Les proies – 13/20

Par Taibbo

De Sofia Coppola
Avec Colin Farrell, Nicole Kidman, Kirsten Dunst

Chronique : Cinéaste du spleen adolescent et de l’ennui glamour, Sofia Coppola a toujours imprégné ses films d’une langueur chic, une apparente désinvolture qui révèle habilement une vision toujours très juste des affres de la jeunesse.
Les Proies est la seconde incursion de la réalisatrice dans le film historique, après le très sous-estimé Marie-Antoinette. Mais elle ne pouvait pas plus s’éloigner de la légèreté et de l’énergie pop qui parcourait le biopic royal. Son nouveau film est bercé d’une douce mélancolie, se drape d’une photographie brumeuse et inquiétante. L’esthétique sombre et vaporeuse des Proies lui confère une atmosphère particulière, propre aux tensions anxiogènes et charnelles.
La musique planante, les jeux de lumières, que ce soit les rayons du soleil à travers les nuages ou les flammes d’une bougie autour d’un piano, tout de cette mise en scène chiadée et éthérée cherche à créer le trouble et à insuffler un désir latent chez ces femmes tourmentés par cette présence masculine inattendue.
Mais si les Proies se démarque des autres films de Coppola, c’est par le fait que la routine des jeunes femmes habitant la pension vole très rapidement en éclat avec l’arrivée du soldat yankee. Leur quotidien est bouleversé et leurs relations évoluent en conséquence, toutes se positionnant en fonction de l’intrus. Malheureusement, le scénario reste longtemps bien sage, se contentant de se reposer sur la très belle scénographie d’ensemble et quelques répliques bien senties, jouant sur l’ironie et le cynisme et pouvant même laisser affleurer un certain humour. Mais les enjeux, pourtant forts, sont affadis par une certaine apathie, du moins jusqu’à un événement déterminant qui va bousculer cet état un poil léthargique. Trop tard malheureusement.
Ceci dit, outre l’élégance et la minutie de la mise en scène, Les Proies peut compter sur des actrices étincelantes, Kidman et Fanning en tête. Elles sont chacune à leur manière une réponse fantasmée ou pragmatique à la présence du colonel blessé et leurs interactions sont le sel du récit. On regrette alors que la réalisatrice n’ait pas poussé plus loin ce jeu feutré.
Sans doute s’agit-il du film de Sofia Coppola le moins incarné, le moins sensible et on regrettera un traitement un peu superficiel, mais Les Proies s’avère être l’une de ses réalisations les plus abouties visuellement.

Synopsis : En pleine guerre de Sécession, dans le Sud profond, les pensionnaires d’un internat de jeunes filles recueillent un soldat blessé du camp adverse. Alors qu’elles lui offrent refuge et pansent ses plaies, l’atmosphère se charge de tensions sexuelles et de dangereuses rivalités éclatent. Jusqu’à ce que des événements inattendus ne fassent voler en éclats interdits et tabous.