Kenneth Branagh fait l’unanimité en incarnant le commissaire suédois Kurt Wallander dans cette série britannique de grande qualité.
Un générique aux couleurs suédoises égraine les lettres du nom de W.A.L.L.A.N.D.E.R. La guitare en fond sonore est douce. La série que vous regardez n’est pas une grande série d’action. Néanmoins, comme l’américain Harry Bosch, le suédois Kurt Wallander ne lâche jamais prise. Il est un enquêteur entêté, qui avance pas à pas, sans bousculer les choses… sauf quand c’est absolument nécessaire. Mais combien de fois a-t-on été déçu par l’incarnation d’un personnage de roman à l’écran ? La série Bosch, très récemment produite, adaptée des romans policiers de Michael Connelly, en est une énième preuve. Le casting est primordial pour donner corps au personnage et une erreur peut être fatale : le physique de Titus B. Welliver ne correspond en aucun cas à l’inspecteur Harry Bosch.
L’immense atout de la série britannique Wallander, qui adapte pour le petit écran les livres du suédois Henning Mankell, est d’avoir trouvé en Kenneth Branagh le parfait interprète du détective Kurt Wallander. S’appuyant sur sa blondeur naturelle, Branagh a su brillamment s’immerger dans la peau du commissaire suédois. Il a capté sa détresse presque constante, due aux horreurs dont il est témoin au quotidien et à sa vie privée, presque inexistante et dénuée de bonheur. Mal de vivre, empathie trop prononcée, impulsivité, autant d’éléments qui font du personnage un être sensible, attachant et particulièrement vulnérable. L’acteur britannique joue avec brio sur ces cordes sensibles, professionnelles et personnelles. Il montre une extrême émotivité tout en pourchassant avec opiniâtreté les criminels les plus pervers. L’intérêt pour les intrigues policières reste donc pour le spectateur profondément lié à l’épaisseur du personnage principal, dont la lente évolution est parfaitement rendue par les choix scénaristiques et la finesse du jeu de Kenneth Branagh.
L’univers de la série reste très fidèle à celui des romans, traitant des plus terribles crimes en série, vengeurs ou vicieux, dans la magnifique campagne suédoise d’Ystad, petite ville de bord de mer. La photographie, soignée et précise, montre régulièrement ces superbes paysages qui tranchent avec les violences commises au cours des épisodes. Tournée en Suède, en grande partie en décors naturels, la série fourmille de petits détails, comme la sonnerie du téléphone du commissaire ou le verre de vin perpétuellement posé près du canapé où il finit tous les soirs par s’endormir. Le soin apporté à ces petites choses fait de Wallander une friandise que l’on grignote facilement, sans s’arrêter. Le casting est impeccable, jusque dans les rôles secondaires, attribués à de futurs grands acteurs (Nicolas Hoult, Tom Hiddleton…). Tout sonne juste et tellement scandinave ! Etrangement, le décalage entre la langue (anglaise) et les décors (suédois) ne choquent en aucun cas.
A chaque épisode correspond un livre, adapté avec talent, car les coupes effectuées vis-à-vis des romans permettent d’en retrouver l’essence en seulement 1h30. Petit bémol tout de même concernant Les Chiens de Riga, dans la saison 3, dont les tensions politiques et scénaristiques, insoutenables dans le roman, semblent difficilement adaptables à l’écran.
Certaines séries peinent à s’arrêter. Ici, quatre saisons de trois épisodes chacune, constituent une belle œuvre, avec un dernier trio particulièrement remarquable, intelligent, spécialement bien écrit et interprété par Branagh. Comme un bon vin, la série, initiée en 2008, se bonifie avec l’âge. La saison 4, diffusée en juin dernier sur la BBC (Grande-Bretagne), sera probablement bientôt retransmise sur Arte, comme les trois saisons précédentes.
La Cinéphile Eclectique (Carnets Critiques )
Série créée par Philip Martin.
Diffusée depuis le 30 novembre 2008 sur BBC One, depuis octobre 2009 sur Arte.
Avec Kenneth Branagh, Sarah Smart,Tom Hiddleston, Richard McCabe, Tom Beard, Sadie Shimmin,
Jeany Spark, David Warner…