De: Denis Villeneuve.
Avec: Jake Gyllenhaal ( Demolition, Night Call), Hugh Jackman ( Wolverine, Australia), Paul Dano ( Little Miss Sunshine, Elle s’appelait Ruby) , Melissa Leo ( Fighter, Snowden), Terrence Howard ( Empire, Collision), Regina King ( The Leftovers, American Crime).
Synopsis: Dans la banlieue de Boston, deux fillettes de 6 ans, Anna et Joy, ont disparu. Le détective Loki privilégie la thèse du kidnapping suite au témoignage de Keller, le père d’Anna. Le suspect numéro 1 est rapidement arrêté mais est relâché quelques jours plus tard faute de preuve, entrainant la fureur de Keller. Aveuglé par sa douleur, le père dévasté se lance alors dans une course contre la montre pour retrouver les enfants disparus. De son côté, Loki essaie de trouver des indices pour arrêter le coupable avant que Keller ne commette l’irréparable… Les jours passent et les chances de retrouver les fillettes s’amenuisent…
* * *
Film que je voulais voir depuis très très longtemps. Soit depuis l’année de sa sortie en 2013. Je ne sais pas vraiment pourquoi il est passé entre les mailles du filet. Bon, faut dire que je ne vais plus au cinéma. Et que pour ne rien arranger, j’ai mis de côté les films au profit des séries.
Ces dernières me paraissant moins formatées plus originales et souvent mieux travaillées. Le souci dans ma démarche c’est de passer à côté de pépites comme l’est assurément Prisoners à l’instar de Brooklyn ou encore de Spotlight. Parce qu’on a beau dire: » J’ai envie de voir tel film »; ben ça s’entasse dans notre tête et le temps passe. Enfin, c’est généralement ce qui se passe pour moi.
J’aime en tout cas ce cinéma qui a encore quelque chose à dire, à raconter. Qui prend les armes, qui s’indigne et qui dénonce. Bravant parfois les interdits comme les facilités et les faiblesses. Qui nous touche; qui nous fait oublier pendant quelques heures qui on est ou au contraire nous le rappelle.
Prisoners m’a rappelé pourquoi j’aime le cinéma, son excellence. Et plus encore, pourquoi je tiens un blog s’appelant Emmènemoiaucinema. Ce film m’a donné envie de me relancer dans la bataille de l’excellence. De mettre la barre un peu plus haute pour retrouver le cinéma d’antan. Celui qui nous fait rêver, rire et aimer et même, pleurer. Celui qui te laisse transpirante et collée à ton siège pendant deux heures et trente-trois minutes. Heures que tu ne vois pas passer d’un Mississippi.
Tout ça pour une histoire de course poursuite et d’un sifflet orange. Ou que sais-je d’une communauté américaine qui n’a rien vu venir. Qui a peut-être laissé faire et s’est laissé faire. Tout le monde a lâché l’équipe même ceux qui était censé représenter un semblant d’ordre et de justice. L’horreur ce n’est pas tant l’overdose de sang ni les batailles c’est celle de ne pas connaître aussi bien ses voisins qu’on le croyait.
C’est Denis Villeneuve filmant en plan rapproché une caravane dont les feux stop ressemble à s’y méprendre aux yeux du diable. Ou à son sourire. A côté d’arbres dépouillés, de la grisaille de l’hiver. L’œil du mal dérange assurément.
C’est aussi savoir raconter de A à Z son histoire, d’aller au bout. Distillé au fil de son film tel le Petit Poucet des indices mais sans pour autant tout dire tout montrer. Au spectateur de jouer les détectives si le cœur lui en dit. S’il n’est pas trop plongé dans le film pour avoir envie d’avoir toutes les réponses, tous les tenants aboutissants. Juste regarder vraiment. Se laisser emporter par la magie.
C’est sans nul doute savoir interpréter aussi. C’est tellement bon que l’ironie n’en est que plus cruelle. A commencer par ce père ultra croyant, parano et ultra protecteur qui voit sa vie s’écrouler. Et plus encore, sa foi mise en danger ou tout du moins remise en question. C’est aussi un flic qui a toujours résolu toutes ses affaires mais à quel prix? Pour lui comme pour les victimes. Et, Paul Dano toujours à la limite tout en dualité.
Et ce titre, Prisoners. Quoi en penser? Quoi en dire? Qui sont vraiment les prisonniers de cette histoire si on y réfléchit? Ceux qui sont libres ou ceux enfermés? Dans une Amérique sans cesse en contradiction dans ses actes comme ses paroles. Prêchant la Bible d’un côté; et de l’autre, appuyant sur la détente. De qui est-on vraiment prisonnier si ce n’est de nous-même. De l’identité qu’on s’est construite au fil de notre propre histoire; des événements qui l’ont rythmées. Si ce n’est enfin de notre propre éducation.