[CRITIQUE] – Don’t Breathe : La Maison des Ténèbres (2016)

Par Pulpmovies @Pulpmovies

Réalisé par : Fede Alvarez

Avec : Stephen Lang, Jane Levy, Dylan Minnette

Sortie le : 5 octobre 2016

Durée : 1h28

Distributeur : Sony Pictures Releasing France

Synopsis : 

Interdit aux moins de 16 ans

Pour échapper à la violence de sa mère et sauver sa jeune sœur d’une existence sans avenir, Rocky est prête à tout. Avec ses amis Alex et Money, elle a déjà commis quelques cambriolages, mais rien qui leur rapporte assez pour enfin quitter Détroit. Lorsque le trio entend parler d’un aveugle qui vit en solitaire et garde chez lui une petite fortune, ils préparent ce qu’ils pensent être leur ultime coup. Mais leur victime va se révéler bien plus effrayante, et surtout bien plus dangereuse que ce à quoi ils s’attendaient…

4.5/5

Repoussé à plusieurs reprises, son titre original (In The Dark) faisant probablement trop écho au piteux Dans le noir sorti fin août, Don’t Breathe – La Maison des Ténèbres débarque enfin dans les salles françaises. Le second long métrage de Fede Alvarez (après son très remarqué remake d’Evil Dead, qui a sûrement motivé le retour de Bruce Campbell dans une série Starz) est accompagné d’une campagne marketing folle : sur l’affiche, impossible de ne pas passer à côté d’une critique affirmant qu’il s’agit du « meilleur film d’horreur américain des 20 dernières années ». On a à peine la pression, du coup. Pour simplifier sa distribution, le film se voit également marqué d’une interdiction en salles aux moins de seize ans : surprise, les cinémas UGC se permettent donc cette fois de distribuer le film. D’accord, ils ont aussi distribué Blair Witch, mais personne n’est passé à côté de la petite polémique autour de Conjuring 2 et Dans le noir cet été…

Bref, Fede Alvarez revient. C’est le plus important. Encore une fois, le réalisateur s’entoure de jeunes acteurs et retrouve notamment Jane Levy, qui était déjà l’héroïne de son remake d’Evil Dead. L’actrice est accompagnée de Dylan Minnette (oui, on vous a vu tenter d’étouffer un petit rire), déjà aperçu dans Chair de poule et Daniel Zovatto (passé dans Fear The Walking Dead). Les trois bougres se retrouvent face à Stephen Lang : vous savez, le méchant militaire américain bien caricatural d’Avatar ! Là, il a morflé, devenu aveugle suite à une opération de combat. Nos héros pensaient réaliser un braquage sans problème, mais leur cible est loin d’être si innocente et faible qu’on ne le croit…

LA CASA MUDA

Sur le fond, Don’t Breathe fait dans le classique : un casse qui tourne mal, en huis clos dans une maison verrouillée d’absolument partout, et un hôte plus inquiétant qu’autre chose… Et pourtant Fede Alvarez réussit le pari de nous entraîner dans un film au suspense haletant, qui joue vivement avec les nerfs de son spectateur, mais aussi et surtout avec ses sens. L’audace visuelle du réalisateur est une fois encore surprenante, rien qu’avec ce plan séquence à travers la maison du militaire, où la caméra passe de pièce en pièce au milieu du trio de cambrioleurs et met en avant les objets clés de l’intrigue, qui sont aussi les objets fétiches du militaire. L’un des autres grands moments du film est cette scène tournée dans le noir complet, pendant laquelle le suspense est insoutenable, et où la menace et la perversité du personnage de Stephen Lang est à son paroxysme. À défaut d’utiliser une image nocturne verte qui nous arracherait les yeux, Alvarez et son directeur photo, Pedro Luque (qui avait déjà travaillé sur The Silent House) nous plongent tout autant dans la peur et l’obscurité. Don’t Breathe est un véritable régal esthétique, aussi bien dans son aspect visuel que sonore (Alvarez retrouve Roque Baños après Evil Dead), tant les deux domaines influent sur le déroulement de l’intrigue.

Alvarez a également ce talent d’enchaîner les retournements de situation, jusqu’à rendre son spectateur complètement fou : tout cela grâce à la résistance folle de cet aveugle, incarné par un Stephen Lang surprenant. Don’t Breathe a d’ailleurs le mérite d’enfin être un film de genre qui ne dévoile pas toutes ses surprises ou tous ses moments flippants dans sa bande-annonce ! Malgré le huis-clos, la tension permanente et la durée considérablement réduite de son intrigue, le réalisateur et son co-scénariste Rodolfo Sayages trouvent le moyen de développer suffisamment leurs personnages, leurs intentions, mais construisent surtout toute la complexité du personnage de l’aveugle, qui d’une scène à l’autre pourra aussi bien susciter la pitié que le dégoût. Une fois encore, Alvarez offre à Jane Levy un rôle fort dans cette course perpétuelle pour la survie. Vive les leads féminins !

Don’t Breathe, film d’horreur ? Contrairement à Evil Dead où l’esprit de la saga exige du gore à outrance et un ton absurde permanent, ce film est beaucoup moins extravagant. La violence et la perversité sont inouïes, mais sous une toute autre forme, bien plus réaliste et viscérale. Une fois la colère de l’aveugle suscitée, la chasse à l’homme commence et ne laisse strictement aucun répit jusqu’à la toute fin du film. Là où certains films ne misent que sur un cahier des charges fixe, avec quelques jump-scares, aucune audace visuelle et un scénario à peine effleuré (pour que d’autres volets se fassent et rapportent un max) Don’t Breathe est une véritable réappropration de codes pourtant vus, revus, et casse-gueules. Malgré tout, le résultat est prenant. Et pour ça, on espère que Fede Alvarez reviendra nous terrifier très vite. Avec Sam Raimi le prenant sous son aile, on ne se fait aucun souci pour lui…

Fede Alvarez sait faire peur et ne s’en cache pas. Et c’est tant mieux. Don’t Breathe est une expérience saisissante et traumatisante comme peu de films de genre parviennent à l’être aujourd’hui. Bravo !