Ce lundi 12 décembre, nous avons pu assister, en présence du réalisateur Michel Boujenah, à la projection en avant-première de son troisième long-métrage. Il est revenu sur son rapport à l’art cinématographique dans lequel il trouve un supplément d’âme à la scène et se rêve, en plaisantant, en créateur divin. Romance de minots, Le cœur en braille, qui sortira le 28 décembre 2016, illustre avec juste ce qu’il faut de tendresse et de facétie, les premiers amours timides et désintéressés.
Marie (Alix Vaillot), une adolescente passionnée de violoncelle, souffre d’une maladie qui lui fait perdre, peu à peu, la vue. Inquiète que son père (Charles Berling que l’on a vu dans L’enquête) ne la place en institut spécialisé avant qu’elle est pu intégrer une classe d’excellence musicale, elle se rapproche de l’un de ses camarades, Victor (Jean-Stan du Pac) dont elle devine les sentiments amoureux.
Marie (Alix Vaillot) et Victor (Jean-Stan du Pac)
La dernière fois que l’on avait apprécié la justesse d’un film français à destination des plus jeunes, c’était Le nouveau de Rudi Rosenberg. Des films de la veine du Château de ma mère ou de La guerre des boutons se font de plus en plus rares. Aladin et autre pitrerie en vogue, nivellent par le bas et n’inspire guère plus d’émotions qu’une motte de beurre bien grasse fondant au soleil. Le cœur en braille joue plutôt dans la première catégorie. Tout d’abord, Boujenah a eu l’intelligence de ne pas faire voler la vedette des enfants par les adultes. De plus, ces enfants-là, tout deux débutants, prennent pleinement possessions de l’écran. On les sent investis et concernés, ne déméritant pas tant au niveau du jeu que de la prestance. Ils sont ainsi les vrais héros du film et le porte (bien haut) avec leurs petits bras. Pascal Elbé (que l’on a vu dans 24 jours, la vérité sur l’affaire Ilan Halimi), qui joue le père de Victor, et qui nous laisse généralement assez froid, prend un peu de corps en interprétant un personnage un peu perdu dans l’éducation de son môme. La réalisation somme toute banale est rehaussé par l’interprétation des jeunes artistes, donc, mais également par un scénario attendrissant et, évidemment, une utilisation fort à propos de la musique classique.
Victor (Jean-Stan du Pac) et Marie (Alix Vaillot)
Marie et Victor sont deux gamins issus de deux milieux bien différents, une fille de bourgeois et un fils d’ouvrier, que l’école républicaine à réuni dans la même classe. Une école qui, il est agréable de le noter ne donnent pas à l’écran dans la caricature, ni pour les élèves ni pour l’équipe pédagogique, si ce n’est une CPE un peu nerveuse qui sert plutôt de ressort comique et avec le père de Marie sert à caractérisé un monde adulte devenu insensible à l’art et sa beauté.Découvrant un milieu différent, Victor, petit tête en l’air, finit par apprécier la musique autant qu’il admire Marie. L’amour qu’il lui porte à la candeur insouciante de la jeunesse. Toutefois, les rapports de classes imprègnent, à leur niveau enfantin, une relation qui se base d’abord sur l’exploitation inconsciente de Vincent par Marie. Celle-ci va se servir de ses sentiments pour avoir un homme à tout faire. Une reproduction sociale dont elle va peu à peu se défaire, découvrant au-delà du cancre, un p’tit gars épris, la main sur le cœur. Il y a encore, une exposition de la dichotomie entre les constructions sociales et hiérarchiques du monde des adultes et les aspirations utopiques de l’enfance. Si ces constructions sont utilisées par mimétisme, à cet age tendre, toutes notions d’amour véritable, d’amitié sincère et de solidarité ne sont pas encore faussement relégué aux rangs d’utopies. Marie, face à son handicap envahissant, pensent un moment qu’elle peut trouver son salut en abusant de la confiance de Victor, avant de se rendre compte que l’honnêteté du cœur mène plus loin que le mensonge.
Le père (Pascal Elbé) et Victor (Jean-Stan du Pac)
Le cœur en braille est un titre évocateur car, effectivement, Boujenah réussit à décrire ce tâtonnement imperceptible des cœurs, lisant à l’aveugle les sentiments inconnus de l’autre. C’est une belle histoire d’amitié qu’il nous offre et que l’on peut vous conseiller d’aller voir entre Noël et le jour de l’an, histoire de se requinquer des excès festives et peut-être se rappeler que l’on ne voit bien qu’avec le cœur et que l’essentiel est invisible pour les yeux.
Boeringer Rémy
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