Pour clôturer sa trilogie du " Mal ", incluant les portraits du Général Amin Dada et de l'avocat Jacques Vergès, le réalisateur Barbet Schroeder voyage en Birmanie pour ausculter la progression latente vers une banalité du mal dû à un moine bouddhiste réputé pour ses discours islamophobes. Un portrait glaçant sur les failles d'une humanité qui a peur.
Times Magazine l'a appelé " Le visage de la terreur boudhiste " : Wirathu, ce leader politique et idole religieuse d'un peuple terrifié par des faits divers rappelés éternellement pour appuyer une rhétorique vaseuse mais efficace pour endoctriner. Ainsi, tel un président américain récent se faisant élire en profitant en partie de récents attentats ou tel un chancelier allemand qui grossissait les traits pour perpétuer un génocide, ce moine bouddhiste va bâtir son règne en introduisant un mal indicible et c'est cela qui va intéresser Barbet Schroeder pour son film.
Racontée à travers des entretiens, narré en partie avec les éloges auto-proclamés par ce leader mégalomane, cette étude du Mal glace le sang en montrant par un montage simple et didactique à quel point il est si facile de fonder et conditionner un mouvement. Laissant le spectateur juger par lui-même ce qu'il se passe à l'écran, Schroeder ne fait aucune concession dans ce qu'il est de monter une violence quotidienne et tournant en boucle dans chacun des camps. Une boucle où l'on commencerait par un fait-divers pour déboucher sur une parole crasse mais dit élégamment profanant une religion sacrée accompagnée de clips de propagandes grotesques mais apparemment efficace si elle a su conquérir un peuple pour finir sur des batailles génocidaires à glacer le sang. Un fléau terrible mais que le film mentionne comme étant présent partout dans le monde comme une histoire tournant sans cesse en rond.
Ce documentaire effraie en prouvant cette simplicité du Mal à se glisser dans une communauté renfermée sur elle-même. Un mal issu des dérives du populisme qui si on ne fait pas suffisamment gaffe peut arriver très vite n'importe où comme un virus.
Victor Van De Kadsye