Un archetype de mechant : la brute

Par William Potillion @scenarmag

Parmi les archétypes de méchant, qu’ils soient antagonistes ou non, il est relativement facile d’identifier la brute.

La brute utilise la force pour menacer. C’est ainsi qu’il se manifeste au monde. Par ailleurs, ignorant ou feignant d’ignorer les conséquences de ses actions, il met souvent en péril la vie d’autrui.

Petit tour d’horizon d’une brute.
Cet archétype de méchant n’y va pas quatre chemins lorsqu’il a quelque chose à accomplir. Il opte toujours pour la manière la plus directe.

Sa manière à lui de résoudre ses conflits

La brute n’est pas passive. Elle agit et réagit comme n’importe quel héros si on peut ainsi la comparer.
Mais contrairement à un héros qui tentera d’évaluer les conséquences de ses actes, la brute utilise la force pour résoudre ses conflits de manière presque naturelle.
Et sans tenir compte des conséquences (si tant est qu’elle en soit consciente).

Quelles que soient les situations, une brute n’hésitera pas à entrer physiquement en conflit pour paradoxalement résoudre son conflit ou pour asseoir ses dires. Et le lieu (église, hôpital, un mariage…) n’influe pas sur son comportement.

Il y a toujours des scènes pittoresques à mettre en place avec une brute. Un des problèmes de cet archétype est qu’il ne supporte pas la contradiction. Dès qu’il y a opposition, il entre dans un débat puissamment conflictuel.

Les liens qui l’unit à d’autres personnages ne protègent pas non plus ces derniers de ses accès de fureur. Bien courageux sont ceux qui s’opposent à lui parmi le cercle de ses amis.
Quant à ses ennemis, il ne cherche ni à les comprendre ni à éprouver une quelconque compassion pour eux.

Un caractère soupe au lait

C’est le moins qu’on puisse dire de lui. C’est un être changeant qui fait montre presque sans prévenir d’une belle agressivité.

Il pourrait d’ailleurs si telle est votre projet de personnage se montrer toujours agressif ou bien retenir son bellicisme  sous un vernis de tranquillité.
Wilson Fisk de Daredevil (décidément, je l’aime ce personnage) est un bel exemple de brute (ou du moins qui s’est vu assigné quelques traits de caractère de cet archétype).

Gardez à l’esprit que de très nombreux personnages de fiction sont des assemblages de traits de personnalité récupérés chez des archétypes comme chez des personnes réelles (historiques ou non) ou bien empruntées à d’autres personnages de fiction.
Cela ne nuit en rien à leur originalité, bien au contraire.

Cette humeur changeante chez la brute peut être montrée par des moments de déprime. En expliquant les raisons de cette morosité (ou en vous les expliquant sans que cela ressorte dans votre scénario), vous ajouterez de la profondeur à ce personnage.

Une destructivité endémique de la brute

Quelle que soit sa disposition, cet archétype est enclin à la destruction. En somme, il casse tout ce qu’il touche. Même dans les circonstances les plus banales.

En conséquence de tout cela, la brute est un personnage isolé. Ses relations sont fondées sur une intense compétition.

De plus, avec un tel archétype, on sait toujours où commence le personnage dans une relation. Les autres personnages ont intuitivement sens des limites qu’il impose par sa seule présence. On ne prend jamais le risque d’aller trop loin avec une brute car l’on sait que l’on ne pourra pas gérer la situation.

Une chose aussi est légitime avec la brute. C’est qu’elle possède un sens aigu de l’ordre social.
Un ordre qu’elle est prête à maintenir par la violence. Cela semble paradoxal mais c’est une des contradictions qui anime cet archétype.

Son passé

Qu’est-ce qui justifie ses actions ? Pourquoi la brute a-t-elle tendance à tout résoudre de manière physique ?

Probablement une enfance difficile. Plus sain d’imaginer qu’elle a du faire face aux dangers immédiats directement que de croire que c’est une graine de violence et qu’elle soit né avec. Tout dépend, cependant, de la profondeur que vous souhaitez donner à ce personnage.

