Structure : une aide a l’inspiration

Par William Potillion @scenarmag

Nous avons déjà abordé maintes fois la problématique de structure. Nous avons éludé l’idée qu’une structure était nuisible à la créativité en présupposant qu’elle ne pouvait lui nuire.

On ne peut par ailleurs sereinement se lancer dans l’écriture d’un scénario en laissant faire quelques personnages que nous en avons en tête. L’inspiration seule ne suffit pas pour écrire une bonne histoire.
Nous ne cherchons pas à dire que cela ne pourrait pas fonctionner. Mais force est de constater que c’est bien souvent une perte de temps pour l’auteur.

A l’origine, la structure en trois actes

L’acte Un met en place le contexte. Nous découvrons ce qui se passe dans l’histoire.
L’acte Deux est l’espace de l’intrigue. C’est en ce lieu que réside la majeure partie de l’action significative qui fait avancer l’histoire.
Et dans l’acte Trois, les choses sont résolues.

Rising Action est l’expression de la montée en puissance de la tension dramatique jusqu’au point où elle ne peut aller plus haut, c’est-à-dire le climax.
Après celui-ci que l’on peut schématiser comme l’ultime confrontation entre le protagoniste et l’antagoniste, tout tend à s’unifier dans le dénouement.

C’est ainsi que l’on peut dire d’une histoire qu’elle est un tout. A la fin de celle-ci, c’est d’une histoire dont on se souvient ; pas vraiment de quelques éléments dramatiques qui en font pourtant partie.

Une durée répartie en trois mouvements

Syd Field a donné comme indication que le second acte où se déploie l’intrigue constituait 50 % du scénario. Les deux autres actes se répartissant entre 25 et 25%.
Cela reste une indication car les actes peuvent être de la longueur qui sied bien à l’histoire. Si votre troisième acte ne remplit que 2 pages et que cela fonctionne, il est inutile de vouloir forcer les choses pour correspondre à certains critères.

Une certitude, cependant : le second acte est le lieu où il se passe le plus de choses. Donc, il ne peut être le plus court.
Dans une comédie romantique, comme il est important pour le genre que nous apprenions à connaître le héros de l’histoire pour qu’on s’accroche à sa romance, le premier acte peut s’étendre tant que l’auteur n’est pas satisfait avec l’introduction d’un personnage.
Parce que l’intrigue en dépend. Et celle-ci pourrait alors être d’égale longueur avec l’acte Un.

C’est donc l’ordre des événements qui importe et non la proportion de chaque acte.
De nombreux gourous (et des moins gourous) de l’art scénaristique ont élaboré cependant toutes sortes de points intermédiaires à inclure tout au long de l’histoire.
Nœuds dramatiques, articulations… sont alors venus compléter une définition un peu vague de la structure en trois actes.

Subdivision de la structure

Chaque acte est découpé en moments majeurs qui ne peuvent se produire que dans un acte et un ordre précis. Ces moments décrivent le voyage physique et émotionnel du protagoniste.

Ce sont autant de jalons qu’il doit parcourir tout au long de l’histoire. Cette façon de voir les choses (cette technique, pourrait-on dire) a un côté pratique.
Avant le processus d’écriture, il peut être utile d’imaginer ces différentes étapes et les états par lesquels passera votre héros ou votre héroïne. Vous aurez ainsi en quelque sorte cartographier la trajectoire de votre personnage principal tout au long du scénario.

Et ne vous souciez pas de manquer d’originalité. Ne pensez pas qu’une structure vous empêchera d’être inventif. La plupart des histoires partagent la même structure. Mais leurs intrigues respectives les différencient.
Ce n’est pas parce qu’elles sont bâties dans le même moule que toutes les intrigues se ressemblent.

 L’accroche

L’accroche est un événement qui va impliquer votre lecteur dans l’histoire. A la fin de cette accroche, votre lecteur veut en savoir davantage.

Sur ce sujet :

  • L’ACCROCHE ULTIME : LES PERSONNAGES
  • L’ACCROCHE ET LE CŒUR
  • L’ACCROCHE
Le passé du personnage

Cela permet d’introduire votre héros et sa situation actuelle. Le passé d’un personnage est important (qu’il soit le héros ou non) parce que cela concerne non seulement l’intrigue mais aussi toute l’histoire.

A lire sur le passé des personnages :

  • UN EXERCICE SUR LE PASSE
  • EXPOSEZ LE PASSE DES PERSONNAGES
L’incident déclencheur

C’est un événement important dans la vie du protagoniste. Quelque chose va se produire qui va venir bouleverser son quotidien et l’inciter à prendre part à une aventure.
Mais le héros ou l’héroïne nient dans un premier temps cet appel à vivre quelque chose de totalement nouveau pour eux.

Ce n’est qu’après quelques hésitations et parfois à corps défendant que le personnage principal prend alors son problème à bras le corps. C’est aussi dans la foulée de ces quelques pérégrinations préalables que la faille du héros va se rappeler à lui et le mener en quelque sorte à une crise morale.

