Un grand merci à Carlotta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Les flics ne dorment pas la nuit » de Richard Fleischer.
« Etre tué en service, c’est ce qui nous pend au nez si on n’est pas sur ces gardes »
Trois nouvelles recrues font leur entrée dans un commissariat de Los Angeles, parmi lesquelles Roy Fehler, étudiant en droit entré dans la police pour subvenir aux besoins de sa famille.
Il fait équipe avec Andy Kilvinski, vieux briscard engagé dans la police depuis 23 ans, qui lui apprend toutes les ficelles du métier. Roy devient vite accro à la rue et à ses dangers, et délaisse peu à peu ses études et sa famille…
« Sois poli toujours, courtois jamais. C’est une leçon de philosophie que j’offre à chaque bleu que je dresse »
Véritable enfant de la balle, Ricahrd Fleischer grandit dans un milieu bercé par le cinéma. Son père Max Fleischer produit ainsi les premiers dessins-animés de « Popeye » et de « Betty Boop ». Après des études avortées de médecine, Richard Fleischer intègre à la fin des années 30 les studios successivement comme technicien puis comme monteur. Excellent faiseur à défaut d’être un auteur, il entame à partir de 1945 une prolifique carrière de réalisateur qui s’étalera sur plus de quarante ans. D’abord spécialiste du film noir, le cinéaste s’ouvre progressivement à d’autres genres à partir de la fin des années 50, s’essayant successivement à la science-fiction, au péplum ou encore au film d’aventures. Mais la carrière du cinéaste connait véritablement son apogée entre 1966 (« Le voyage fantastique ») et 1974 (« Du sang dans la poussière »), réalisant une série de films sans fausse note, comptant parmi les meilleurs de sa filmographie. Après avoir réalisé successivement trois films en Europe (« L’étrangleur de Rillington Place », « Les complices de la dernière chance », « Terreur aveugle »), il revient en Amérique en 1972 pour réaliser « Les flics ne dorment pas la nuit », adaptation du best-seller « The new centurions » de Joseph Wambaugh, un ancien policier de Los Angeles qui a compilé dans son livre ses expériences de policier durant près de dix ans dans la métropole californienne.
« Trinquons aux nouveaux centurions. En espérant qu’ils feront mieux que les anciens. »
« Les flic ne dorment pas la nuit » est un polar réaliste comme Hollywood les affectionne en ce début de décennie 70’s (« French connection », « Le flic ricanant »). Construit comme une chronique, le film suit le parcours d’une jeune recrue de la police et nous invite à le suivre dans ses patrouilles au cœur des rues de Los Angeles. Il n’est pas question ici d’une intrigue policière qui servirait de fil rouge au récit mais d’une succession de scénettes nous montrant le quotidien de ces hommes durant quelques mois. A l’évidence, Fleischer s’intéresse ici à la dimension sociale de ces policiers. Des hommes ordinaires confrontés chaque jour à des situations extraordinaires. Si la caméra du cinéaste s’avère sans concession et au plus près de l’action, il s’efforce toujours de porter un regard humaniste et sans jugement sur ses personnages et sur les situations auxquels ils se retrouvent confrontés, qu’elles soient légères (la scène de ménage au début du film, le ramassage des prostituées) ou véritablement dramatiques (le bébé maltraité, la bavure dans la rue sombre). Avec une étonnante acuité (et beaucoup de modernité), le cinéaste décrit ainsi les maux de la société de son époque (le racisme, la ségrégation, la drogue, l’immigration). Surtout, il nous montre combien métier s’avère dangereux et profondément dévorant. Une sorte de sacerdoce, qui finit invariablement par broyer ces hommes, qui semblent tous voués à suivre la même trajectoire (divorce, alcool). Mais plus que tout, on est touché par la profonde mélancolie qui traverse le film (à l’image de cette terrible scène où le personnage de George C. Scott, au bout du rouleau, finit par se suicider) et qui lui donne cette ambiance si désespérée. Au fond, il n’y a pas d’héroïsme exalté chez Fleischer. Juste des héros du quotidien, des « centurions » qui affrontent au nom de l’intérêt général la violence générée par la misère sociale et qui meurent le plus souvent pour rien. Une forme de nihilisme qui donne au final toute sa force à ce beau film crépusculaire et plein d’humanité.
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Le DVD : Le film est présenté dans un nouveau master HD. Il est proposé en version originale américaine (1.0) et en version française (1.0). Des sous-titres optionnels français sont également proposés. Côté bonus, le film est accompagné d’une préface de Nicolas Saada, de « Chronique humaniste » : entretien inédit avec Nicolas Boukhrief (25’), de « Cop Stories : les dessous des « Flics ne dorment pas la nuit » » : entretien avec Joseph Wambaugh (auteur du roman « Les nouveaux centurions ») et témoignages exclusifs de Stacy Keach, Richard Kalk (conseiller technique) et Ronald Vidor (assist. opérateur) (44’) et de Bande-annonce.
Edité par Carlotta, « Les flics ne dorment pas la nuit » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 9 novembre 2016.
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