[CRITIQUE] – Cézanne et moi (2016)

Par Pulpmovies @Pulpmovies

Réalisé par : Danièle Thompson

Avec : Guillaume Canet, Guillaume Gallienne, Alice Pol et Déborah François

Durée : 1h54min

Distributeur : Pathé Distribution

Synopsis :

Ils s’aimaient comme on aime à treize ans : révoltes, curiosité, espoirs, doutes, filles, rêves de gloires, ils partageaient tout. Paul est riche. Émile est pauvre. Ils quittent Aix, « montent » à Paris, pénètrent dans l’intimité de ceux de Montmartre et des Batignolles. Tous hantent les mêmes lieux, dorment avec les mêmes femmes, crachent sur les bourgeois qui le leur rendent bien, se baignent nus, crèvent de faim puis mangent trop, boivent de l’absinthe, dessinent le jour des modèles qu’ils caressent la nuit, font trente heures de train pour un coucher de soleil… Aujourd’hui Paul est peintre. Émile est écrivain. La gloire est passée sans regarder Paul. Émile lui a tout : la renommée, l’argent, une femme parfaite que Paul a aimé avant lui. Ils se jugent, s’admirent, s’affrontent. Ils se perdent, se retrouvent, comme un couple qui n’arrive pas à cesser de s’aimer.

1/5

Cézanne et moi est fraîchement annoncé parmi les films pré-sélectionnés pour représenter la France aux prochains Oscars. Aux côtés de Frantz de François OzonElle de Paul Verhoeven et Les Innocentes d’Anne Fontaine. Oui, vraiment. À croire que la commission chargée de ce choix mise complètement sur le capital culturel français et la stature qu’ont Émile Zola et Paul Cézanne à travers le monde. Les deux hommes (ou ce qu’il en reste) doivent plutôt se retourner dans leur tombe (ou ce qu’il en reste aussi) à l’heure qu’il est, s’ils voyaient à quel point leur histoire est devenue caricaturale et… ridicule.

BIENVENUE AU FESTIVAL DE LA PERRUQUE !

Il n’y a qu’à voir nos deux Guillaume, Canet et Gallienne, complètement en galère sous leurs grosses barbichettes et leurs tonnes de maquillage pour se rendre compte que quelque chose ne va pas. Mais quand Gallienne ouvre la bouche, c’est encore pire : après l’incroyable performance de Benoit Magimel dans Marseille, on tient la seconde interprétation de l’accent du Sud la plus caricaturale de l’année. Finalement, rien ne va dans Cézanne et moi, qui nous donne l’impression d’assister à une vaste engueulade de près de deux heures pendant lesquelles les deux acteurs jouent à qui criera le plus fort sur l’autre, ratatinant cette amitié en rivalité. Gallienne joue un Cézanne bipolaire au possible, qui un jour soutiendra le succès de son ami Émile, et le lendemain enverra tout valser autour de lui, prétextant que celui-ci est un profiteur, et lui, un raté.

On aurait presque l’impression d’assister à du théâtre filmé, tant les procédés du genre s’immiscent dans l’intrigue : Cézanne, sur le perron de la demeure de Zola, entend ses amis le critiquer depuis la salle à manger. Cet usage du hors-champ, du personnage « caché » mais qui sait tout de même tout, aurait très bien pu passer s’il n’avait pas déjà utilisé auparavant. La chronologie du film n’arrange rien, utilisant une énième dispute comme toile de fond d’une intrigue dont les autres épisodes sont hachés jusqu’à la moelle. Un peu comme la présence de Renoir, Manet ou Maupassant, qui apparaissent là comme quelques cheveux dans une soupe qui a définitivement du mal à chauffer…

Il vaudrait mieux ne pas envoyer Cézanne et moi aux Oscars, sous peine de nous inventer une catégorie spéciale aux prochains Razzie Awards : acteurs en roue-libre, vies romancées et caricaturées… pas de quoi rendre honneur à Cézanne et Zola !