Un vieil homme aigri reprenant goût à la vie par l’irruption de sa petite fille dans sa vie rangée, voilà le synopsis banal d’Ainsi va la vie, dernier film de Rob Reiner, sorti le 14 septembre 2016. S’écartant toutefois des comédies bravaches habituelles, et porté par le tandem Douglas/Keaton, le long-métrage possède un charme jazzy indéniable et a réussi à nous toucher en proposant une version feutrée de ce scénario éculé.
Oren Little (Michael Douglas que l’on a vu dans Ant-Man), agent immobilier à la retraite, tente son dernier coup en vendant sa luxueuse demeure. Il compte s’intaller dans le Vermont pour passer sa retraite au vert. C’est alors que son fils Luke (Scott Shepherd III), condamné à neuf mois de prison, lui ramène sa petit-fille Sarah (Sterling Jerins que l’on a vu dans Ruth & Alex) dont il ignorait jusqu’ici l’existence. Avec l’aide sa voisine Leah (Diane Keaton, également vue dans Ruth & Alex), il s’en occupe à contre-cœur.
Luke (Scott Sheperd III) et Sarah (Sterling Jerins)
Dans une petite bourgade, semblable à tant de banlieue bourgeoise américaine, Oren Little est propriétaire d’une copropriété qu’il a nommé « Petit paradis terrestre ». En transition, attendant de vendre sa maison de famille, avant de prendre le large, il règne en petit dictateur sur ces locataires. Exécrable, il n’essaie jamais de vivre en bon voisinage. Puisqu’il est propriétaire, il n’a que cure des soucis de ses voisins. C’est son seul letimotiv. Michael Douglas, vieillissant, est parfait dans ce rôle de vieux bougre renfrogné dont toutes les répliques sont cinglantes. Dans l’appartement adjacent vit Leah, sensiblement le même âge, qui s’épanouit en chantant dans des clubs de Jazz. Ainsi va la vie laisse d’ailleurs une belle part à la musique dans le scénario et instaure une musicalité harmonieuse. Tandis que les chansons chantées au club ne sont jamais coupées et que l’on peut profiter de la voix agréable et suave de Keaton qui assure elle-même le show, on perçoit le même amour du jazz chez Oren qui écoute des standards de Sammy Davis Junior dans sa vieille voiture de collection. Cette sensibilité à fleur de peau, malgré l’attitude réservé de Leah et le comportement désinvolte d’Oren effleure dès les premiers instants de la narration. Avant que de nous être désagréable, Oren nous semble surtout très triste et l’on devine chez les deux êtres des fêlures destinés à être partager et adoucit. C’est un catalyseur, une résurgence de leurs jeunesses, un élixir de jeunesse qu’il leur faut.
Oren Little (Michael Douglas)
Et il apparaît en la personne de Sarah, charmante gamine déstabilisée par la situation de son père, accusé et condamné à tort à une courte peine de prison et se retrouvant chez un grand-père qu’elle n’a jamais vu. Petit à petit, la petite fille va libérer la parole entre les deux septuagénaires obligés de se parler. Maladroits, ils sont tous les deux veufs et doivent réapprendre à aimer, si tant est que l’on puisse apprendre ces choses-là. Follement amoureux de leurs compagnons décédés, il vont faire leur deuil ensemble et envisager l’avenir. L’originalité d’Ainsi va la vie est certainement à chercher de ce côté, l’intervention de la petite fille, très aimée par son père, ne vas pas juste dérider les deux vieillards mais carrément être le révélateur d’une volonté de cesser de vivoter pour profiter de la vie jusqu’au bout. On est jamais dans la comédie, malgré que l’idée si prête, et c’est tant mieux, car celles qui existent sont souvent potaches. Ainsi va la vie est plutôt une ode sensible à la tendresse. On prend plaisir à voir les quatre protagonistes principaux, jamais méchants, plutôt bouleversés par la vie, reprendre des repères entre les bras des autres, se donner du courage et s’entraider sans rien attendre en retour que la caresse d’un sourire réconfortant, faire la paix avec les autres et surtout, avec eux-mêmes.
Leah (Diane Keaton)
Ainsi va la vie distille un parfum de Dolce Vita grâce à des personnages toujours touchants. Une petite pause de douceur, ma foi, fort agréable, et parfois même presque poétique, débordante de joie.
Boeringer Rémy
Retrouvez ici la bande-annonce :