus sombre? Surement car en avril dernier, on apprenait la Warner procédait à trois semaines de reshoot pour apporter une dose de fun au film. Grossière erreur de leur part. Dans leur recherche de la « cool attitude », ils se sont tirés une balle dans le pied et ont bousillé ce qui faisait l’essence de la Suicide Squad. Le studio voulait à tout prix un film du même calibre que Les Gardiens de la Galaxie. Du coup, on se retrouve avec un côté « cool » qui est permanent et une bande son transpirant la pop dès le début du film (d’ailleurs, David Ayer n’hésite pas un reprendre l’un des morceaux de l’Awesome Mixtape vol.1 des Gardiens de la Galaxie). Mais ce qui marchait aisément pour Peter Quill et sa bande ne fonctionne pas du tout avec la Suicide Squad. Pourquoi? Tout simplement parce qu’on ressent que tout ce côté cool est forcé. La tentative d’avoir une équipe, un film aussi cool que celui de Marvel ne convainc pas.
De plus, niveau scenario on relèvera certaines incohérences. Par exemple, la mission principale de la Suicide Squad (un « colis » à récupérer) ne justifie pas du tout la constitution d’une telle équipe. Un groupe de soldat surentrainé aurait largement fait l’affaire. Ce n’est qu’un malheureux imprévu qui donnera à la Suicide Squad une mission subsidiaire et calibrée pour la fonction première du groupe: effectuer des opérations totalement suicidaire.

Peut être que la Warner aurait dû s’inspirer du ton irrévérencieux de Deadpool, un film teinté d’humour noir aurait plus sied à la Suicide Squad. Ils en avaient largement les moyens avec le Joker et Harley Quinn réunis pour la première fois sur grand écran.
C’était prévisible mais le Joker version Jared Leto bénéficie d’un temps de présence moindre que les autres personnages. On ne peux que saluer la prise de risque de David Ayer de nous proposer un Joker au look totalement surprenant. Jared Leto a un aspect flippant mais l’écriture du personnage divisera les fans.
Au delà des tatouages, c’est plus son aspect « bling bling » qui dérange. On peut comprendre la volonté de proposer un Joker qui doit marquer les esprits après l’incroyable performance de Health Ledger dans The Dark Knight mais bon, nous proposer une version mafieuse et bling bling du Joker, c’est très risqué. De plus, on retrouve pas le fauteur de troubles auquel on a été habitué. Non, c’est une version totalement éprise de Harley Quinn que nous offre Ayer et chacune des actions du clown du crime ne sont dirigées que vers un seul but: sa partenaire. C’est assez surprenant lorsqu’on connait leur relation particulière et qu’on sait que le Joker est tout sauf un lover… Certains disent que ce Joker est le plus mauvais des Jokers, je dirai plutôt que c’est le moins bon. Jared Leto ne démérite pas mais à parfois tendance à surjouer. De plus, il devrait retravailler un des points essentiels du Joker: son rire.


Concernant les autres personnages, là aussi c’est mitigé. Impossible d’avoir un traitement équitable de tout les membres de l’équipe lorsque tout les projecteurs sont braqués sur Deadshot et Harley Quinn. Il n’y a rien a redire: Will Smith est classe et bad-ass en Floyd Lawton/Deadshot. Le problème? C’est son interprétation du personnage. Will Smith nous fait exactement ce qu’il fait depuis Le Prince de Bel AirBad Boys, Wild Wild West ou Independence Day: du Will Smith. L’autre vedette du film, Margot Robbie en Harley Quinn. Rien à redire sur sa prestation, l’actrice a réussi à saisir la folie qui caractérise bien son personnage.
Malheureusement, ces deux personnages tirent l’essentielle de la couverture sur eux, laissant peu de place pour le développement des autres membres de l’équipe. Jai Courtney en Captain Boomerang tente en vain de se faire une place, Karen Fukuhara en Katana est bad-ass mais sous exploitée et Adewale Akinnuoye-Agbaje en Killer Croc ne fait que de la figuration. Seul Rick Flag (Joel Kinnaman) et Diablo (Jay Hernandez) parviennent à coexister aux côtés de Deadshot et Harley Quinn. Le cas Cara Delevingne est particulier: convaincante lors de ses premières apparitions en Enchanteresse, le personnage devient petit à petit ridicule. Celle qui tire réellement son épingle du jeu, c’est bel et bien Viola Davis. Elle incarne parfaitement Amanda Waller: manipulatrice, froide et sans pitié. Surement le personnage le mieux réussi du film et qu’on aimerait revoir dans d’autres films.


Beaucoup de points négatifs pour ce film et pourtant on ne s’ennuie pas une seconde. Malgré un montage douteux, le rythme est soutenu. Mais le problème, c’est que Suicide Squad n’arrive jamais à dépasser son statut de simple divertissement. Il suffit de voir les scènes d’action: cool mais loin d’en mettre plein la vue. Trop gentillet, pas assez de violence et un final bon mais pas transcendant. Bref, Suicide Squad ne se contente que d’être moyen en tout point…

Est ce que Suicide Squad est un mauvais film? Non, c’est un excellent divertissement. Est ce que la Suicide Squad est ratée? Nous avons de bons personnages mais les 3/4 sont sous exploités. On nous vendait une équipe de vilains, de raclures mais on est loin du compte. On ne peut que reprocher à la Warner de ne pas avoir eu le courage de nous offrir un film, plus sombre, plus adulte et violent. L’erreur du studio: vouloir copier la recette de son concurrent de toujours: Marvel. Ils ont voulu un film cool, ils l’ont eu mais le résultat final en pâtit énormément.  On ne peut que déplorer ce gâchis… Deux films sortis cette année mais la Warner et DC peinent à nous présenter un DCEU convaincant. Ma note: 6.5/10


Suicide Squad est réalisé par David Ayer avec Will Smith, Jared Leto, Margot Robbie, Viola David, Jai Courtney, Cara Delevingne, Joel Kinnaman, Adam Beach, Scott Eastwood, Karen Fukuhara, Jay Hernandez, Raymond Olubowale et Adewale Akinnuoye-Agbaje. Sortie: le 03 aout 2016. Durée: 02h10.