[Berlinale 2017] “Pokot” d’Agnieszka Holland

Par Boustoune

Avec Pokot, Agnieszka Holland invente un nouveau genre cinématographique, le polar écologiste.

L’intrigue se déroule dans un petit village à la frontière entre la Pologne et la République Tchèque, une zone de montagnes et de forêts qui serait parfaite pour le calme et le recueillement si elle n’était perturbée par les bruits de coups de fusils des chasseurs, nombreux à traquer le gibier…
Duszejko (Agnieszka Mandat) ne les supporte plus. Quand elle n’enseigne pas l’anglais aux enfants du village, elle fait tout ce qu’elle peut pour décourager les brutes épaisses qui, saison après saison, massacrent la faune locale sans pitié ni remords, juste pour le plaisir. Hélas, ses protestations ne servent pas à grand chose. Au mieux la considère-t-on comme une vieille dame un peu timbrée…
Un soir, le voisin de Duszejko, un braconnier notoire, est retrouvé mort à son domicile, étouffé par un morceau d’os au fond de la gorge. La police conclut à une mort naturelle, faute de preuves, les seules traces retrouvées près du chalet de la victime étant des empreintes animales.
Puis c’est au tour du chef de la police d’être retrouvé mort, sous un épais manteau neigeux, le crâne écrabouillé. Là encore les seules traces trouvées autour du cadavre sont des empreintes animales…
Quand les disparitions s’enchaînent selon la même logique, Duszejko finit par se demander si un tueur en série ne sévirait pas dans les environs, à moins que les animaux n’aient décidé eux-mêmes de se venger des outrages infligés par les hommes…

Cette trame de polar est plutôt efficace, en dépit de son rythme, assez lent, et de ses nombreuses digressions narratives, mais elle sert surtout de vecteur à la cinéaste polonaise pour faire passer un message écologiste fort, défendant la cause animale, encourageant la biodiversité et fustigeant l’exploitation massive des ressources naturelles de notre planète.
Au-delà de ce message écologiste militant, le film délivre aussi d’autres messages politiques plus généraux. La cinéaste ne cherche pas seulement à sensibiliser son public à la préservation de l’environnement, elle veut également réveiller les consciences, endormies depuis la chute du régime communiste, étouffées par la société de consommation et la nouvelle économie. Elle souhaite réveiller le nécessaire instinct de révolte contre la corruption, l’immobilisme de l’administration, le machisme ambiant, ou la religion, qui abuse de la foi des individus pour leur imposer des dogmes absurdes.

Il est probable que ce côté rentre-dedans ne plaira pas à tout le monde, pas plus que sa construction étrange, flirtant avec la comédie, le fantastique et le drame criminel. De notre côté, nous avons été séduits par le ton atypique de ce drôle de polar polak, aussi vert que noir.