L’œil de Pulp #40

Alors … De quel film est issu ce screen ?

La réponse ci-dessous …

oeil40

Voyage à Tokyo (1953) / réalisé par Yasujirô Ozu / Avec Chishu Ryu, Chieko Higashiyama, Setsuko Hara

Masae Aida, s’est éteinte le 5 Septembre dernier. Mais il y a bien longtemps que Setsuka Hara avait disparu. Cette étoile du cinéma japonais classique met fin à sa carrière à la mort du réalisateur japonais Yasujiro Ozu, le 12 Décembre 1963, pour qui elle s’était totalement dévouée. Elle reprend alors son identité civile, manière de ranger définitivement son corps cinématographique qui ne lui avait peut-être finalement jamais appartenu. Hasard ou destin, c’est deux jours avant que passait à la Cinémathèque Voyage à Tokyo, et nous y étions. Setsuka Hara y interpréte Noriko, récente veuve qui va alors noués des liens forts avec ses beaux – parents. A cette occasion, revenons sur ce qui fut l’un des plus beaux rôles de sa vie.

Ozu réalise Voyage à Tokyo en 1953, et c’est avec ce film qu’il réussi à pousser les portes de l’Europe près Akira Kurosawa et Kenji Mizogushi déjà eu bien connu par la critique. Cinéaste populaire au Japon, il séduit avec continuité qui harmonise son cinéma, en travaillant presque toujours avec les mêmes acteurs. C’est ainsi que dans Voyage à Tokyo nous retrouvons Chishu Ryu, Chieko Higashiyama et Setsuko Hara. L’histoire est très simple, comme à l’accoutumé chez Ozu : Un couple de personnes âgées rend visite à leurs enfants à Tokyo. D’abord reçus avec les égards qui leur sont dûs, ils deviennent bientôt dérangeants dans leur vie quotidienne. Ce film reste le plus emblématique sur le lien générationel, thème cher au réalisateur, et sur ce que Jacques Lourcelles appelle « un constat lucide, un assèchement du cœur chez les enfants et la résignation des grands parents. » Le film tout entier repose sur l’épure et sur un équilibre qui ne cesse d’être remis en cause par la mort, l’échec des retrouvailles et le drame.

La fin du voyage signifie le retour au village. La mère mourant, rassemble, et occupe l’espace du cadre jusqu’à la quasi fin du film. Chez Ozu, la cellule familiale est aussi importante qu’instable. Les scènes de cérémonies et de repas sont très importantes pour lui, car elles rattachent les personnages à ce petit quelque chose qui empêche l’éclatement de la cellule. Ici, c’est le rituel de la veillée funèbre, que l’on retrouve chez d’autres réalisateurs ( Bergman, Coppola père ). D’une part, Ozu représente la manière dont la famille se retrouve dans une sorte d’artifice de l’équilibre, d’un positionnement harmonieux : la maison familiale, où chacun a une place définie dans le plan, parfaitement équilibrée à l’intérieur du cadre et de l’espace. Tout s’organise autour du décès de la mère. C’est après cet événement qu’un plan retient notre attention.

On y voit Setsuka Hara totalement bouleversée, prise d’un regard de honte. Elle se rend compte que ce n’est pas la mort de son mari qui la hante depuis le début du film, mais c’est l’ennui de son existence, et l’absence de projection d’avenir. « J’attends quelque chose de mon coeur, je suis égoïste. » En une phrase et un plan, la posture morale du cinéma d’Ozu peut être résumé. Il pose un questionnement sur la condition de l’Homme et sa capacité à s’oublier pour atteindre une perfection spirituelle.

Nul ne saurait dire si Setzuko Hara faisait vivre le cinéma d’Ozu ou si Ozu faisait vivre Setzuko Hara. Le réalisateur est toujours resté très évasif quant à sa relation avec l’actrice, seul constat évident, il savait la faire briller à l’écran.

Synopsis:

Un couple de personnes âgées rend visite à leurs enfants à Tokyo. D’abord reçus avec les égards qui leur sont dûs, ils deviennent bientôt dérangeants dans leur vie quotidienne.

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