Un grand merci à M6 Vidéo pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Nos souvenirs » de Gus Van Sant.
« Je ne veux pas mourir, je ne veux simplement plus vivre »
Alors qu’il semble décidé à mettre fin à ses jours dans la forêt d’Aokigahara, au pied du Mont Fuji, Arthur Brennan se remémore les moments les plus marquants de sa vie de couple : sa rencontre avec sa femme Joan, leur amour, mais aussi l’usure de leur couple et leur éloignement progressif. Paradoxalement, une épreuve dramatique va leur ouvrir les yeux, renforcer leurs sentiments et les réunir à nouveau. Alors qu’il revit ses souvenirs de couple, Arthur réalise comme cette passion a marqué sa vie...
« Si Dieu ne vous attend pas de l’autre côté, alors qui vous y attend ? »
Gus Van Sant rencontre le cinéma au début des années 70, à la fin de ses études de design. Il passe ainsi toute une décennie à réaliser des court-métrages dans le plus grand anonymat. Il faut attendre 1985 et son premier long, « Mala noche », pour que le réalisateur se fasse remarquer par la critique. Ce film marquera le début d’une carrière prolifique (une quinzaine de films en trente ans), alternant films indépendants et films de studios plus « commerciaux » (« A la rencontre de Forrester », « Harvey Milk », « Will Hunting »). Des films souvent hantés par une certaine idée de la mort, thématique qui revient souvent dans la filmographie du cinéaste (« My own private Idaho », « Elephant », « Last days », « Restless »…). Après plusieurs films à portée plus politique (« Harvey Milk », « Promised land »), il nous revient avec « Nos souvenirs », un drame écrit par le scénariste Chris Sparling, qui fut un temps considéré comme l’un des scénarios non-produits les plus prometteurs. A noter que « Nos souvenirs » a été présenté en compétition au Festival de Cannes 2015en sélection officielle.
« Chez nous, on dit qu’une fleur pousse toujours à l’endroit même où une âme est passée de l’autre côté »
La balade japonaise à laquelle nous convie Gus Van Sant n’a rien d’une promenade de santé. En effet, la forêt d’Aokigahara, célèbre repère de suicidaires jonchés de cadavres et d’objets abandonnés, apparait d’entrée comme étant particulièrement inhospitalière et anxiogène. Un lieu macabre où la mort plane comme une ombre oppressante. C’est d’ailleurs l’objet du voyage d’Arthur, veuf américain inconsolable, venu se donner la mort en ces lieux tristement réputés. Mais très vite, l’apparition inattendue d’un deuxième malheureux bien mal en point et demandant de l’aide va faire glisser le récit du thriller funèbre au conte initiatique et spirituel. A grands coups de flashbacks, le film procède alors à un examen de conscience autant qu’à une radioscopie d’un couple en crise que seule l’épreuve d’une maladie parviendra à ressouder,mais trop tard. Dès lors, le film se concentre sur le cheminement introspectif du héros et sur sa quête de rédemption. Une quête à laquelle le cinéaste donne une dimension quasi mystique, la forêt prenant alors des allures de purgatoire dans laquelle l’âme perdue du héros devra affronter ses propres démons et ses propres interrogations sur le poids du péché (peut-on vivre avec la culpabilité d’avoir mal-aimé ?) et du pardon. Malheureusement, Gus Van Sant, pourtant habitué des sujets morbides, n’arrive jamais à donner ici suffisamment de hauteur à son récit qui finit par tomber dans le piège du mélo un peu facile et surtout trop lacrymal. Dommage donc, car compte-tenu de l’originalité de son sujet et de la qualité de ses interprètes, il avait là matière à faire un film sans aucun doute plus marquant et plus émouvant.
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