Sortie le 19 octobre 2016 Réalisation : Juho Kuosmanen Durée : 1h32
Avec : Jarkko Lahti, Oona Airola, Eero Milonoff...
Production : Aamu Filmcompagny, One Two Films, Tre Vänner Produktion AB
Distribution : Les Films du Losange
Le boulanger de Kokkola dans tous ses états
Olli Mäki: une ode à la sainte nourriture japonaise ? Phonétiquement oui (excusez notre humour douteux, mais on ne pouvait décemment pas passer à côté), mais dans les faits non. Avec son titre aguicheur et une affiche fort séduisante, le lauréat finlandais du prix Un Certain Regard cru 2016 avait bien des raisons de nous attirer dans une petite salle de cinéma...
En 1962, Olli Mäki, boulanger de métier et boxeur par passion, se retrouve dans une drôle de situation. Alors qu'il s'apprête à jabber son rêve en disputant le titre de champion de monde poids plume, celui qu'on appelle le boulanger de Kokkola tombe éperdument amoureux. Ce qui n'est que félicité et joie pour le commun des mortels s'avère être un terrible malheur pour les boxeurs. Concentration et perte de poids sont mises à mal et la préparation au grand combat se voit totalement chamboulé par les chabadabas qui résonnent dans le cœur de notre puncher...
L'art de nuancer version viking
Pour son premier long métrage, le finlandais Juho Kuosmanen a choisit de faire de la dentelle brute de décoffrage. Inspiré par l'histoire vrai d'Olli Mäki, le réalisateur axe son film sur l'humanité du personnage et le pourquoi du comment d'un échec qui finalement n'en n'est pas un. S'appuyant sur les contrastes de la situation qui fut réellement celle-ci (amour/combat, privé/public,...), le réalisateur fait de ce biopic dramatico-sportif un objet aussi doux dans le message que brutal dans la forme. Ne laissant pas au spectateur le loisir de s'abîmer dans des présentations en bonne et due forme, la séquence d'ouverture, et tout ce qu'il s'en suit, vient cogner chaque scène contre l'écran magnifié par un bon vieux noir et blanc. Les thèmes principaux de l'amour et de la boxe se révèlent aussi progressivement qu'abruptement et sont traités par un jeu de champs-hors-champs permanent, laissant perplexe et rêveur. Le sentiment et le devoir se battent et savent rester présent à chaque moment dans la tête du boxeur, que l'on emprunte pendant plus d'une heure.
Malheureusement pour vous ce n'est ni la dextérité du jeu de jambes, ni la perte de kilos en trop dont vous hériterez mais bien des yeux de ce boulanger. Le récit n'est présenté que de ce point de vue et le spectateur reste aussi froid qu'Olli face à la rencontre historique dont il est le protagoniste principal. Du regard vide lancé aux journalistes en passant par des bafouillages et des rafales de coups de poings désintéressés, le futur poids plume n'a d'yeux que pour son amour et observe ce qui l'entoure avec placidité. Kuosmanen nous raconte l'histoire de ce que l'on pourrait appeler un anti-héros, mais il s'agit surtout d'un être humain en proie au plus grand des désarrois : l'amour.
C'est avec beaucoup de tendresse et de pudeur que cette chronique d'un échec annoncé parle de son personnage et de son sujet. Rien n'est jamais vraiment formulé, seul les sourires et les regards expriment les sentiments dans ce monde en noir et blanc. Multipliant les séquences où les petits ratés plus ou moins quotidiens s'enchaînent, le réalisateur montre encore une fois que ce qui l'intéresse c'est tout simplement la vie et l'humain, car après tout ils sont ce qui produisent le mythe et le héros.
Cependant, malgré ses bonne intentions et ses images enchanteresses (dont celles du combat final absolument magnifiques), le " p'tit p'tit fillot " de Raging Bull peine légèrement à faire rentrer son public dans l'histoire. Le montage brutal et le manque de blabla empêchent le spectateur d'être totalement absorbé par l'écran, devenant comme Olli de temps en temps, pas tout à fait concentré et légèrement indifférent .
Mais ! Ne craignez rien, car malgré cela on ne s'ennuie pas. Alors si vous avez une heure trente de trou, laissez vous tenter par Olli Mäki. Vous y trouverez de bons conseils pour maigrir, vous vous rendrez compte que le finnois c'est une langue plutôt très sympa et vous saurez quel regard certain Cannes a eu l'année passée.
L'avis de Bizard Bizard : allez-y au petit trop.Crédits images: europeanfilmsawards.eu (couverture) - filmsdulosange.fr - filmsdulosange.fr