L'étrangleur de Rillington Place

Un grand merci à Carlotta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « L’étrangleur de Rilligton Place » de Richard Fleischer.

Rillington_Place« Il n’y a rien de mal tant que personne n’est au courant... »

Dans les années quarante à Londres, John Reginald Christie cache derrière une apparence lisse et son métier de policier une véritable démence meurtrière. En une décennie, il viole, tue et cache les corps de plusieurs femmes, sans jamais éveiller le moindre soupçon. Il réussira même à faire accuser un autre homme pour le meurtre de sa femme et de sa fille. Mais après plus de cinq meurtres, les cadavres s'entassent et ne passent plus inaperçus.

« Si c’est pour vous rendre service... »

AttenboroughFils de producteur, Richard Fleischer entame tout d’abord des études de psychologie avant de revenir à ses premières amoures et de travailler dans l’univers des studios de cinéma. D’abord monteur, il gravira rapidement les échelons jusqu’à pouvoir réaliser ses premiers films, au milieu des années 40. Spécialisé d’abord dans la réalisation de films noirs de série B, Fleischer s’émancipe à partir des années 50 et fait valoir son éclectisme. Cet excellent faiseur s’illustre ainsi successivement dans le film d’aventures (« 20 000 lieues sous les mers », « Les vikings »), le péplum (« Barrabas ») ou encore le film de science-fiction (« Le voyage fantastique », « Soleil vert »), ne se laissant jamais enfermer dans une case. Il n’empêche qu’il reste malgré tout un formidable réalisateur de polars et de films noirs. Passionné par les chroniques judiciaires, il réalise ainsi plusieurs films inspiré de faits divers, tels « La fille sur la balançoire » (1955), « Le génie du mal » (1959) et surtout « L’étrangleur de Boston » (1968). En 1971, il ajoute une pierre à ce vertigineux édifice judiciaire avec « L’étrangleur de Rillington Place », inspiré des méfaits du tueur en série anglais John Christie, qui sévit à Londres durant les années 40 et 50, tuant au moins cinq personnes. Une affaire qui fit grand bruit à l’époque en Grande-Bretagne car l’on condamna à tort le mari de l’une des victimes pour meurtre.

« A partir de maintenant, tu m’obéiras »

Rillington_Place_FleischerAvec « L’étrangleur de Rillington Place », Richard Fleischer poursuit son exploration des méandres de l’âme humaine, cherchant à mettre le doigt sur les recoins les plus sombres et les pulsions les plus sauvages qui se cachent en chacun de nous. En cela, John Reginald Christie est probablement le tueur le plus terrifiant de ceux qu’il aura mis en scène. Car l’homme est un manipulateur patenté. Un respectable comptable, ancien policier de réserve pendant la guerre, qui s’exprime d’une voix posé et rassurante. Un être prévenant et doux, d’un abord poli, qui aime faire valoir son érudition dans des domaines aussi variés que les lettres, l’histoire ou la médecine. Mais telle une araignée vénéneuse, lorsque son piège se referme, il se révèle alors un être d’une cruauté et d’une sauvagerie sans limite. Une bête immonde, assoiffée de sang (et de sexe, les deux étant finalement étroitement liés). Une dualité qui fait froid dans le dos. Fleischer s’amuse ainsi à nous mettre dans la confidence d’entrée : jouant de l’apparat de son bel uniforme, John Christie assassine sauvagement sa voisine à qui il venait d’offrir du thé dès la première scène. Dès lors, le spectateur se retrouvera dans une situation très inconfortable, sachant que le pire est irrémédiablement à venir et qu’il ne pourra qu’y assister avec impuissance. Mais plus encore, le film marque par son ambiance particulièrement glauque : la tristesse des rues du quartier populaire de Rillington Place, l’aspect sordide des taudis dans lequel vivent ses habitants. Et puis il y a cette petite famille dont on sait qu’ils deviendront bientôt des proies, avec ce mari mythomane et illettré qui se laisse manipuler par la belle assurance de Christie au détriment de sa famille. Autant d’éléments troublants qui contribuent à créer cette impression de malaise et d’oppression. Mais Fleischer a la bonne idée de donner une dimension politique à son récit. De se servir de l’horreur de son récit pour faire réfléchir ses spectateurs sur les notions de culpabilité et d’erreur judiciaire. D’ailleurs, le film provoquera une véritable prise de conscience lors de sa sortie au Royaume-Uni, relançant un débat qui aboutira à la suppression de la peine de mort. Il faut dire qu’il est incarné par deux acteurs de choix : le frêle débutant John Hurt, qui semble tout droit sorti de l’adolescence fait ici face à un Richard Attenborough magistral et à contre-emploi, génialement inquiétant avec son faux crâne d’œuf. Puissant, dérangeant et terrifiant.

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Le DVD : Le film est présenté dans un nouveau master restauré, en version originale anglaise (1.0) ainsi qu’en version française (1.0). Des sous-titres optionnels français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné par une Préface de Nicolas Saada, par un entretien inédit avec Christophe Gans (« Richard Flesicher, un auteur discret ») (23’), par le module documentaire « Dans la peau de Beryl : Judy Geeson à propos de « L’Étrangleur de Rillington Place »  » (21’) ainsi que par une bande-annonce.

Edité par Carlotta, « L’étrangleur de Rillington Place » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 9 novembre 2016.

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