Il est le méchant de l’histoire. Cela ne signifie pas que son personnage sera traité à la légère. Il faudrait penser son antagoniste comme l’on réfléchit à son protagoniste.
Un antagoniste n’est pas juste là pour faire des farces au héros de votre histoire.
Ne faites pas de votre antagoniste un être générique et sans contenu. Vous ne feriez que du néant.
Une bonne histoire se distingue par son méchant
Un puissant antagoniste fera toute la différence. La dimension qu’ajoute le Joker à The Dark Knight : Le Chevalier Noir est indéniable ainsi que la présence de Loki dans Thor.
On retrouve aussi ces méchants iconiques dans Le silence des agneaux ou Inglorious Basterds…
Rien ne vous interdit de vous inspirer des antagonistes qui vous ont le plus marqués. Ajoutez leur simplement les couches nécessaires qui les rendront spécifiques à votre histoire.
Les qualités d’un bon antagoniste
De claires et distinctes motivations
L’intention du méchant de l’histoire est de contrer l’intention du héros. Mais au-delà de cette fonction, quelles sont ses motivations ?
Qu’est-ce qui le pousse à vouloir nuire au personnage principal ? Il faut réserver dans le scénario des scènes ou des séquences qui expliquent pourquoi l’antagoniste fait ce qu’il fait.
Et ces motivations n’ont pas nécessairement à plaire au lecteur. Il lui faut simplement les comprendre.
Car, somme toute, le méchant de l’histoire ne se considère pas comme tel. Comme l’écrit Stephen King, il est le héros de sa propre vie. Selon sa perspective, il agit conformément au bien.
Wilson Fisk (Daredevil) par exemple est écrit avec le même soin que Matt Murdock.
Non seulement nous assistons à la construction de son empire et l’histoire explore aussi les raisons de cet empire.
Fisk veut faire de Hell’s Kitchen un endroit où mieux vivre parce que lui-même y a vécut des moments difficiles (une enfance pauvre dans le Bronx et objet de risée à cause de son embonpoint).
Mais il y a aussi en lui un conflit entre des valeurs humaines (tel son amour pour Vanessa) et sa façon de faire le mal, bien qu’il se défende de faire le mal pour le mal.
Et les auteurs (du moins ceux qui ont adapté le personnage pour la série) ont fait remonter ce comportement (une blessure psychologique) jusqu’à son père qui était un homme violent.
Lorsque Daredevil (Matt Murdock) en vient à menacer cet empire parce qu’il ne peut l’accepter pour Hell’s Kitchen, c’est donc tout naturellement que Wilson Fisk s’est opposé à lui.
Il est donc important de toujours justifier les actions d’un antagoniste. Ses actes doivent avoir des raisons et des significations. En quelque sorte, vous ajoutez des couches psychologiques au personnage.
L’antagoniste n’a pas nécessairement à être complexe
En effet, vous pourriez simplement en faire une force antagoniste orientée vers la destruction ou le tourment.
Il est alors un mal définitivement perdu.
C’est une source de conflits pour le héros qui doit l’affronter et il ne peut éviter cet affrontement. C’est comme si le méchant lui était nécessaire pour justifier sa propre existence. En quelque sorte, c’est comme si l’antagoniste donnait un sens à l’existence du héros.
C’est sensiblement ce type de relation entre Ramsay Bolton et Jon Snow dans Game of Thrones.
Et puis bien sûr, il y a l’antagoniste qui possède aussi sa propre faiblesse, tout comme le héros d’ailleurs. Il a aussi un arc dramatique à parcourir.
Et dans ce cas, on en revient à ce que l’on disait précédemment et l’auteur doit travailler son personnage en lui inventant un passé et des motivations crédibles et légitimes.
Une forte dynamique entre le protagoniste et l’antagoniste
Un méchant de l’histoire partage souvent une même image avec le protagoniste.
Une image inversée. Belloq n’est pas si différent de Indiana Jones.
Il peut s’avérer nécessaire pour le bien de l’histoire que des scènes de rencontre entre le protagoniste et l’antagoniste aient lieu avant l’ultime confrontation.
Vous pourriez nous objecter que Jon Snow et Ramsay Bolton ne se sont pas rencontrés en tant que belligérants avant la bataille qui décida du sort de Bolton.
