5ème long métrage pour le réalisateur Andrey Zvyagintsev qui est devenu en peu de film l'un des plus grands cinéastes russes après des films tous primés dans divers festivals avec "Le Retour" (2003), "Le Bannissement" (2008), "Elena" (2012) et surtout "Leviathan" (2014) qui a obtenu le Prix du meilleur Scénario au Festival de Cannes). Depuis longtemps le cinéaste avait l'idée d'une couple en crise avec son scénariste habituel Oleg Negin, le projet fit un grand pas en avant quand ils ont entendu parler de l'association "Liza Alerte", qui aide et assiste à la recherche des personnes disparues... Si ce n'est pas un huis clos le réalisateur se focalise néanmoins sur deux personnages, les parents joués par Alexey Rozin (déjà dans les deux précédents films du réalisateurs) et la révélation Maryana Spivak. L'enfant disparait très vite et les seconds rôles restent finalement assez accessoires.
Par contre, dans ses seconds rôles on remarque que les nouveaux conjoints ont une position entre deux chaises qui va avec la forme et le fond choisi par Andrey Zvyagintsev. En effet, le réalisateur place en parallèle l'absence d'amour dans le couple originel vis à vis du réveil sexuel avec leurs nouveaux partenaires. Simple et facile sur le fond, et qui donne plusieurs scènes plus ou moins intimes dont l'utilité et/ou la gratuité peut laisser perplexe. Mais on peut aussi s'interroger sur quelques passages particulièrement longs qui semblent presque hors sujet comme le nouveau conjoint qui parle avec sa fille sur Skype. Ces parties "néo-conjugales" sont les moins intéressantes du film et malheureusement elles prennent une partie importantes du film. Par contre on apprécie largement plus les parties où les deux parents se côtoient par obligation, et notamment avec leurs rapports envers leur enfant disparu. Le titre, "Faute d'Amour" prend alors toute son ampleur.
Ces parents sont d'un milieu social correct et ne manquent de rien, mais leur quotidien semble usé par un individualisme forcené surtout symbolisé par le patron de monsieur qui impose au travail des règles pour le moins surprenantes. Dans un style particulièrement austère et clinique Zvyagintsev signe un drame amer et cynique, glacial et pessimiste qui montre surtout une humanité en perdition. Le cinéaste rejoint par bien des points ses homologues, la critique sociale de Cristian Mungiu ("Baccalauréat" en 2016), le climax contemplatif de Nuri Bilge Ceylan ("Winter Sleep" en 2014) ou encore le style clinique d'un Michael Haneke ("Amour" en 2012). Andrey Zvyagintsev est assurément un grand réalisateur qui offre quelques séquences de grande tenue. On apprécie le contraste métropôle/forêt, quelques plans "intimes" savamment cadrés et surtout un travelling fort en émotion d'un enfant en pleur au début du film. Finalement on regrette que le cinéaste ait pris un peu trop de facilités en ce qui concerne les "nouvelles vies" des parents et qu'il allonge parfois trop certains passages mais il contre-balance avec un récit terriblement glaçant et une critique acerbe du monde des adultes.
Note :