Avec : Adan Jodorowsky, Brontis Jodorowsky, Alejandro Jodorowsky, Pamela Flores et Jeremias Herskovits
Sortie : 5 octobre 2016
Durée : 2h08min
Distributeur : Le Pacte
3D : Oui – Non
Synopsis :
Dans l’effervescence de la capitale chilienne Santiago, pendant les années 1940 et 50, « Alejandrito » Jodorowsky, âgé d’une vingtaine d’années, décide de devenir poète contre la volonté de sa famille. Il est introduit dans le cœur de la bohème artistique et intellectuelle de l’époque et y rencontre Enrique Lihn, Stella Diaz, Nicanor Parra et tant d’autres jeunes poètes prometteurs et anonymes qui deviendront les maîtres de la littérature moderne de l’Amérique Latine. Immergé dans cet univers d’expérimentation poétique, il vit à leurs côtés comme peu avant eux avaient osé le faire : sensuellement, authentiquement, follement.
5/5
Il est sans conteste l’un des meilleurs réalisateurs que le monde ait jamais connu. Âgé de 87 ans, Alejandro Jodorowsky est un cinéaste franco-chilien auteur de nombreux succès tels que La Montagne Sacrée (1973), Le Voleur d’Arc-en-ciel (1990) ou encore la La Danza de la realidad (2013). Mais Alejandro Jodorowsky n’est pas qu’un simple cinéaste. Il est bien plus que cela et c’est un véritable personnage symbolique. Également scénariste de bande-dessinée, Alejandro est passé par les essais, les fables, le théâtre, le mime, le tarot, la poésie, la dramaturgie, mais a aussi été animateur du « Cabaret Mystique ».
MAIS QUEL EST LE SENS DE LA VIE ?
Poesía Sin Fin est un mélange de tout cela. Une véritable bible cinématographique répertoriant divers arts et diverses orientations sexuelles dans une des plus belles œuvres qu’on ait vues. C’est également et avant tout un film familial et autobiographique, surplombé d’un fantastique lyrique et poétique. Poesía Sin Fin est une sorte de suite à son précédent film La Danza de la realidad ; les deux ne forment qu’une unité. En faisant Poesía Sin Fin, Alejandro Jodorowsky cherchait la finalité de l’Art et le sens de la vie. Pour lui, le film sert à se guérir lui-même dans un premier temps, puis dans un second sa famille, et pour conclure le public.
Mais pourquoi Alejandro cherche-t-il à se guérir avec Poesía Sin Fin ? Et bien car celui-ci a voulu raconter sa vie d’enfant et d’adolescent dans les véritables lieux dans lesquels il avait grandi, c’est-à-dire à Santiago du Chili, lieu dans lequel il n’était pas revenu depuis 60 ans. Alejandro a voulu faire ce film comme une espèce de « nettoyage ». Il narre son histoire lui-même à l’écran aux côtés de son fils, Adan Jodorowsky, qui interprète son propre père adolescent. Son autre fils, Brontis Jodorowsky, joue le rôle de son propre grand-père, et donc par intermédiaire, le père de Jodorowsky. Alejandro a donc osé « se battre » contre son propre père – qu’il n’a jamais revu après son départ du Chili – et a donné l’opportunité à ses fils de faire la même chose, eux qu’ils n’ont jamais connu leur grand-père.
Le film d’Alejandro est tellement personnel et bouleversant qu’il n’a pas fait appel à Hollywood et ses millions pour le financer. C’est grâce au crowdfunding de Kickstarter et de Indiegogo ainsi qu’aux 500 000 dollars restants des économies du cinéaste, qui s’ajoutent aux 500 000 autres dollars du producteur Moises Cosio, que Poesía Sin Fin a vu le jour.
L’ART DANS LE CINÉMA PAR JODOROWSKY
Chaque art est représenté dans Poesía Sin Fin. On retrouve le théâtre par le biais des Kuroko (machinistes vêtus de noir issus du théâtre japonais traditionnel) qui déplacent dans le vide des éléments de décors dans diverses scènes du film, le tout habillés comme des ninjas. Alejandro utilise également de grands panneaux de bois en noir et blanc pour dévoiler la réalité comme elle l’était. Comme il le dit lui-même, il veut rappeler qu’il nous montre un film. La danse de ballet est également présente dans le film, tout comme la sculpture, la poésie, le chant (par le biais de sa mère et de sa muse qui ne forment qu’une entité), la peinture contemporaine, le marionnettiste et même le tarot. Ses personnages dont il s’entoure et dans lesquels il se retranscrit sont l’égal de chaque art, et chacun a des attirances sexuelles différentes. Ainsi, hétérosexuels, homosexuels, transsexuels ou encore nains se partagent la mise en scène réaliste de la vie et non superficielle d’Hollywood. Il provoque même, avec une scène de sexe entre lui (Adan Jodorowski) et une naine ayant ses menstruations.
Alejandro nous raconte de façon poétique l’enfance difficile qu’il a eu avec son père et sa passion pour la poésie. Ne voulant pas devenir médecin, il quitta donc le toit de sa famille pour vivre auprès d’artistes. Dans son film, il représente sa mère d’une façon lyrique et place la musique dans un chant de sa vie. Il dévoile à l’écran des moments de grandes peines et d’autres moments de bonheur qu’il a vécu avec ses amis. Ayant tout abandonné pour venir en France, notre vie par rapport à celle de ce grand monsieur est bien trop belle et la force psychologique qu’il a eu de voir la vie sous un angle aussi artistique est l’une des plus belles choses qu’un être humain puisse faire pour lui-même.
Sans être pudique, Alejandro nous offre également – toujours sous forme artistique – sa première relation sexuelle avec sa première compagne. Magistralement, il vit avec d’autres poètes et d’autres artistes avec lesquels il se libère mentalement, sensuellement et avec une authenticité convaincante.
Alejandro Jodorowsky retranscrit l’art sous toute ses formes dans Poesía Sin Fin. Un chef d’oeuvre cinématographique.