Avec Mathieu Amalric, Marion Cotillard, Charlotte Gainsbourg
Chronique : Arnaud Desplechin pratique un cinéma déroutant. Loin du réel dans son approche artistique, mais touchant une certaine vérité lorsqu’on s’intéresse aux personnages.
Son cinéma est déroutant car il demande aux acteurs de résister à tout naturalisme et s’évertue à détourner les codes narratifs usuels.
Les Fantômes d’Ismaël exprime parfaitement ce paradoxe. Le film est empreint d’une forte théâtralité mais repose sur un trio d’acteurs en parfaite alchimie.
On a beau se dire en permanence que personne ne parle comme ça, personne ne s’engueule comme ça, ne fait l’amour comme ça, ne réagit comme ça, on y croit pourtant fermement à ce triangle artistique et amoureux.
Malgré des dialogues surécrits (mais magnifiques), c’est un grand film d’acteurs, étrangement complèmentaires. Le surjeu d’Amalric trouve un écho formidable dans les sourires timides de Charlotte Gainsbourg et les mystères capricieux de Marion Cotillard. Les regards, évidents, qu’échangent les deux actrices sont à eux seuls de grands moments de cinéma.
Les fantômes d’Ismaël est intéressant dans sa façon d’aborder le processus créatif, mais vaut surtout pour la confusion des êtres et le trouble que le retour de Carlotta provoque.
La partie contée, fantasmée même, du film dans le film sur la vie d’agent du frère d’Ismaël est elle confuse et erratique. Elle n’a surtout pas beaucoup d’intérêt lorsqu’elle envahit l’écran, malgré le sympathique cabotinage de Louis Garrel, et semble indiquer une légère perte de contrôle de Desplechin sur son film et sa chronologie, que certaines scènes d’hystérie de la part d’Ismaël tendent à confirmer.
Malgré tout, Les Fantômes d’Ismaël conservent suffisamment de mystère, de singularité, d’incongruité même pour intriguer et intéresser. Ses acteurs eux, fascinent.
Synopsis : À la veille du tournage de son nouveau film, la vie d’un cinéaste est chamboulée par la réapparition d’un amour disparu…