- Sortie : 27 novembre 2013
- Titre original : -
- Réalisateur : James Gray
- Scénariste : James Gray et Ric Menello
- Acteurs : Joaquin Phoenix, Marion Cotillard, Jeremy Renner...
- Compositeur : Chris Spelman
- Genre : Jamais sans ma sœur
- Pays : Amérique
- Durée : 2h
New York, 1920. Ewa et Magda, deux sœurs arrivant de Pologne, débarquent à Ellis Island, la tête toute pleine d'American Dream. Sauf que Magda, la pôv' grande, est tuberculeuse et se fait mettre en quarantaine recta. Pour la sortir de là, Ewa doit trouver de l'argent. Beaucoup d'argent. Et comment qu'on fait, à New York en 1920, pour gagner un max de thunes quand on est jolie et bien foutue, et qu'un proxénète vous promet monts et merveilles ? Ben voui, on se prostitue. V'là donc Ewa en train de jouer à tirelipimpon pour sauver sa frangine. Là où ça se complique, c'est que le proxo tombe amoureux d'elle. De même qu'un prestidigitateur, cousin dudit proxo. Vous voyez un peu le potage ?
Dans le rôle principal, il y a Marion Cotillard. Actrice mignonette mais qui, hormis dans La Môme où elle crevait l'écran, manque souvent de présence et de charisme. Ici, elle n'est ni vraiment bonne ni vraiment mauvaise. Elle présente un visage qui rappelle ceux des héroïnes du muet. Le sort s'acharne sur son personnage. C'est bien, ça lui durcit le caractère. Et à chaque fois qu'elle sombre dans le stupre, elle gagne en substance. Elle, que sa pureté rendait transparente au début du film, devient tigresse au regard flambant pour sauver sa sœur des geôles d'Ellis Island. Dans la théorie, ce personnage d'Ewa se veut sans doute un mix entre la Fantine d'Hugo, la Vierge Marie et Marie-Madeleine ; femme souillée mais immaculée, toujours sauvée par cet amour farouche qu'elle porte à sa frangine. Dans la pratique, survient le problème que Cotillard n'est crédible ni en vierge ni en putain, et qu'elle peine donc à susciter notre sympathie.
Joaquin Phoenix, dans le rôle du mac, offre comme toujours une prestation dense et habitée. Ce comédien excelle à jouer les êtres troubles et hantés. Son personnage est le plus intéressant de tous, ambivalent, torturé. Il est une crapule qui veut jouer les bons apôtres, un Al Capone du dimanche aux ambitions d'ange gardien.
Là-dessus arrive Orlando ( Jeremy Renner), le cousin prestidigitateur, vrai ange aux intentions pures qui veut sauver Ewa. Évidemment, ce trio du mac, de la traînée et du saint-bernard ne peut que conduire au drame.
Tous les personnages que croisent Ewa, Orlando excepté, se montrent odieux avec elle. Ils sont pourtant, tout comme elle, des immigrants dont personne ne veut vraiment sur le sol américain et qui doivent se battre, au prix de leur intégrité, pour survivre. (Et ce spectacle a une drôle de résonance avec ce qu'il se passe actuellement en Europe). Ils pourraient être solidaires, s'unir pour gagner en force. Mais ils ne le font pas, chacun est renvoyé à sa solitude, et ne considère l'autre que comme un rival à neutraliser.
Grâce à la lumière de Darius Khondji et au beau travail de l'équipe déco, la reconstitution du New York 1920, crasseuse et sépia, est à la fois esthétique et réaliste. Mais l'histoire se traîne et ne parvient pas à faire naître l'émotion. En outre, les genres se mélangent et au final, on ne sait plus quel film on regarde : Les Misérables ? Les Bas-Fonds ? Cotton Club ? The Immigrant (de Chaplin) ?
Dernier bémol : juste après la séquence de bravoure où Phoenix avoue enfin tout ce qu'il a dans le cœur, arrive la scène finale. Trop sobre, trop distante, trop brève. Qui fait qu'on finit le film en se disant : " Tout ça pour ça ? ".
Bande-annonce de The Immigrant :