Un couple vivant dans une maison isolée vit paisiblement. Elle, a retapé toute la maison, en ruine suite à un incendie, lui, artiste poète, essaie de dépasser son blocage pour écrire à nouveau.
Un soir, alors qu'ils sont tranquillement installés, un homme mystérieux débarque. Alors qu'elle est méfiante, son mari l'invite à entrer et à s'installer.
Le calme de la maison va alors voler en éclat et son mari va alors lui apparaître sous un tout autre jour !
Darren Aronofsky nous sort à nouveau un film perturbant et qui ne laisse personne indifférent !
Je vais essayer de vous faire un petit topo sans spoiler, mais si vous lisez après ces quelques lignes, il risque d'y en avoir tout de même, sinon, ça ne sera pas facile de vous décrire cette oeuvre!
Mother est avant tout métaphysique. C'est une allégorie et il y a des métaphores à gogo !
Ici, les personnages n'ont pas de nom. Ils sont essentiellement des idées, des images que veut explorer le réalisateur.
Chacun va pouvoir l’interpréter comme il le voit.
Certains y verront la création, le besoin d'être admiré, d'être nécessaire à autrui. D'autre, et c'est la majorité, y verront des liens avec la religion, thème cher à Aronofsky.
Ce dernier, lors de la promo a donné quelques clés pour comprendre un peu l'histoire.
La plus probante du film se trouve dans son titre: Mother. C'est la Mère.
Mère Nature qui voit sa vie bouleversée par l'humanité.
L'autre vraie clé est dans la dernière phrase du film : L'homme qui dit : "Je suis ce que je suis. Toi tu est la vie."
Pour moi, c'est une allégorie de la mère nature, de la création, de l'humanité et son rapport à la religion.
C'est presque une réécriture de l'ancien testament avec Eden, le jardin, la pomme, Cain et Abel !
C'est la Mère Nature, la vie, l'Homme et sa soif de toujours plus, de nouveautés.
La subtilité est dans la gestion du temps...
Dès lors que la création tourne en rond le temps semble figé mais quand la création est aboutie, le temps s'accélère et l'amour que les gens procure au créateur fait perdre la notion du temps !
C'est aussi un cycle, celui de la vie! On le voit ça avec le premier et le dernier plan du film.
L'Homme n'arrive pas à se contenter de ce qu'il a! Mais d'un autre côté, il y a le besoin de compter, d'aider, d'aimer et d'être aimé.
Il y a le besoin de se sentir sécurisé, entouré, alors que la nature a besoin de calme et de simplicité.
En ça, le film est oppressant, étouffant par son manque de musique et sa façon de filmer au plus près des personnages.
Le ton monocorde et la palette de couleurs nude, nature, de la maison renforce cette impression aussi. Aucun n'artifice n'anime la maison si ce n'est les 2 personnages principaux dans un premier temps.
C'est revenir au naturel, à la source de la vie.
Et après cette sensation de malaise, d’oppression on retrouve la lutte entre Mère Nature et l'Homme. Il y a sa folie créatrice de se prendre pour Dieu et sa folie destructrice dans son obsession de toujours plus, du toujours neuf et de son besoin d'être accepté, sauvé.
Entre Amour, partage et délire, l'Homme en revient toujours à détruire la vie qui lui a été donnée et qui l'a aimé, qui s'est sacrifiée pour lui.
Rien n'est jamais assez et l'égocentrisme et l’égoïsme humain tue la vie et la nature qui l'ont fait naître, qui l'ont nourri, protégé et inspiré.
Dur constat, mais qui peut s'appliquer à notre société, depuis des générations.
La notion de religion, quand elle arrive, sauve et rend fou.
L'obsession du toujours plus tue ce qui nous est cher.
L'amour inconditionnel que l'on a pour l'autre nous torture et nos sacrifices sont inutiles et létaux.
Aronofsky (Pi, Requiem For A Dream, Black Swan...) joue sur beaucoup de tableaux et sa peinture se perd dans un brouillon qui trouve sa voie dans la première et la dernière scène du film.
