Autant Insaisissable nous avait subjugué, rappelant que la magie du cinéma fantastique réside souvent dans une diégèse mystérieuse poussant le spectateur à accepter l’univers qu’on lui propose autant qu’à s’y projeter avec émerveillement et surprise. Autant Insaisissable 2, à trop vouloir en dire, gâche notre plaisir enfantin de se laisser tromper par l’illusionniste.
Un an après avoir dépouillé le financier Arthur Tressler (Michael Caine que l’on a vu dans Hysteria et Kingsman : Services Secrets), les quatre cavaliers de l’Apocalypse, un groupe de magiciens talentueux sont recontactés par le mystérieux Oeil, une organisation secrète pour mettre un terme aux magouilles de Walter Mabry (Daniel Radcliffe que l’on a vu dans Horns et Docteur Frankenstein), un magnat des nouvelles technologies. Lula (Lizzy Caplan que l’on a vu dans L’interview qui tue !) est la nouvelle recrue du groupe.
Thaddeus Bradley (Morgan Freeman)
Sur le fond, on appréciera le message gentillet mais néanmoins limpide et sans concession à propos des errements éthiques de l’intelligentsia numérique. De la même manière que Letterier l’avait fait avec la finance dans la première partie de la saga, on reprend ici la même recette en surfant sur les indignations du moment. La dichotomie entre Walter Mabry et son alter-ego Owen Case (Ben Lamb que l’on a vu dans Divergente 2 : L’insurrection) est grandement inspirée par celle entre Gates et Jobs. Les produits présentés sont quant à eux totalement décalqués, avec un brin d’ironie, sur le merchandising Apple, vendant au compte goutte les dernières améliorations techniques. Pêle-mêle sont donc dénoncer l’obsolescence outrancière et la marchandisation des données personnelles déguisés en gain de productivité ou en révolution pratique. De nos jours, nous offrons effectivement sciemment une partie de nos données personnels à de grand groupes qui se les échangent et les monnayent, principalement dans un but commercial et lucratif, sans garantie toutefois qu’elle ne puissent être utilisé comme des moyens de coercitions politiques ou de pressions juridiques. Comme l’ont fait avant lui, cela n’a rien d’original, un grand nombre de films d’anticipation, Insaisissable 2 imagine et avertit sur les possibles conséquences de systèmes de moins en moins libres et de plus en plus fliqués, appelant à se méfier du tout venant technologique des grandes firmes,de penser à protéger ses libertés fondamentales, régulièrement mise à mal d’un point de vue éthique.
Merritt McKinney (Woody Harrelson) et Jack Wilder (Dave Franco)
Si l’on oublie ce positionnement facile, que certain avait déjà dans les années 80, et dont les moments que nous vivons ne font que confirmer la lucidité, Insaisissable 2 n’a plus grand-chose à offrir. Du point de vue de la narration, Insaisissable avait su préserver une certaine part de mystère et de non-dits qui pouvait continuer à nous enthousiasmer longtemps après le film. Comme un vraie magicien, le long-métrage nous laissait pantois et rêveur. Si Thaddeus Bradley (Morgan Freeman que l’on a vu dans Transcendance, Ruth & Alex et Lucy) démystifiait une partie des tours, le final apparaissait tard et laisser suffisamment d’inconnu pour être spectaculaire. Mais voilà que l’on s’éternise trop longuement sur le passé de Dylan Rhodes (Mark Ruffalo que l’on a vu dans Avengers : L’ère d’Ultron) et de son père Lionel Shrike (Richard Laing) que les illusions scénaristiques, les rôles de chacun en deviennent transparentes et laisse entrevoir la trame de l’histoire. Certaine posture de l’écriture sont mêmes des cas d’écoles poussifs. Combien de fois avons-nous eu le droit au frère quasiment jumeaux et légèrement débile comme Némésis de pacotille pour scénariste faiblard ? Un nombre incalculable que l’on tente toujours de nous faire oublier en vantant les mérites supposés de l’acteur assumant deux rôles. Alors que l’effet est souvent inverse. En l’occurrence, Woody Harrelson (que l’on a vu dans Hunger Games – L’embrasement, Hunger Games – La révolte (Partie 1) et Hunger Games – La révolte (Partie 2)) est tout à fait à l’aise avec Merrit mais son jeu deviens cabotin et exécrable lorsqu’il incarne Chase. Ce personnage semble tout droit sorti d’un Austin Powers, c’est dire. Le délire légèrement métaphysique autour de l’Oeil est ramené à une confrérie banale de type franc-maçonne alors que cela aurait eu tant de panache de brouiller les pistes entre magie pure et prestidigitation.
Arthur Tressler (Michael Caine)
Insaisissable 2 passe vraiment à côté de l’imaginaire, tenant à tout rendre compréhensible et perd en magie. Jon M . Chu a oublié d’allier magie et imaginaire, ce qui est précisément ce qui avait fait le succès du premier épisode. Loin de nous divertir pleinement, il n’arrive pas à détourner notre attention des ficelles du magicien de l’écran qu’est le metteur en scène.
Boeringer Rémy
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