[Critique] – « Le Client » – Asgar Farhadi

Par Victorvandekadsye @BrouillonsCine

S'imposant comme l'une des figures phares du cinéma iranien, le réalisateur Asgar Farahadi signe un nouveau conte haletant sur fond de questions morales sur la vengeance et le pardon. Un drame aux airs de thriller, multi-récompensé par le jury de Georges Miller au dernier Festival de Cannes.

Comme à chacune de ses sorties, Farhadi créé un véritable phénomène cinématographique. Après " Une Séparation " en 2011 et " Le Passé " en 2013 (auréolé d'un prix d'interprétation pour Bérenice Béjo à Cannes), le metteur-en-scène attire à nouveau les louanges et la réflexion en suivant les réactions de différents personnages gravitant autour d'un événement majeur.

A partir d'un incident survenu brutalement (sans réellement connaitre la véritable nature de l'acte), " Le Client " raconte sans réelle jugement comment un être humain peut basculer sombrement vers une spirale vengeresse insoutenable pour retrouver un honneur. En prenant ce couple progressiste comme principaux protagonistes, la caméra de Farhadi filme une lente mais insidieuse descente aux enfers, posant aux spectateurs une question plus que nécessaire sur le pardon et la notion de justice. Une démarche pouvant rappeler celle de " Prisonners" , avec Hugh Jackman en père tortionnaire désespéré, qui brille par l'interprétation de Shahab Hosseini, terrifiant en prof/acteur cool qui va peu à peu sombrer dans la violence par colère.

Et si ça ne suffisait pas à Farhadi de toucher le spectateur dans le mille avec un sujet épineux, il épate également par sa réussite à amener un genre (ici, celui du thriller) dans une mise en scène qui ne s'y prête en aucun cas. Filmant intimement ses personnages, déambulant dans les rues de Téhéran, Farhadi entraîne son public dans une enquête haletante non pas grâce à une éventuelle insistance filmique sur des objets (On ne va pas, ici, filmer tel élément en gros plan pour instaurer des fusils de Tchekov) mais par le biais d'informations transmis aux protagonistes par le dialogue. Une enquête qui, comme dans tout bon thriller, arrive à déjouer nos attentes pour une dernière partie mettant ses personnages et son public à mal.

" Le Client " s'inscrit définitivement comme l'une des oeuvres les plus pertinentes du cinéaste, une réflexion magnifique sur la justice et le pardon sous la forme d'un faux-thriller captivant.

Victor Van De Kadsye