L'ambiance devient pesante en ce moment ? Fatigué des discussions stériles ? Vous avez envie de changer d'air ? Heureusement pour vous, La Jeune Fille et son Aigle est toujours en salle. Et il est grand temps de courir le voir si ce n'est pas déjà fait ! Ce documentaire concocté par Otto Bell suit Aisholpan, jeune Kazakhe de Mongolie déterminée à devenir la première chasseuse à l'aigle de son pays. Pour ce faire, elle peut compter sur son père, Agalai, qui lui enseigne les secrets de ses ancêtres, et sur le reste de sa famille qui l'encourage dans cette voie singulière. Aisholpan apprend à côtoyer et dresser l'aigle royal de son père jusqu'au jour où il lui faut à son tour capturer celui qui sera désormais le sien. Les choses sérieuses commencent : il faut appréhender et éduquer l'aiglon de trois mois qui restera son compagnon pour sept ans avant qu'elle le relâche dans la nature. Avec lui, Aisholpan espère participer au Festival annuel des aigles à Ölgiy, le grand rassemblement de tous les chasseurs de la région. Mais, au loin, se profile déjà une ultime et bien plus complexe épreuve. Aisholpan sera-t-elle capable de chasser cet hiver dans les montagnes de l'Altaï ? Pour cela, il lui faudra braver les neiges et les difficultés si elle veut rapporter son premier renard et gagner le respect des anciens... Otto Bell livre un magnifique documentaire sur les berkutchis et cet art millénaire de la chasse à l'aigle, pratiqué par les Kazakhs et les Kirghizes de Mongolie. Vous vous en doutez, les images sont magnifiques : somptueuses prises de vues de la steppe au printemps et sous la neige, ralentis sur de majestueux rapaces et chronique de la vie de nomade. La Jeune Fille et son Aigle est un film aussi puissant que sa genèse est folle. Lorsque Otto Belle tombe sur un reportage photo réalisé par Asher Svidensky, et relayé par la BBC, il saute presque immédiatement dans un avion pour gagner la Mongolie et rencontrer Aisholpan. Il décide de réaliser un documentaire sur cette jeune fille et son incroyable héritage avec moins de 100 000$ de budget, une équipe de quatre personnes, 700 kilos de matériel, que l'hiver n'a pas hésité à molester, et un pittoresque UAZ-452.
Notons également que le film reçoit le parrainage tardif mais salutaire de Morgan Spurlock -souvenez-vous Super Size Me, c'était lui- dans les rangs de la production. Si vous êtes curieux de connaître les coulisses de ce tournage hors normes, sachez qu'Otto Bell s'est confié au site No Film School dans une interview fort intéressante. Grâce à cet acharnement La Jeune Fille et son Aigle est parvenu jusque sur nos écrans. Et quel plaisir de découvrir cette histoire qui nous exhorte au culot et à la bravoure ! Sous le prétexte d'un documentaire scénarisé, entre conte et récit initiatique, La Jeune Fille et son Aigle nous interroge sur tellement d'autres sujets. A travers le parcours d'Aisholpan se construit assez subtilement un discours féministe. Sans avoir besoin d'entrer dans de grandes démonstrations, le documentaire illustre une égalité homme-femme qui se construit au regard d'un même amour d'une tradition, celle de la chasse à l'aigle. Tradition que nous serions tentés de juger barbare mais qui s'accompagne d'une philosophie bienveillante à l'égard de la nature. Les berkutchis sont conscients de l'interdépendance de l'homme et de la nature. C'est pourquoi après sept ans de bons et loyaux services, l'aigle est relâché pour recouvrer la vie sauvage et ainsi perpétuer le cycle de la vie. Des leçons dont nos sociétés gagneraient à s'inspirer pour donner à chacun les mêmes chances, en dépit du sexe, des origines et aspirations, et pour ne pas prélever davantage que ce que la nature peut reconstituer. Pour parvenir à ces observations, nul besoin d'en passer par un discours culpabilisant ou démonstratif, il vous suffit de vous laisser porter par l'histoire d'Aisholpan et des siens. Alors, n'hésitez plus, courez découvrir ce très beau documentaire qui saura certainement vous émouvoir.