La metaphore dans la fiction

Par William Potillion @scenarmag

La métaphore et la fiction partagent une même essence. Elles sont toutes deux une transformation.
Transformation d’une réalité pour l’une, transformation d’une signification pour l’autre.

Une métaphore transporte un monde de significations vers un autre. Elle n’annihile pas un monde. Elle l’élargit par ce qu’elle apporte avec elle.
Ce qui se joue dans une métaphore est une signification. Celle-ci est alors transformée en quelque chose qui dépasse son état initial.

Une fiction est métaphorique

Dans ses rouages internes, elle l’est en effet. Elle prend une action réalisée par des personnages et la transforme de quelque chose d’ordinaire en une attente de quelque chose de significatif.

La fiction transporte le fait montré vers un horizon plus large. Elle transforme toute action en un acte de compréhension.
La métaphore s’ajoute au simple fait et par quelque combinaison rationnelle, imagée, associative ou poétique, elle fournit un contexte, une explication, une cause, une intention, une analogie, une relation.

Par exemple, la mort dans un sens métaphorique n’est plus l’opposé ou le terme de la vie. Elle est l’expression de l’ordre devenu désordre, de l’ambition menant à la destruction, de la force et de la sagesse en faiblesse et folie.

Quelques définitions

On peut s’interroger sur les définitions de symbole, métaphore et métonymie.

La métaphore est une figure par laquelle la signification naturelle d’un mot est changée en une autre.
Quant au symbole, il est ce qui représente autre chose en vertu d’une correspondance analogique.

Par exemple, pour Pascal, l’homme est un roseau est une métaphore. Le roseau représente un certain aspect de la nature humaine.

Le sacrement du Baptême est un symbole. Baptiser en grec signifie immerger.
Et cette plongée dans l’eau symbolise l’ensevelissement dans la mort du Christ d’où le catéchumène sort par la résurrection avec lui comme nouvelle créature.
C’est ainsi que ce sacrement est aussi appelé bain de la régénération et de la rénovation en l’Esprit Saint, rénovation pris au sens de renaissance.

La différence entre métaphore et symbole est subtile. Et ce n’est pas dans la correspondance analogique inhérente au symbole que l’on peut l’établir.
La métaphore entretient aussi un rapport de similarité et non de contiguïté comme le fait la métonymie. L’aspect contigu du contenant et du contenu est évident (boire un verre, par exemple).
Par contre, il n’y a nulle contiguïté dans la métaphore, seulement une similarité.

Par exemple, si la Foi est espérance alors dire que la Foi est un grand arbre (Péguy) revient à dire que le bourgeon est espérance. On est alors en droit de faire de l’arbre le symbole de la Foi.
Mais cette correspondance analogique pourrait être plus simplement considérée comme une métaphore.

Un chaînage de métaphores

Afin de dénouer la complexité de certains concepts, il est alors utilisé un emboîtement de métaphores. L’une menant à l’autre et aboutissant à la signification voulue par l’auteur.

Par exemple, si l’on souhaite s’interroger si la destinée corromps notre volonté, on pourrait dire que ni la chance, ni le destin ne peuvent entraver ou contrôler la ferme détermination d’une âme.
Ainsi, on pourrait illustrer la fougue des passions de la jeunesse dans une sorte de débauche charnelle comme métaphore de l’erreur dans laquelle se consume le personnage.

Puis par une prise de conscience devant un événement (comme révélation, comme illumination), comprendre que notre volonté doit lutter contre la bonne ou la mauvaise fortune.

Ainsi de métaphores en métaphores, on parvient à faire du libre-arbitre un symbole de notre détermination.
On utilise un système continu de métaphores pour expliquer le concept, comme si l’on expliquait l’abstrait par le concret.

Et pour un auteur, le concret consiste à inventer des situations dont il se servira comme métaphores pour son propos.

Et la comédie ?

Imaginons notre quotidien qui consiste à rapiécer les petits et gros problèmes de la vie et somme toute, de mener sa vie comme on le peut.

En d’autres termes, il s’agit de survivre dans une société où la compétition est partout. Profiter le plus possible de l’autre afin de gagner son pain ou de n’ambitionner que la réussite sociale par l’arrogance aveugle et désespérée d’obtenir un statut social… ne sont que quelques exemples.

Maintenant, et si cette survie telle que nous venons de la décrire était utilisée comme une métaphore ?
Si réussir socialement était un acte de compassion ?
Apprendre de ses erreurs, surmonter les problèmes, rechercher l’harmonie sont elles-mêmes les métaphores d’un monde meilleur où la paix règne, où la vie est une recherche de perfection, où les incertitudes et le fardeau d’une fin tragique bien plus agréable à porter.

Comment pourrions-nous dire tout cela autrement qu’avec des métaphores ?
Et la comédie s’avère le moyen d’expression le plus adéquate pour décrire un tel monde.