L’incident déclencheur est véritablement un élément propulseur du héros dans l’intrigue.

Pour en savoir plus :
L’INCIDENT DECLENCHEUR

La crise morale

C’est la démonstration que la faiblesse du héros joue contre lui. Même si au début de l’intrigue, le protagoniste emporte quelques victoires sur l’adversité dans laquelle il est plongé (c’est un nouveau monde pour lui que de s’engager dans l’aventure), il n’en reste pas moins que ces victoires ne seront pas significatives d’une avancée réelle vers la transformation de sa personnalité.

L’arc dramatique d’un personnage consiste à faire de lui un être meilleur à la fin de l’histoire. Tant qu’il n’aura pas surmonté cette crise morale, c’est-à-dire tant qu’il n’aura pas intégré ce qui l’empêche de s’accomplir pleinement, il ne sera toujours qu’un être en devenir.

A lire :

  • DAVID TROTTIER : LES 10 CLEFS D’UN PERSONNAGE (1)
  • DAVID TROTTIER : LES 10 CLEFS D’UN PERSONNAGE (2)
La lutte

Les épreuves sont de plus en plus intenses. C’est à travers la lutte du héros pour mener à bien son objectif que la pression de la tension dramatique est de plus en plus forte jusqu’au point de rupture que l’on assimile au climax.

La lutte est aussi marquée par une désespérance qui s’accumule alors que les revers sont de plus en plus incisifs. Cela mène le héros à un moment de sa vie que d’aucuns ont nommés le All is Lost car à ce moment de l’histoire, tout semble perdu.

L’obtention de l’objectif n’a jamais été aussi incertaine. Le personnage est vraiment au plus bas. Mais cette crise personnelle (qui peut être partagée par d’autres personnages de son environnement) est comme une incitation à trouver en lui la force nécessaire pour continuer.

La révélation

Le héros prend conscience de sa faille.
Et la décision qu’il va prendre est le premier pas vers une sorte de rédemption (si telle est l’intention de l’auteur).

Cette faille dans la personnalité du personnage est cruciale dans sa définition. Dites-vous qu’il y a toujours un être humain derrière le phénomène.

A voir à ce sujet :

  • TRUBY : FAIBLESSE & BESOIN
  • PETER RUSSEL : EVOLUTION DU PERSONNAGE
  • PETER RUSSEL & L’ARC DRAMATIQUE
  • LE PARCOURS INTERIEUR DU PERSONNAGE
L’élaboration du plan

Fort de cette nouvelle conscience de lui-même, le protagoniste peut maintenant élaborer un plan pour un combat ultime contre son antagonisme.

Après avoir exposé les points de vue du protagoniste et de l’antagoniste, l’auteur se prépare à donner sa vision personnelle de la question qu’il a posée en écrivant son histoire.
Un auteur ne fait pas de propagande, mais il a un message à communiquer. Ce plan qu’il veut faire mettre en œuvre par son héros est un moyen pour lui d’exprimer sa pensée, de donner une réponse à la problématique qu’il a soulevée (son thème).

Le plan est une étape structurelle importante de l’intrigue. Il concerne non seulement l’action mais il est aussi le moyen qu’a choisi l’auteur pour asseoir sa pensée auprès du lecteur. Une pensée qui s’affichera pleinement lors du dénouement alors que le héros aura retrouvé un quotidien dont il avait été arraché.
Mais il ne sera plus le même. Quelque chose en lui a changé comme s’il s’était éveillé et porte désormais un regard nouveau sur le monde.

C’est en ce regard que l’auteur tente de communiquer une éthique. Et qu’il tente, tout comme pour son héros, d’éveiller chez son lecteur une vérité.

Le climax

C’est l’ultime confrontation contre l’antagoniste. Le sens de justice dont a besoin le lecteur s’exprime par la défaite du méchant de l’histoire.
Bien que l’antagoniste soit déterminé à connaître sa perte, il est bon cependant de transcender cette fonction (ou essence) du personnage pour en faire un être un peu plus complexe que cette simple apparence.

L’auteur devrait penser son antagoniste avec autant de soin qu’il apporte à l’élaboration de son personnage principal.
Gardez en mémoire que si l’antagonisme est une entité (comme la nature, par exemple, ou encore la société elle-même), il est bon d’incarner cette entité.

Le climax pourrait aussi illustrer la mort du héros. Mais à moins qu’il ne s’agisse d’une tragédie, même la mort peut être considérée comme une étape préalable au bonheur (comme Lester Burnham dans American Beauty dont le sourire énigmatique dans la mort est le symbole de sa foi en la vie).

Le dénouement

Au-delà de la résolution de l’intrigue et de l’histoire, le dénouement est la preuve du message qu’à tenter de faire passer l’auteur. C’est aussi l’illustration du monde ordinaire après le retour du héros.