Le studio Laika nous émerveille une fois de plus avec leur meilleur film à ce jour.
Après Coraline, L’Etrange pouvoir de Norman et Les Boxtrolls, les petits génies du studio Laika sont de retour avec leur dernier bijou : Kubo et l’armure magique, probablement leur film le plus ambitieux et mature à ce jour. Si les précédentes créations de Laika en ont fait, à juste titre, l’un des studios d’animation les plus inventifs et importants du moment, ce nouveau film marque clairement une nouvelle étape dans sa jeune carrière, tant d’un point de vue thématique que purement technique.
Travaillant l’art du stop-motion, à savoir des marionnettes photographiées image par image, le studio s’est en effet imposé au fil des films comme une référence incontournable dans le domaine de l’animation en volume. Utilisant une nouvelle fois un alliage complexe de stop-motion et de 3D, Kubo et l’armure magique aura nécessité quatre ans de travail pour voir le jour. Un travail fastidieux, d’autant plus que certains personnages ont réellement été conçus en origamis, exactement comme ceux qu’utilise le jeune héros du film pour conter ses histoires, leur donnant vie grâce au pouvoir de son Shamisen (instrument à cordes). « Ne clignez pas des yeux », annonce la voix-off dès les premières secondes. En effet, difficile de cligner tant le résultat est d’une splendeur visuelle incomparable, riche de mille détails tant dans les décors, variés et colorés, que dans le soin apporté à tous les personnages qui peuplent ce monde féerique. En effet, le travail minutieux effectué sur les visages des personnages se révèle absolument bluffant de réalisme, dotant ainsi ces petites figurines d’une palette d’émotions impressionnante. La direction artistique quant à elle, est tout simplement somptueuse, plongeant le spectateur dans un univers enchanteur aux accents de mythologies asiatiques. Si l’histoire se déroule dans un univers fantasmé, celui-ci évoque clairement le japon féodal et les légendes qui en découlent, dotant ainsi le film d’une imagerie éclatante et rafraichissante. Ceci n’en reste pas au simple stade d’hommage ou du parti-pris esthétique, mas imprègne littéralement l’ADN du film puisque tout le récit de Kubo et l’armure magique est bercé de philosophie orientale.
Pour revenir plus précisément au récit, le film relate l’histoire de Kubo, jeune conteur de rue borgne s’occupant de sa mère très affaiblie. En ne suivant pas les mises en garde de cette dernière, le jeune héros va réveiller malgré lui des forces maléfiques que seule l’armure de son père défunt peut vaincre. Accompagné d’un singe taciturne et d’un scarabée-samouraï amnésique, Kubo se lance dans une aventure périlleuse pour retrouver l’armure magique. Le film s’inscrit donc dans les codes classiques du récit initiatique, déroulant efficacement ses enjeux mythologiques à la Joseph Campbell sans véritable prise de risque dans leur exécution. Si l’on peut reprocher quelque chose au film de Travis Knight, ce serait en effet l’aspect plutôt archétypal de certains enjeux ou caractérisations, dont le léger manque d’audace par instants peut donner une impression schématique.
Malgré tout, le scénario reste cohérent avec le cœur du film, puisque le jeune héros va littéralement vivre une histoire similaire à celle qu’il conte lors de ses spectacles de rue. Une récit mythologique et universel directement hérité de la tradition des histoires orales. La transmission des histoires comme vecteur de sens afin de mieux comprendre le monde et soi-même est une idée centrale dans Kubo et l’armure magique, dont la sincérité du propos a réellement de quoi bouleverser. Le film se différencie aussi du tout-venant de la production actuelle par une profonde spiritualité et la noirceur de certaines thématiques, dont les réflexions sur la mémoire, la réincarnation et l’héritage emprunte davantage aux philosophies orientales qu’aux morales judéo-chrétiennes souvent présentes dans le cinéma d’animation américain. Rassurez-vous, Kubo et l’armure magique n’en oublie pas pour autant d’être un divertissement haut de gamme, à la fois touchant, spectaculaire et somptueusement mis en scène, dont la beauté foudroyante n’a d’égale que la passion de ceux qui l’ont conçu. Un véritable enchantement.
Réalisé par Travis Knight avec les voix originales de Art Parkinson, Charlize Theron, Matthew McConaughey…
Sortie le 21 septembre 2016.