Il nous avait tétanisé avec le violent Snowtown et nous avais enthousiasmé avec l'éblouissant Macbeth, Justin Kurzel, cinéaste australien des plus prometteurs, se lance cette fois-ci un défi extraordinairement casse-gueule : faire ses premiers pas à Hollywood et adapter l'une des plus importantes franchises de jeux vidéo, en tentant de conserver sa vision d'auteur indépendant. Si le résultat final peine malheureusement à convaincre le public et la critique, dans l'histoire peu glorieuse des adaptations de licences vidéo-ludiques au cinéma, cela reste tout de même bien au-dessus de la moyenne.
Date de sortie : 21 décembre 2016Réalisation : Justin KurzelGenre : Action, science fictionNationalité : Américain
Soyons honnêtes : il y a du bon et du moins bon dans Assassin's Creed. À commencer par le scénario, dont les concepts science-fictionnesques, une fois passés du jeu vidéo au cinéma, semblent plus proches de la série B que du blockbuster futuriste à la Matrix, dont il emprunte le principe de téléportation dans un monde virtuel. Et c'est sans compter l'aspect « Indiana Jones du pauvre » conspirationniste (autrement dit l'aspect Da Vinci Code) qui donne parfois lieu à des scènes bien farfelues, notamment lors du climax, avec à la clé un artefact ressemblant davantage à une boule de pétanque qu'à une relique sacrée. Pourtant, cette histoire a priori peu subtile regorge d'idées plutôt malignes, comme un début de réflexion sur la violence et la nécessité du libre arbitre, voire une mise en abîme du jeu vidéo et du cinéma. « Rien n'est vrai, tout est permis », balancent en effet plusieurs personnages comme un mantra. D'ailleurs, la phrase en dit long sur l'amoralité assez flippante du film qui, au moins, tranche radicalement avec le manichéisme habituel des grosses productions américaines.
Autre détail scénaristique assez rare pour être mentionné : les séquences se déroulant en Espagne, période de l'inquisition, sont intégralement dialoguées en espagnol et tous les comédiens qui y figurent font l'effort de parler cette langue. Ce qui me fait enchaîner sur le casting, étonnamment classieux, comprenant Michael Fassbender, Arianne Labed, Jeremy Irons, Brendan Gleeson et même Charlotte Rampling ! Tous ces beaux acteurs s'en sortent relativement bien et semblent prendre très au sérieux leur rôle. Marion Cotillard incarne quant à elle une énigmatique scientifique sans cesse confrontée à des dilemmes moraux, qui est sans doute le personnage le mieux écrit et le plus ambiguë du film.
Concernant enfin la mise en scène, il y a là aussi du bon et du moins bon. Dans la lignée des précédentes œuvres de Kurzel, un chef opérateur en roue libre (Adam Arkapaw) s'amuse à sur-esthétiser chaque plan à grand renfort de lens flares, d'épaisses fumées, de ralentis et de philtres en tout genre. On peut ne pas apprécier cette débauche d'effets, mais en ce qui me concerne, malgré quelques abus de numérique, j'ai trouvé le résultat assez harmonieux, avec des tons bleutés pour les scènes se déroulant dans le présent et des teintes orangées pour les impressionnantes séquences d'action en flash-back, qui sont au passage accompagnées d'une bande sonore tout à fait prenante. Problème : la 3D n'a aucun intérêt si ce n'est assombrir l'image et le montage, absolument horrible, fout en l'air le potentiel poseur et contemplatif du réalisateur de Macbeth en sur-découpant systématiquement chaque plan du long-métrage. Les cadres sont enlaidis, illisibles, on n'y comprend rien, c'est gloubi-boulga... Quel gâchis !
Nous avons donc là un blockbuster typique d'auteur broyé par la machine hollywoodienne qui, certes, ne réussit qu'à moitié ce qu'il a tenté d'entreprendre, mais qui a au moins le mérite de divertir et d'avoir essayé quelque chose (quelques pistes de réflexion, une esthétique et des scènes d'action marquantes...), ce qui est déjà pas pas mal du tout. Il n'y a plus qu'à espérer que Justin Kurzel se lance dans un projet plus personnel avant de mettre en scène le second volet de cette possible nouvelle franchise.
