Continuons d’explorer la terminologie de Blake Snyder concernant son approche du scénario.
La première partie se trouve ICI
LE SCENARIO SELON BLAKE SNYDER (1)
CONFIDANT
C’est un personnage structurel du genre Out of the bottle. Il croit en la magie ou en la malédiction qui frappe le héros et parfois cette croyance lui sert à atteindre le héros émotionnellement (afin de le blesser).
En quelque sorte, ce qui arrive au héros est trop beau pour être vrai, pense son confident (Confidant).
A lire :
BLAKE SNYDER : OUT OF THE BOTTLE
CRAWL
C’est ce qu’on nomme un carton. C’est-à-dire un texte qui défile à l’écran (de différentes manières)q et qui permet habituellement de faciliter la mise en place du contexte.
C’est précisément un Crawl qu’utilise Star Wars. C’est-à-dire un texte qui dans ce cas précis se déroule vers l’infini.
Le Crawl est important lorsqu’il est nécessaire que le lecteur comprenne le monde de l’histoire.
Afin d’y pouvoir relier les événements qui s’y produisent.
DOUBLE MUMBO JUMBO
Un auteur commence toujours par demander à son lecteur de suspendre son incrédulité le temps de son scénario.
Une suspension que le lecteur accepte bien volontiers. Mais si l’auteur empile les choses, cette trêve va céder.
Par exemple, repris par Snyder, vous ne pourrez amener un lecteur à croire en un scénario où des extraterrestres et des vampires cohabitent dans le même monde.
C’est trop lui demander et c’est dans ce cas que vous faîtes un Double Mumbo Jumbo. Donc à éviter.
EYE OF THE STORM
Spécifique au genre du Dude with a problem, cette astuce narrative consiste à créer un personnage (ami, amie, amant, maîtresse) qui permette au héros, jeté bien malgré lui dans une situation qui le dépasse, de reprendre son souffle, de se poser quelque peu.
Ce personnage est aussi souvent utilisé pour porter la morale de l’histoire. Eye of the Storm se rapproche assez du Confidant analysé plus haut.
A lire :
BLAKE SNYDER : DUDE WITH A PROBLEM
FOOL ASSUMES A NEW NAME
C’est une astuce narrative qui sied bien au genre du Fool Triumphant. La plupart des scénarios qui empruntent ce genre portent sur une imposture.
Le Fool assumes a new name marque alors la transition dans l’acte Deux lorsque le personnage principal devient quelqu’un d’autre.
Comme Michael Dorsey dans Tootsie.
Notez que cette personnalité temporaire peut être voulue ou imposée au personnage.
A lire :
BLAKE SNYDER : LE GENRE DU FOOL TRIUMPHANT
HALF MAN
C’est un composant narratif qui appartient au genre du Monster in the House. Ce Half Man est un personnage qui relate concrètement au héros mais aussi au lecteur ce que c’est que d’avoir affronté ce Monster.
Comme l’écrit Blake Snyder, il en est revenu endommagé de cet affrontement dont il n’est qu’un survivant. Il ignore d’ailleurs pourquoi il est encore en vie. Cela permet de rendre concrète la dangerosité en l’incarnant de la menace que le héros devra affronter.
Le Half Man ajoute indéniablement à la tension. On peut aussi le considérer comme une sorte de mentor qui prévient du danger en instruisant le héros. Quint dans Les dents de la mer lorsqu’il relate à ses compagnons sa mésaventure de l’USS Indianapolis endosse la fonction du Half Man par exemple.
A lire :
BLAKE SNYDER : MONSTER IN THE HOUSE
INSIDER
Insider est un personnage structurel du Fool Triumphant. Il incarne celui qui réalise que l’idiot du village est beaucoup plus sage qu’il ne semble.
Il comprend alors la menace qu’il représente pour son système. Cet Insider va alors tenter de faire taire cet idiot avant que d’autres ne voient aussi en lui une opportunité de faire changer les choses ce qui mènera à l’anéantissement de l’Insider.
Salieri dans Amadeus est un tel Insider.
KILL THE CAT
Kill the Cat est une expression de Blake Snyder pour décrire une scène où le héros accomplit quelque chose de bien. Cette action est destinée à induire chez le lecteur une impression favorable du personnage.
Mais ce n’est pas de la pitié par exemple que l’auteur tente de solliciter chez son lecteur. Ce qu’il recherche, c’est l’empathie envers son héros.
Ce moment peut être le fait d’un personnage actif ou bien passif. Ce type de scène n’entre effectivement pas dans la définition d’un héros qui embarque avec elle un caractère de proactivité.
