Le voyage interieur (ou arc dramatique)

Le voyage intérieur est certainement une expression plus poétique pour exprimer l’arc dramatique d’un personnage.
il est incontestable que le personnage principal d’une histoire doit évoluer au cours de celle-ci.

Quelque chose doit changer dans sa personnalité entre le début et la fin. C’est l’intrigue qui se chargera de cette transformation. Elle forcera le protagoniste (généralement) à passer par différentes étapes (ou événements) pour devenir quelqu’un d’autre.
En règle générale, il s’agit pour le héros de devenir meilleur. Ce qui implique qu’il commence l’histoire dans un certain état d’esprit et il l’a finie dans un autre.

Cet autre état suppose qu’il a résolu un problème interne.

Story Values

Si nous considérons cette notion de Story Values de Robert McKee, il s’agit de valeurs opposées telles que l’amour & la haine.
Ces deux valeurs dont on peut constater qu’elles sont de polarité inversée (l’amour est positif  mais la haine est négative) induisent un mouvement, un conflit.

L’arc dramatique d’un personnage se réduit à deux valeurs. Ces valeurs sont en contradiction. C’est au cours de l’histoire que cette polarité s’inverse.
Voici quelques exemples de valeurs que peut suivre un arc dramatique.

De l’obscurité à la lumière

Ou bien du mystère à la vérité, de la nuit au jour. Ce type d’arc dramatique se concentre sur une révélation.
Le personnage découvre quelque chose sur lui-même qui le change profondément.

Cette Story Value Obscurité/Lumière est une des étapes structurelles que John Truby met en avant.
Lire à ce sujet :
JOHN TRUBY : LES 7 ETAPES CLES D’UNE HISTOIRE (1)
JOHN TRUBY : LES 7 ETAPES CLES D’UNE HISTOIRE (2)
JOHN TRUBY : LES 7 ETAPES CLES D’UNE HISTOIRE (3)

De la peur au courage

En fait, il y a deux voyages à considérer. Le voyage extérieur corresponds à l’intrigue. C’est généralement un parcours vers la réussite.
C’est l’histoire visible par tous, personnages et lecteurs.

Et il y a le voyage intérieur. C’est l’histoire d’une complétude, d’une évolution interne de la personnalité du héros.
Michael Hauge définit ce voyage intérieur en expliquant qu’au cours de l’histoire, le héros passe de la peur au courage, c’est-à-dire d’être défini ou déterminé par les autres à se définir ou se déterminer par lui-même.

C’est la définition d’un héros. Un héros grandit de l’intérieur. Il devient plus fort, plus sage, plus héroïque.
Lire à ce sujet :
HAUGE : LES ARCS DRAMATIQUES DES CONFLITS INTERIEURS

Lorsqu’il commence à construire son personnage, l’auteur doit lui donner un désir profondément ressenti, une aspiration véritable. Mais le personnage manque de conviction. Il n’a pas le courage d’aller jusqu’au bout de son désir.
Parce que cela l’effraie.

Pour Hauge, cette peur provient d’une blessure dont le personnage souffre encore même s’il ne l’admet pas. Il est important de bien statuer sur la cause de cette souffrance. C’est souvent dans l’enfance du personnage que l’on trouve la source de cette souffrance prolongée.

Se protéger

De cette blessure, le personnage cherche à se protéger. C’est ainsi que se construit une persona, c’est-à-dire un masque que l’on oppose au monde.

Le personnage ne peut dévoiler qui il est vraiment. Il ne peut se confier. il dit Voilà qui je suis mais c’est un mensonge.

Il apparaît alors les problèmes d’identité.
Parce que le personnage revêt une armure qui le protège d’éprouver de nouveau de la souffrance ou de subir une nouvelle blessure.
A lire et à voir :
. PERSONNAGE & BLESSURE PSYCHOLOGIQUE
. PASSION & BLESSURES FONDAMENTALES

Donc l’armure protège mais ne permets pas au personnage d’être vraiment ce qu’il est. Le voyage intérieur est un processus qui se conclut par un choix entre la protection et le risque.

Et ce parcours personnel, intime est entrelacé avec le parcours extérieur.

Un parcours en six étapes

Pour Michael Hauge, ce passage de la peur au courage s’analyse ainsi (en particulier pour la romance) :

  1. Le personnage principal nous est introduit sous sa persona, sous une fausse identité en quelque sorte.
  2. Il découvre ce qu’est sa vraie nature et ce que sa vie pourrait être s’il vivait selon cette essence qui est vraiment lui.
    A lire :
    DAVID TROTTIER : LES 10 CLEFS D’UN PERSONNAGE (1)
    DAVID TROTTIER : LES 10 CLEFS D’UN PERSONNAGE (2)
  3. Depuis la seconde étape, il tend vers cette essence. Mais il n’a pas encore basculé. Il n’est pas complètement engagé dans cette transformation. Il hésite encore. Sa persona est encore forte.
  4. Il s’est maintenant débarrassé de son masque social. Il est lui-même mais est effrayé.
    Parce que s’assumer tel que l’on est est encore un combat. Laisser tomber le masque et laisser les autres voir profondément en vous est intimidant et effrayant.
  5. Dans le cadre d’une romance, les deux amants se séparent. Pour le héros, c’est la crise la plus grave qu’il ait connue depuis le début de l’histoire.
    Cette étape connue comme le All is lost fait très souvent partie de la structure d’une histoire quel qu’en soit le genre.
    Le monde extérieur s’est réintroduit dans la vie du héros. Ce dernier essaie de retrouver sa persona mais cela ne fonctionne plus. L’amant réalise soudain qu’il n’est plus rien sans l’autre.
  6. Il a maintenant totalement intégré sa vraie nature. Son parcours est complété. Il a atteint à une sorte de plénitude de son être. Il a vaincu ses peurs dans un acte de courage dont il ne se sentait pas capable. Dorénavant, il n’est plus soumis  à ses peurs et affronte la vie avec le courage nécessaire.