Avec Eva Green, Asa Butterfield, Samuel L. Jackson
Chronique : Assiste-t-on au retour du grand Tim Burton, porté disparu depuis plus de dix ans ?
Miss Peregrine possède indéniablement les ingrédients du meilleur de la filmographie du réalisateur, un mélange de joyeuse morbidité et d’humour lugubre, où les freaks trimballent un grand sourire et une touchante mélancolie, entre exubérance et émotion pure.
Des enfants aux dons particuliers protégés par un personnage aux allures gothiques dans la grande tradition Burtonienne, le poids de la transmission entre les générations, la promesse d’une intrigue maline basée sur les boucles temporelles, tout dans Miss Peregrine vise à valider le come-back de Tim Burton. On se met même à rêver qu’il retrouve l’équilibre parfait qu’il avait atteint avec Big Fish.
Malheureusement, on en est très loin. Non que Miss Peregrine soit un mauvais film. C’est un honnête divertissement, mais qui ne dépasse pas le stade du film d’aventure pour enfants, assez conventionnel. Une sorte d’Harry Potter qui se serait planté dans la création du monde imaginaire qu’il veut présenter et dénué d’émotion.
La mise en scène est travaillée, mais terriblement impersonnelle, plombée par une longue introduction très bavarde et un final assez pauvre et attendu, aux effets spéciaux dans l’ensemble ratés.
Le film ne s’élève finalement que pendant une trentaine de minutes lorsque Jacob découvre la Maison de Miss Peregrine. On retrouve même l’esprit de Burton furtivement pendant deux petites minutes lorsque deux sinistres poupées recomposées prennent vie pour s’affronter. Comme un clin d’œil que le réalisateur lancerait à son œuvre passée…
Si le scénario est en lui-même poussif, c’est surtout dans le traitement des personnages et de l’imaginaire construit autour d’eux que Burton échoue. Ils ne sont que des concepts, de vagues réminiscences des superbes marginaux ayant illuminé le filmographie de Burton. La monstruosité n’est plus le thème central mais un prétexte pour produire un film d’aventure lambda, une sorte de sous-Xmen avec des enfants. Autant dire que la dimension psychologique de chacun est rapidement évacuée, alors qu’on tenait là un formidable terreau pour évoquer le poids de la différence et le besoin de l’affirmation de soi. Bienveillante sorcière chargée de protéger les enfants, Miss Peregrine est particulièrement sous-exploitée. Incarnée par la sombre et fascinante Eva Green, elle aurait mérité de gagner en profondeur et en complexité pour dépasser l’image glacée et sans relief renvoyée par le film. Cela ressemble à un beau gâchis.
Et ne parlons pas du vilain ridicule incarné par un Samuel L. Jackson au summum du cabotinage, totalement hors-sujet.
Il faut s’y faire Tim Burton est maintenant un Yes Man. Un bon exécutant de studio qui a en plus l’avantage d’être capable de fédérer sur son nom. Mais dont la singularité et l’univers si personnel semblent s’être estompé avec les années (et les dollars accumulés.)
Synopsis : À la mort de son grand-père, Jacob découvre les indices et l’existence d’un monde mystérieux qui le mène dans un lieu magique : la Maison de Miss Peregrine pour Enfants Particuliers. Mais le mystère et le danger s’amplifient quand il apprend à connaître les résidents, leurs étranges pouvoirs … et leurs puissants ennemis. Finalement, Jacob découvre que seule sa propre « particularité » peut sauver ses nouveaux amis.