Benjamin Braddock
Considérons Benjamin Braddock dans Le lauréat. Il est extrêmement passif. Au cours de la séquence d’ouverture (la fête organisé par ses parents pour fêter son diplôme), Benjamin est paralysé par son désir conflictuel d’échapper au zèle un peu trop marqué des amis de ses parents et son obligation de se montrer poli envers eux.
Plus avant dans la séquence, Madame Robinson (l’antagoniste) mène l’action dans sa tentative de séduction de Ben.
Et lui, pourtant protagoniste de cette histoire, est figé par l’indécision et un conflit interne.
Les moments Kill The Cat sont ces moments où Ben répond précisément par une passivité sans aucune expression que ce soit aux exigences plutôt harcelantes des amis de ses parents ou bien lorsqu’il repêche les clefs de la voiture de Madame Robinson dans l’aquarium.
L’empathie du lecteur porte justement sur cette passivité, sur cette souffrance qu’il cache pour rester poli. D’où sa fuite dans sa chambre. Où il sera d’ailleurs rejoint par Madame Robinson (le harcèlement continue en somme mais différemment).
La clef pour comprendre le moment Kill the Cat est de comprendre que l’inactivité ou la passivité d’un personnage consiste en une résistance à une force puissante.
Et que cette résistance demande un gros effort pour ne pas basculer dans la facilité offerte. Elle mène alors à une décision qui fera avancer l’histoire malgré la passivité du personnage.
Et c’est devant l’effort fourni que l’empathie du lecteur peut alors s’installer.
LEARNS TO DO IT WITHOUT THE MAGIC
Cette expression résume presque à elle seule l’acte Trois. Le héros comprend que la capacité, la faculté ou la bravoure qui lui manquait jusqu’à présent pour vaincre son adversaire ou n’importe quelle autre adversité ou encore lui-même était déjà en lui mais bien enfouies.
Ce sont les obstacles et les épreuves au cours de son aventure et même la dynamique interpersonnelle qui lui permettent d’aboutir à cette révélation.
Un peu comme Bruce dans Bruce Tout-Puissant qui découvre qu’il peut faire le bien sans utiliser aucun de ses pouvoirs divins.
Le héros doit choisir de ne pas utiliser des pouvoirs ou des puissances qui ne lui sont qu’accordées temporairement pour apprendre une leçon. Mais ce choix n’est pas facile et sera douloureux.
Avoir appris cette leçon est la condition du dénouement du scénario si l’auteur décide d’user de cet élément narratif.
LEMON SEED
Lemon Seed se réfère à quelque chose qui se produit généralement au point médian du scénario. Pour Snyder, le point médian d’une histoire est un indicateur de l’accélération du rythme.
A partir de ce moment, il y a une précipitation vers la fin de l’histoire comme si l’intrigue obliquait vers une ligne d’arrivée enfin en vue.
Concrètement, la pression sur le héros est très forte. Ce qui a pour effet de le propulser dans l’histoire, de lui donner plus d’élan.
Cette pression peut venir de partout à la fois. Des méchants de votre scénario, bien sûr, mais aussi des alliés du héros ou encore des événements.
Cette pression augmente les enjeux. Et donc la tension dramatique.
Le principe est que toute cette pression initiée au point médian s’accumule de manière à faire jaillir le héros de plain pied dans le climax.
Un exemple de Lemon Seed est l’iceberg dans Titanic. A partir du moment où l’iceberg éventre le Titanic, tout s’accélère. Pour Blake Snyder, même si ce moment ne vous semble pas évident de prime abord, il doit survenir d’une manière ou d’une autre dans le processus d’écriture, que vous en soyez conscient ou non.
MASCOT
C’est un personnage que l’on retrouve assez souvent dans le genre du superhéros. C’est une sorte de subalterne loyal et très humain. Selon la théorie narrative Dramatica, il correspondrait à l’archétype Emotion.
Voir à ce propos :
DRAMATICA : LA THEORIE EXPLIQUEE (6)
C’est un personnage qui envie aussi le héros mais même en tentant de l’imiter, il ne sera jamais lui.
Mascot permet aussi de représenter la différence et l’altérité. Ce sont des notions qui peuvent embellir un scénario en lui donnant une dimension encore plus humaine.
Timon dans Le Roi Lion en est un exemple.
A lire :
BLAKE SNYDER : LE SUPERHEROS
Les autres articles sur cette terminologie du scénario utilisée par Blake Sndyer :
- LE SCENARIO SELON BLAKE SNYDER (1)
- LE SCENARIO SELON BLAKE SNYDER (3)