Connu du public cinéphile pour le conte initiateur teinté de giallo, Amer, le duo électrique Hélène Cattet et Bruno Forzani revient avec comme arme de prédilection leur caméra pour offrir aux spectateurs le renversant Laissez bronzer les cadavres, expérience difficilement oubliable.
Voir ce long-métrage, c'est assister à un jeu de massacre sensorielle incarnant cette folie pure que peut être le cinéma. Dans la droite lignée du genre du giallo, Laissez bronzer les cadavres part d'un scénario minimaliste (Après le braquage d'une cargaison de lingots, marginaux et forces de l'ordre s'affrontent sans merci dans un coin isolé de la Corse) pour décupler sa force cinématographique. Les balles fusent, le sang éclate et les idées de mises-en-scènes apparaissent pour un résultat divinement jouissif. Chaque plan invoque une nouvelle idée, chaque cut au montage, chaque bruitage. Un travail tellement poussé qu'il cloue le spectateur à son siège tant il a l'impression de se retrouver en plein milieu de ce champ de tir. Remarquable alliance du sound-design et du montage pour permettre cette sensation de voyager en plein chaos.
Suffisamment caractérisés pour nous apparaître charismatiques, ces têtes brûlées qu'on suit combattent sans répit vers un massacre où règne onirisme (scènes mystiques rappelant Lucifer Rising de Kenneth Anger pour ce ciel si bleu et son iconographie) et une réalité brutale où touts les coups, même les plus bas sont permis.
Un défouloir sublime, apportant des moments de grâce à chaque protagoniste pour en conclure sur une explosion charnelle et énigmatique comme on en fait plus de nos jours. Entre cette production et celle offerte par Vincent Macaigne la semaine suivante, il est de notre devoir de soutenir ces productions indépendantes, modestes financièrement mais riches en imagerie et en réflexion.
Victor Van De Kadsye