Peut-être que son agressivité est une peur. Ne pouvant mettre suffisamment de distance entre lui et le danger, il s’est alors résolu à l’affronter directement.
Combattant ainsi la peur par la violence.
Un trauma peut être aussi à l’origine de cette peur.

Peut-être, ce personnage a-t-il souffert d’une incompréhension de son entourage. Et qu’il a perdu toute confiance dans la capacité d’autrui à être à son écoute et qu’à cause de ceci, il a rationalisé le fait que de brutaliser les autres n’était pas immoral.

Il ne parvient peut-être pas à donner un sens à sa vie. Il peut se sentir piégé par elle. Des recherches par l’auteur peuvent être faites sur ce sujet qui expliqueraient que la brute s’accorde avec son mal être par usage de la violence, voire même un excès de droiture (la violence s’exprimant alors dans une sorte de terrorisme religieux ou autre).

La colère pourrait être aussi à l’origine de tout ce ressentiment de la brute qu’elle exprime avec autant d’excès. Reste à définir les raisons de la colère.

Failles et défauts de sa personnalité

Concernant son éthique, on peut considérer que la brute est sur le même plan que l’archétype du Héros Intrépide.
Même s’il peut douter parfois sur la portée négative de ses actions, il usera de la force pour obtenir ce qu’il veut.
Ce qui est juste ou injuste, le bien et le mal sont déterminés par ce que le sujet pense ou ressent immédiatement. On peut considérer un déni de principes moraux et que le sujet ne se livre à aucune critique de ses choix.
La brute agit presque instinctivement. Son jugement sur la valeur morale ou immorale d’une action est devenu une habitude. Il ne questionne plus le fondement de cette habitude et son mode d’être centré sur la violence échappe au raisonnement.
Au regard de l’autre, le comportement de la brute peut heurter mais comme l’attitude de la brute est en accord avec ce qu’elle pense ou ressent comme juste, pourquoi remettrait-elle en question ses actions ?
Et c’est justement, cette faiblesse qui permet d’atteindre la brute.

En fin de compte, la brute possède à quelques nuances près les mêmes défauts que le Héros Intrépide.
C’est leur manque de discernement, leurs réactions à fleur de peau qui sont leurs talons d’Achille.

Venom de Spider-Man 3

Le symbiote Venom est une créature extra-terrestre qui prend Peter Parker comme hôte à un moment de la vie de Peter où celui-ci était rongé par la rancune.
Le lien qui se crée entre eux est immédiatement négatif.
Notez que l’on retrouve ce motif avec les Goa’uld, ces parasites extra-terrestres de Stargate SG-1 qui ont jeté leur dévolu sur les êtres humains plus faciles à manipuler.

En somme, la faiblesse de l’humain étant ses passions et émotions, c’est par ce biais qu’on peut les atteindre le plus facilement. Et l’archétype de la brute le sait. C’est d’ailleurs ce qui la fragilise aussi.
Elle peut être blessée de la même façon que ceux qu’elle blesse.

Venom se nourrit de l’agressivité de Peter Parker. Progressivement, celui-ci s’aperçoit que le costume noir (manifestation de Venom dans le monde) occulte son jugement.

Sous l’emprise de Venom, Peter Parker prend des décisions très risquée. Des choix qu’il n’aurait pas suivi autrement.
Cette prise de risque inconsidérée peut être de manière générale utilisée contre une brute. Le héros peut ainsi se servir de cela pour vaincre ce méchant. Il suffit, au long de l’histoire, de laisser quelques indices sur cette tendance pour ensuite la retourner contre la brute au moment du climax si cet archétype est l’antagoniste ou avant s’il est un allié de ce dernier.

Venom est un exemple intéressant pour démontrer que l’agressivité n’est pas innée chez la brute. Elle serait plutôt une projection de notre propre violence que nous ne savons pas contrôler.
On retrouve d’ailleurs ce concept dans Terminator, chez les chasseurs et la meute dans Bambi et même chez les dinosaures de Jurassic Parc.