Faits divers souvent même qualifié de fait de société l' affaire Violette Nozière a défrayé la chronique dans les années 1933-1934 et bien après. Pas étonnant que le réalisateur Claude Chabrol s'y intéresse après que l'acteur Pierre Brasseur lui en ait donné l'idée. Il a fallu beaucoup de persuasion de la part de Chabrol pour que les enfants de Violette Nozière accepte finalement un film. Le film relate donc de façon hyper réaliste le destin de Violette Nozière, adolescente à problème, vivant chez ses parents mais qui vit de rapines et de prostitutions occasionnelles avant de commettre un parricide... Une affaire qui défraya la chronique notamment par le soutien indéfectible des artistes surréalistes (de André Breton à René Char en passant par Salvador Dali) à la jeune femme.
Comme à son habitude le cinéaste compose son casting d'habitués Jean Carmet, Bernadette Lafont, Dominique Zardi, Dora Doll et surtout son épouse à la ville (de 1964 à 1980) Stephane Audran qui tourna pas moins de 32 films avec Chabrol ! Mais le rôle-titre est tenu par une jeune actrice en pleine ascencion, Isabelle Huppert, qui venait de connaitre la reconnaissance après le film "La Dentellière" (1976) de Claude Goretta. Le choix de Chabrol est d'une importance capitale puisque l'atout majeur du film réside dans le doute toujours présent sur des déclarations de Violette Nozière. En effet la "vraie" Violette Nozière a déclaré avoir agi parce que son père la violait. Si Chabrol ne montre jamais un tel acte mais il impose le doute dans la tête du spectateur, une sorte d'image subliminal, inconscient donc, par le choix du duo père-fille. En effet dans l'excellent film "Dupont Lajoie" (1975) de Yves Boisset (qui a été un succès) Carmet violait Isabelle Huppert...
Chabrol y incruste plusieurs flash-backs qui accentue cette sensation où on ne sait jamais si l'inceste est avéré ou pas. Cette ambiguité est la grande force du film, à la fois sensation inconfortable et d'une neutralité qui va de soit puisque nous ne saurons sans doute jamais vraiment. Comme à son habitude Chabrol réalise un film assez austère, un film qui semble trop statique mais qui montre bien la société de l'époque, trop patriarcale sans doute et qui place Violette Nozière comme une femme avide de liberté qui ne serait pas née à la bonne époque. Une idée toute en mesure lorsqu'on apprend la dernière partie de sa vie. En tous cas "Violette Nozière" est un des meilleurs films de Chabrol qui apprécie particulièrement ce genre de faits divers, petite histoire dans la grande. Un film où Isabelle Huppert joue son 1er film sur les 7 tournés avec Chabrol dont, justement, les magnifiques "Une affaire de femmes" (1988) et "La Cérémonie" (1995) deux autres films sur des faits divers qui auront aux aussi marqués leur époque. "Violette Nozière" consacre définitivement Isabelle Huppert au rang de star et obtient le prix d'interprétation au Festival de Cannes 1978.
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