Amaury Foucart
Note: ★★★★★
Date de sortie : 21 décembre 2016Réalisation : Justin KurzelGenre : Action, science fictionNationalité : Américain
Grâce à une technologie révolutionnaire qui libère la mémoire génétique, Callum Lynch revit les aventures de son ancêtre Aguilar, dans l’Espagne du XVe siècle. Alors que Callum découvre qu’il est issu d’une mystérieuse société secrète, les Assassins, il va assimiler les compétences dont il aura besoin pour affronter, dans le temps présent, une autre redoutable organisation : l’Ordre des Templiers.
Michael Fassbender
Soyons honnêtes : il y a du bon et du moins bon dans Assassin's Creed. À commencer par le scénario, dont les concepts science-fictionnesques, une fois passés du jeu vidéo au cinéma, semblent plus proches de la série B que du blockbuster futuriste à la Matrix, dont il emprunte le principe de téléportation dans un monde virtuel. Et c'est sans compter l'aspect « Indiana Jones du pauvre » conspirationniste (autrement dit l'aspect Da Vinci Code) qui donne parfois lieu à des scènes bien farfelues, notamment lors du climax, avec à la clé un artefact ressemblant davantage à une boule de pétanque qu'à une relique sacrée. Pourtant, cette histoire a priori peu subtile regorge d'idées plutôt malignes, comme un début de réflexion sur la violence et la nécessité du libre arbitre, voire une mise en abîme du jeu vidéo et du cinéma. « Rien n'est vrai, tout est permis », balancent en effet plusieurs personnages comme un mantra. D'ailleurs, la phrase en dit long sur l'amoralité assez flippante du film qui, au moins, tranche radicalement avec le manichéisme habituel des grosses productions américaines.
Autre détail scénaristique assez rare pour être mentionné : les séquences se déroulant en Espagne, période de l'inquisition, sont intégralement dialoguées en espagnol et tous les comédiens qui y figurent font l'effort de parler cette langue. Ce qui me fait enchaîner sur le casting, étonnamment classieux, comprenant Michael Fassbender, Arianne Labed, Jeremy Irons, Brendan Gleeson et même Charlotte Rampling ! Tous ces beaux acteurs s'en sortent relativement bien et semblent prendre très au sérieux leur rôle. Marion Cotillard incarne quant à elle une énigmatique scientifique sans cesse confrontée à des dilemmes moraux, qui est sans doute le personnage le mieux écrit et le plus ambiguë du film.
Marion Cotillard et Jeremy Irons
Concernant enfin la mise en scène, il y a là aussi du bon et du moins bon. Dans la lignée des précédentes œuvres de Kurzel, un chef opérateur en roue libre (Adam Arkapaw) s'amuse à sur-esthétiser chaque plan à grand renfort de lens flares, d'épaisses fumées, de ralentis et de philtres en tout genre. On peut ne pas apprécier cette débauche d'effets, mais en ce qui me concerne, malgré quelques abus de numérique, j'ai trouvé le résultat assez harmonieux, avec des tons bleutés pour les scènes se déroulant dans le présent et des teintes orangées pour les impressionnantes séquences d'action en flash-back, qui sont au passage accompagnées d'une bande sonore tout à fait prenante. Problème : la 3D n'a aucun intérêt si ce n'est assombrir l'image et le montage, absolument horrible, fout en l'air le potentiel poseur et contemplatif du réalisateur de Macbeth en sur-découpant systématiquement chaque plan du long-métrage. Les cadres sont enlaidis, illisibles, on n'y comprend rien, c'est gloubi-boulga... Quel gâchis !
Nous avons donc là un blockbuster typique d'auteur broyé par la machine hollywoodienne qui, certes, ne réussit qu'à moitié ce qu'il a tenté d'entreprendre, mais qui a au moins le mérite de divertir et d'avoir essayé quelque chose (quelques pistes de réflexion, une esthétique et des scènes d'action marquantes...), ce qui est déjà pas pas mal du tout. Il n'y a plus qu'à espérer que Justin Kurzel se lance dans un projet plus personnel avant de mettre en scène le second volet de cette possible nouvelle franchise.
Amaury Foucart
Note: ★★★★★