Généralement, quand la télé américaine se met en tête d'adapter une série de fiction étrangère venant d'un pays non anglophone, ça se passe plutôt mal comme en témoignent Les Mystères de Laura, The Returned ou The Killing, annulé deux fois et sauvé in extremis chaque année. Pourtant, une fois de temps en temps, une exception pointe le bout de son nez et il semblerait que les plus notables proviennent d'Amérique du Sud (ce qui tombe sous le sens vue la quantité de séries produites chaque année dans le monde Latino). Souvenez-vous, il y avait eu Ugly Betty en 2006, et depuis 2014, il y a la série phare de la CW, l'adaptation de la telenovela vénézuélienne Juana la Virgen, la très justement intitulée Jane the Virgin. Le succès critique est immédiat pour cette série a priori loufoque, l'histoire abracadabrante d'une jeune femme vierge qui à la suite d'une erreur médicale se retrouve artificiellement enceinte d'un homme qu'elle connaît à peine. La créatrice Jenny Snyder Urman et son équipe de scénaristes décrochent un Peabody Award en 2014 et la star de la série Gina Rodriguez, reçoit en 2015 le Golden Globe de la meilleure actrice (première victoire pour la CW qui diffuse la série). Le tour de force de Jane The Virgin, c'est de balancer les mécanismes les plus ahurissants des telenovelas dans une histoire des plus banales et de faire en sorte que tout un chacun puisse s'identifier aux personnages. Ajoutez à ça une photographie étincelante, un ensemble d'acteurs plus pétillants les uns que les autres et une liste de guest stars longue comme le bras et boum ! Vous voilà avec un phénomène de série qui restera dans les annales.
Jane ( Gina Rodriguez) a donc fait le vœu de rester vierge jusqu'au mariage, promesse avec laquelle elle s'est plus ou moins débattue au cours des deux dernières saisons. Son père, la star mexicaine Rogelio de la Vega (l'extraordinaire Jaime Camil) est de nouveau dans sa vie, et la relation de ce dernier avec la mère de Jane, Xiomara ( Andrea Navado), a connu des hauts très hauts et des bas très bas. Jane a prévu d'épouser Michael ( Brett Dier) mais c'était avant que son médecin Luisa ( Yara Martinez) ne l'insémine artificiellement avec le sperme de son frère Rafael ( Justin Baldoni) - le frère de Luisa, pas celui de Jane ! Rafael est en instance de divorce avec sa femme Petra ( Yael Grobglas) et tente de sauver son hôtel de la ruine suite aux machinations d'un parrain de la drogue du nom de Sin Rostro. Ca va, vous suivez toujours ? Parce que ça se complique encore à partir de là avec agents doubles, triples, malédictions a go-go, rêves de conquête, triangles amoureux, enquêtes policières et romans à l'eau-de-rose. Ah oui, parce que Jane rêve aussi de devenir écrivain et a une prédilection pour les romans d'amour genre soft-porn, le comble pour une jeune fille pour qui le sexe est encore un mystère. Sous ses dehors absurdes et bigarrés, la série aborde des thèmes plus profonds comme la signification du mot " famille ", le sens des responsabilité, l'immigration, la difficulté à pardonner et l'éternelle lutte pour vivre les uns avec les autres. Bref, c'est délicieusement emberlificoté tout ça, saugrenu au possible mais avec du cœur, un sens de l'humour et un ton bien particulier qui se donne le luxe d'être poignant. Un mélange des genres qui avait tout pour finir en fiasco mais qui par un tour du destin s'est transformé en carton. Sans doute l'une des meilleures séries sur les ondes en ce moment.
Crédits: The CW