Mais ce climax fonctionne cependant car c’est la relation entre Sansa Stark et Ramsay Bolton qui rencontre sa conclusion lors de ce climax. C’est d’ailleurs Sansa qui met à mort Ramsay.
Une série ne s’articule pas comme un scénario destiné à un long métrage. Le temps octroie à la série la possibilité de déployer des lignes dramatiques qui possèdent chacune leur propre protagoniste et antagoniste.
Et parfois, deux personnages occupent la même fonction du protagoniste. Faites bien la distinction entre personnage et protagoniste.
Dans un long métrage, la fonction et le personnage sont souvent confondus. Ce qui fait que ce personnage est un héros.
Dans les séries, il est plus facile de distinguer fonction et personnages. Lorsque le personnage principal n’est pas le protagoniste, c’est-à-dire qu’il ne fait pas avancer l’histoire, son importance est qu’il draine la charge émotionnelle que l’auteur tente de susciter chez le lecteur.
Dans l’exemple de Game of Thrones, le protagoniste est Sansa. C’est elle en effet qui incite son frère à marcher sur Winterfell. C’est encore elle qui va chercher de l’aide auprès de Lord Baelish ce qui déterminera l’issue de la bataille.
Et c’est encore elle qui achève Ramsay Bolton.
Le personnage principal est donc Jon Snow. La mise en scène de la bataille est toute teintée de Jon et d’ailleurs, sur le plan de cette mise en scène, cette bataille est essentiellement vue à travers ses yeux.
Très efficace pour communiquer une émotion.
Engager le lecteur sur l’émotionnel
Indépendamment du cas où l’antagoniste bénéficie d’une liberté que le héros pourrait lui envier (voire inconsciemment), il est important de créer entre eux, à travers leur relation, une dynamique émotionnelle.
Et cela n’est possible que s’ils se sont rencontrés avant le climax. Dans Thor, Loki a beau être un antagoniste maître de la perversité spectaculaire, ce n’est pas cela qui provoque l’émotion.
Ce qui illumine cette histoire, c’est la relation qu’il entretient avec son frère. C’est cette dynamique entre la jalousie de Loki face à l’arrogance de Thor savamment explicitée dans plusieurs scènes qui prépare le terrain émotionnel.
Le climax en quelque sorte ne serait plus qu’une formalité.
Quoiqu’il en soit entre eux deux, c’est-à-dire que votre antagoniste soit déjà en relation conflictuelle avec le protagoniste ou bien que le conflit se construise au cours de l’histoire, faites en sorte de mettre en place une dynamique entre eux lors de scènes conçues à cet effet.
Cela aidera à ajouter de la profondeur à vos deux personnages.
Un méchant avec des compétences et des failles
Plus un antagoniste montrera qu’il est bon dans ses propres compétences, et plus il sera terrifiant.
Hans Landa de Inglorious Basterds est manipulateur et méthodique. S’inspirant de Sherlock Holmes pour mener ses interrogatoires, dès la séquence d’ouverture, nous nous forgeons un respect vis-à-vis de son talent particulier mais nous éprouvons aussi de la peur car cette capacité particulière où il excelle pourrait bien lui permettre de localiser les fugitifs juifs que nous savons cacher sous le plancher.
Par ailleurs, un antagoniste sera plus passionnant à suivre si tout comme le héros, il possède une faille dans sa personnalité. Vous pouvez ainsi développer un arc dramatique montrant les différentes étapes du changement dans sa personnalité.
Un arc qui se développe parallèlement à celui du protagoniste.
Vous pouvez tout aussi bien présenter un antagoniste tout à fait développer comme l’est Hans Landa. Dans ce cas, il faut chercher à montrer l’aspect le plus sombre de cette entité maléfique.
Hans Landa est ainsi l’incarnation parfaite du véritable antagoniste qu’est le nazisme.
L’antagoniste doit être fascinant
Un bon antagoniste a donc des motivations claires et distinctes, établit une forte dynamique avec le protagoniste, possède de vraies compétences et bien souvent aussi une ou plusieurs failles dans sa personnalité.
A quoi peuvent bien servir toutes ces qualités ?
A faire en sorte que le lecteur apprécie de passer du temps avec lui. Tout comme il aime à être avec le héros de l’histoire.
Inspirez-vous de méchants qui vous ont fasciné pour construire vos propres antagonistes. Vous augmenterez ainsi la profondeur de votre histoire ainsi que sa tension dramatique.