Pour son premier film, Hard Day (2015), Seong Hun-Kim avait frappé très fort, sélectionné à la quinzaine des réalisateurs au Festival de Cannes ainsi qu'à L'Étrange Festival, il avait recueilli des critiques en grande majorité très positives faisant suite à un important succès public en Corée. S'il démontrait incontestablement un solide talent derrière la caméra, nous n'avions néanmoins pas totalement été convaincu par ce qui nous avait alors semblé, être un film qui excellait dans ses scènes d'action mais avait souvent la main assez lourde dans sa dénonciation à gros trait de la corruption de la police coréenne et sa volonté d'incorporer de la dérision à son récit. Pour autant, cet édifice, bien que fragile, ne s'effondrait jamais, l'intérêt de l'intrigue étant toujours maintenu et prenant le pas sur le sous texte un peu grossier. Tunnel souffre sensiblement des mêmes maux, dans des proportions toutefois encore plus importantes, qui viennent malheureusement sérieusement le parasiter et finalement occulter ce qui fonctionne par ailleurs admirablement bien. Le deuxième long métrage de Seong Hun-Kim opère un mélange des genres audacieux mais à notre sens bancal, parce que mal maîtrisé, entre le film catastrophe et la satire très appuyée des pouvoirs publics coréens, le tout saupoudré d'un humour très (trop) présent. Comme dans Hard Day, Seong Hun-Kim part du récit d'un homme dont la vie bascule suite à un accident pour élargir le cadre et donner une dimension satirique à son récit.
Jung-Soo (l'excellent Jung-Woo Ha vu dans The Chaser, The Murderer, The Agent) va se retrouver pris au piège dans sa voiture après l'éboulement d'un tunnel. Plutôt que de se focaliser sur le seul sort de son personnage et de rester dans ce qui aurait pu être un énième mais très efficace survival, Seong Hun-Kim en profite pour passer au scanner toutes les réactions que cette catastrophe va engendrer et les pratiques qu'elle va mettre à jour. Des journalistes avides de scoop, n'hésitant pas à appeler Jung-Soo sur son téléphone portable, à l'équipe de secours incompétente semblant travailler dans l'improvisation la plus totale, à la ministre venant sur le lieu du drame uniquement pour se faire prendre en photos, Seong Hun-Kim distribue ostensiblement les cartons jaunes. Il n'a malheureusement ni le talent, ni l'ironie mordante de Billy Wilder (on pense immédiatement à Ace Hole) et c'est avec de bien gros sabots qu'il distille son propos.
Tunnel commençait pourtant très bien, impressionnant dans les scènes d'éboulement, oppressant quand on suit les premières minutes de Jung-Soo pris au piège de sa voiture, entendant les roches continuer de tomber autour de lui. Le cadre s'élargit rapidement pour montrer les secours en train de s'organiser et l'arrivée de nuées de journalistes sans scrupules. Jonglant alors entre les différentes strates de son récit, Seong Hun-Kim ajoute un humour d'une lourdeur problématique, notamment par l'intermédiaire de Dae-Kyoung ( Dal-Su Oh) , un ahuri chargé de diriger les secours. Quand il revient à un premier degré salutaire pour l'équilibre et l'intérêt de son récit, Tunnel offre encore des scènes impressionnantes, notamment lors d'un nouvel éboulement auquel tente cette fois d'échapper Dae-Kyoung, lancé dans une folle course en marche arrière au volant de son véhicule. Dans ces meilleurs moments, Tunnel flirte avec le film d'horreur, réussissant des prouesses de mise en scène dans l'espace aussi réduit de la voiture ensevelie de Jung-Soo. L'intérêt du récit finit malheureusement par lentement se diluer, à force de petits gags parfois très lourds (embarrassant running gag sur l'urine que Jung-Soo doit se résoudre à boire pour survivre) désamorçant systématiquement la tension dramatique que l'on pensait enfin retrouver. On ne s'attardera pas trop non plus sur la crédibilité des conditions de survie et du peu d'initiatives de Jung-Soo, la partie survival du récit étant devenue à nos yeux presque anecdotique à force d'être vidée de son émotion. On devine l'issue de cette petite satire qui se regarde sans souffrance mais qui perd en intérêt à force d'asséner et répéter son message, tout en voulant garder une dimension de divertissement grand public qui ne se prend pas non plus trop au sérieux. Certaines scènes, certains gags, n'apportent rien au récit. Tunnel souffre à notre sens aussi de sa longueur, près de 2h10, qui paraît excessive, le récit aurait probablement gagné à être condensé sur une bonne demie heure de moins. Cela aurait déjà contraint Seong Hun-Kim à passer moins de temps, à souligner x fois, le cynisme de la presse et des politiciens face à la tragédie qu'est en train de vivre cet homme, auquel tout spectateur peut s'identifier. Son ambition doit être saluée, comme son approche originale du film catastrophe mais le résultat est trop imparfait et la conclusion de son récit tellement téléphonée et " facile " que la déception l'emporte.
Titre Original: TEO-NEOL
Réalisé par: Kim Jee Woon
Lee Han-seo...
Genre: Drame, Thriller
Sortie le: Prochainement
Distribué par: Version Originale