Vous le savez peut-être, le site Goodreads permet aux lecteurs d’échanger avec certains de leurs auteurs favoris. C’est ainsi que Dennis Lehane a expliqué à l’un de ses admirateurs comment il conçoit les deux types d’écriture dans lesquelles il s’est illustré (avec brio).
Vous connaissez forcément Dennis Lehane, l’un des meilleurs auteurs de polars de sa génération, sinon je vous recommande vivement de vous plonger dans ses oeuvres, dont les plus connues, Mystic River (celle que je préfére), Gone baby gone et Shutter Island ont été respectivement portées à l’écran par Clint Eastwood, Ben Affleck et Martin Scorsese. Ce n’est pas le célèbre romancier qui en a signé les adaptations, mais il s’est essayé au métier de scénariste sur les séries Boardwalk Empire et The Wire.
Voici donc ce qu’il répond à l’un de ses lecteurs, qui lui demande quelles sont les différences entre écriture de roman et de scénario:
Il y a les pommes et les girafes. Ces deux disciplines sont totalement différentes, même si elles partagent un même ADN narratif. Quand vous écrivez un roman, vous êtes Dieu, en charge de tout l’univers, de la plus lointaine galaxie au plus petit caillou. Quand ce livre est publié, tout ce qu’il contient est filtré à travers vous et vous seul ( avec quelques interventions et conseils de votre éditeur, bien entendu). Quand vous écrivez un scénario, vous êtes comme un peintre en bâtiment, qui travaille dans une immense maison. Vous donnez aux pièces leurs couleurs mais vous ne bâtissez pas la maison, et ne vous souciez pas de sa plomberie. Le scénariste est, disons, l’une des cent quarante personnes qui contribuent au film. Et votre scénario est juste un schéma qui sera interprété par le réalisateur, les acteurs, le directeur de la photographie, les décorateurs, costumiers, le monteur, les producteurs, les exécutifs des studios et ainsi de suite. Il est bien plus difficile d’être Dieu; les romans sont bien plus longs à écrire que les scénarios, et ils sont bien plus usants, émotionnellement et psychologiquement parlant, mais ils sont aussi – et de loin-, plus épanouissants.
Je vous recommande la lecture de ces deux interviewes de Dennis Lehane, l’une publiée dans les colonnes de l’Express, l’autre dans celles du Globe and Mail, puis de vous (re)plonger dans ces puissantes oeuvres:
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