Même si ça en devient bordélique par moment, c'est fait exprès pour renforcer la sensation d'oppression, de danger, d'étouffement.
Il va un peu loin dans l'allégorie, mais ça en renforce aussi la puissance et la sensation de malaise.
Sa façon de filmer est un peu différente de ses précédents film, mais elle va dans le bon sens. Elle sert encore plus l'histoire et fait en sorte que l'on ressente ce qu'éprouve Mother.
Il n'y a pas de musique dans le film, ou très peu. Jóhann Jóhannsson (Prisoners, Sicario , Premier contact...) signe les quelques pistes présentes, angoissantes.
Côté casting :
Jennifer Lawrence (American Bluff, Joy, Passengers...) est la mère. Dévouée à son mari, elle a retapé toute la maison qui avait brûlé, elle lui fait à manger, essaie d'être discrète et l'encourage dans son travail. L'arrivée de l'homme et de la femme va remettre en cause leur fragile équilibre.
Lawrence plus nature ici que jamais en sort grandit, voire plus mature. Ce n'est pas une actrice que j'affectionne, mais elle a probablement eu ici son plus beau rôle. Car sans en faire des caisses, avec sa pureté et sa naïveté, elle arrive à surprendre et à faire passer toutes les angoisses qui traversent son personnage. Futur oscar (mérité cette fois...) ?
Javier Bardem (Vicky Cristina Barcelona, Mar adentro, Skyfall...) est Lui. Artiste en panne d'inspiration, il se ressource dans la maison que son épouse à retapé. Il est ouvert aux autres, en recherche d'amour permanent, et a l'envie de donner et de recevoir. Il va trouver en ses invités inopinés tous ce qu'il attendait... et même plus.
Bardem joue à merveille un équilibre entre différentes notions qui nous perdent dans les méandres ce qu'il représente. Doux, aimant, mais aussi avide de reconnaissance, de création, d'utilité, il sait ce qu'il veut, mais n'arrive pas à se contenter de ce qui lui suffirait. C'est un personnage troublant et l'acteur est parfait.
Ed Harris (The Truman Show, Appaloosa, A History of Violence...) est l’homme. Medecin, il arrive par hasard chez le couple. Sans s'imposer, il arrive à s'installer dans la maison et va déclancher une suite d’événements de part sa présence et ses discussions avec Lui.
Harris est excellent quand il joue les méchants, mais ce n'est pas forcément lui qu'il faut craindre ici. A la fois fragile et vieillissant, il insuffle une notion de fanatisme qui débute l’allégorie de la religion. Il sera le premier fan, mais aussi un confident, une oreille extérieure et "Adam" un peu perdu.
Michelle Pfeiffer (Batman : Le Défi, Le Temps de l'innocence, Apparences...) est la femme. Pleine de préjugés, libérée, elle s'impose là où son mari a essayé d'être discret. Elle va bousculer Mother et changer la donne dans la maison et le couple.
Pfeiffer revient ici en force et donne un personnage sournois, avide de jeunesse et d'action. Dans la passion, elle veut toujours plus et surtout que son mariage ne succombe pas. Elle est une Eve fourbe mais aussi pleine de vie et des défauts d'avoir déjà croqué la pomme.
Au total, on a un film qui ne laissera pas sans réaction. Que l'on aime ou l'on déteste, on réagira forcément devant la force des thèmes, des scènes ou de la violence de ce qu'il nous inspire.
Chacun trouvera sa propre interprétation et plus on en discute ou on lit dessus, plus on est perdu et on cherche son chemin.
Un grand film qui marquera l'année !
A vos tickets !
Bande annonce :
PS : Je vous met en dessous des articles qui donnent des pistes et des explications différentes des miennes !
Bonne lecture !
- RTL : "Mother!" : l'Apocalypse selon Darren Aronofsky
- Première: Darren Aronofsky donne la "clé" pour comprendre Mother !
- Konbini : 4 manières de comprendre Mother !, le nouveau film de Darren Aronofsky
- Collider : Darren Aronofsky Confirms What ‘mother!’ Is Really About