Nouveau beau challenge que ce film, premier film américain en langue anglaise pour le réalisateur chilien Pablo Larrain auquel on doit quelques petites pépites comme "Tony Manero" (2008), "Post Mortem" (2010), "No" (2012), "El Club" (2015) et dernièrement "Neruda" (2016). Jusqu'ici très ancré dans des sujets qui touchent de près l'Histoire de son pays il s'attaque ici à un pan d'autant plus icônique dans l'Histoire américaine et, par ricichet, à l'Histoire contemporaine mondiale. Le projet est à l'origine un scénario de Noah Oppenheim (scénariste qui oeuvra en attendant sur des films alimentaires comme "Le Labyrinthe" en 2014 de Wes Ball et "Divergente 3 : au-delà du mur" en 2016 de Robert Schwentk) qui a été placé dans la célèbre Blacklist 2010. Il devait être tourné par Darren Aronofsky avec Rachel Weisz dans le rôle titre. Aronofsky reste producteur malgré tout sur ce film qui retrace les instants et les quelques jours de Jackie Kennedy après l'assassinat de son mari, John Fitzgerald Kennedy alors Président des Etats-Unis, le 22 novembre 1963 à Dallas...
La première Dame est incarnée par Natalie Portman, qui est absolument magnifique et offre une performance parmi les 2-3 meilleures de sa déjà longue carrière. Elle est Jackie sans aucun doute et reste un atout majeur de ce film. A ses côtés un très joli casting, outre les petits rôles joués par Greta Gerwig, John Carrol Lynch, Richard E. Grant et surtout John Hurt (mort très récemment) les deux rôles qui s'imposent restent Bobby Kennedy interprétés par le toujours juste Peter Sarsgaard et le trop rare Billy Crudup dans le rôle clé du journaliste Theodore H. White, auteur en 1962 du livre "La Victoire de Kennedy ou Comment on fait un Président" lauréat du Prix Pulitzer à qui Jackie Kennedy avait demandé juste après l'attentat d'écrire un article pour Life Magazine d'après leur entretien... Entretien qui sert de fil conducteur au film et au scénario. Au fil de l'entretien on revient par flash-backs plus ou moins courts sur les évènements terribles et ses coulisses des jours précédents. Jackie Kennedy construit là sa propre légende.
C'est là toute la force du film, est-ce conscient ou non de la part de Jackie ?! A la fois brisée par la tragédie et à la fois plus forte que jamais elle poursuit son rôle où la frontière entre dignité et ambition personnelle semble parfois floue. Sans jamais dévier vers diverses suppositions le récit s'attache seulement à comment la première Dame a pu et a su gérer l'après immédiat qui a suivi la mort de son époux. Le tout enveloppé dans une musique signée de Mica Levi, jeune compositrice qui n'avait jusque là travaillée que sur un seul film, "Under the Skin" (2014) de Jonathan Glazer. Elle signe une musique envoûtante, presque malsaine, flirtant entre l'oraison funèbre et le solennel pompeux avec une pointe d'angoisse. A côté de ça la reconstitution des évènements est éblouissante de précision et d'incarnation. Esthétiquement c'est hypnotisant. Pablo Larrain réussit haut la main son passage à l'international et passe certainement un cap dans sa carrière avec ce film maitrisé de bout en bout.
Note :