Les Garçons Sauvages

Par Inglourious Cinema @InglouriousCine

Début du vingtième siècle, cinq adolescents de bonne famille épris de liberté commettent un crime sauvage. Ils sont repris en main par le Capitaine, le temps d’une croisière répressive sur un voilier. Les garçons se mutinent. Ils échouent sur une île sauvage où se mêlent plaisir et végétation luxuriante. La métamorphose peut commencer…

Les Garçons Sauvages - 28 Février 2018 - Réalisé par Bertrand Mandico

C'est le cinquième festival de Bordeaux (FIFIB) que je fais et un constat s'impose, moi qui n'aime pas vraiment le cinéma français, qui n'hésite pas à le railler ouvertement, j'ai aimé à quelques exceptions près les films français présentés au festival. Des films aux sujets souvent peu abordés, aux formes originales, bref des films qui n'étaient pas pré-achetés par des chaînes ! Et ça continue cette année, preuve que les organisateurs du festival ont le nez creux, ils ont déniché « Les Garçons Sauvages » réalisé par Bertrand Mandico.
C'est une histoire, une histoire de garçons, de garçons sauvages … le film débute par la découverte de Tanguy, seul sur le sable, les pieds dans l'eau, le regard perçant et le sourire d'un dément. Un jeune homme fou qui commence à se mutiler avant de se faire agresser par des marins ivres. (Flashback) Tanguy est un jeune homme qui appartient à une petite bande d'enfants de bonnes familles, qui sont aussi cultivés qu'instables. Privilégies de par leurs statuts, ils se permettent absolument tout, jusqu'au pire, a savoir violer leur professeur de français. Hélas sans aucun témoin, si ce n'est celui de cette bande d'adolescent, ils ne sont inquiéter, pire c'est la victime qui est constamment salie, au cour d'un simulacre de procès. Malgré ça, leurs familles respectives font appel à un étrange hollandais, le capitaine d'un navire qui se targue de rendre le pire des adolescents, «en un doux agneau, aussi doux qu'une fille»; tout ça au cours d'un voyage de deux mois sur son navire. Un long périple, plein de mystères s'engage, avec comme destination une île perdue …
[ATTENTION Objet Filmique Non Identifié]
Des que Leo Soesanto introduit le film, lors de la première séance, on sait que ça sera étrange, car il parle clairement de fluide, de liquide, de voyage, de genre et de changement. Une promesse d'originalité qui ne se dément pas pendant les une heure trente que dure le film de Bertrand Mandico, un périple rude et sexuel, ou se confonde sans délicatesse, viol, éjaculations, sperme, pénis, seins et autres organes, qu'il soit humain ou végétal.
Le scénario du film est assez inégal, car très honnêtement il y a un coté très original qui est assez exaltant et de l'autre des facilités déconcertantes qui gâchent presque le film. Le pitch de départ n'est pas très réjouissant, une bande de garçons, adolescents et bourgeois qui se croient tout permis et après l'agression sexuelle de leur prof, la seule solution que trouve leurs parents c'est de les envoyer en « croisière de redressement » pour en faire des être doux !
Toute cette partie la est déroutante, autant qu'elle ne surprend jamais ! C'est une dynamique classique de groupe qui s'installe, avec des individualités fortes qui s'expriment. De plus, le coté bourgeois cultivés et arrogants, c'est une chose qu'on connaît, même si le traitement du réalisateur diffère, ça n'a rien de passionnant. Puis il y a cette seconde moitié, des que la « croisière de redressement » arrive sur l’île ! L'intrigue prend des tournants inattendus, ou il n'y a plus aucun frontière, ou l'homme se définit au féminin, ou les plaisirs de la chaire reviennent à mère nature et ou la notion de genre n'existe plus ! La virilité s'efface, la femme prend la place qu'elle souhaite, aider par une scientifique qui fabrique des fruits qui transforment les hommes en femmes.
Une aventure étrange et onirique que Bertrand Mandico magnifie par son œil et sa vision très particulière. C'est très organique, ce qui mettra mal à l'aise bien des gens, le film ne s'interdit rien, sexe en gros plans (prothèse), fruit étrange qui ressemble a une testicule poilu, simili-bondage, plante en forme de sexe d'homme qui éjacule un liquide rafraîchissant … Il joue constamment sur le décalage et l’ambiguïté entre le masculin et le féminin à l'écran, effaçant peu à peu les frontières entre les genres, jusqu'au final malheureusement assez convenu. Le réalisateur est à son aise et conte son film avec conviction, c'est assez bien rythmez et il n'hésite pas a utiliser divers trucages, pour lui donner un aspect suranné. Puis il a la particularité d'avoir un casting de femmes, pour des rôles d'hommes ! Des actrices phénoménales (Vimala Pons, Anael Snoek, Pauline Lorillard, Mathilde Warnier, Diane Rouxel) auquel il faut ajouter le superbe travail des costumiers et des maquilleurs pour les rendre « masculines ». Personnellement je me suis fait avoir et le retournement de situation est d'autant plus déstabilisant qu'on ne s'en doutes pas !
Mais cette audace est en partie gâchée par des choix que je trouve contradictoire avec ce que le réalisateur veut nous transmettre ! Première chose, au bout de cinq minutes on assiste à un viol en réunion, un acte odieux, humiliant et profondément avilissant ou les auteurs ne seront pas punis. Honnêtement il n'y avait pas mieux comme chose à faire pour montre un groupe qui se soude dans l'adversité ? En plus lors du simulacre de procès, on décrédibilise la parole de la victime, rajoutant une couche d'injustice. Puis on assiste à plusieurs agressions, gratuites et délibérées, qui n'apporte rien à l'intrigue et qui se complaisent dans une imagerie racoleuse. Enfin, il y a le cliché ultime pour moi, c'est qu'encore une fois, un film prend les femmes comme des personnes forcément douce (les garçons partent en « croisière de redressement » avec comme promesse de devenir aussi doux que des femmes) bienveillantes et sexualisées ! La fin est symptomatique de tout ça, d'un coté on retrouve « les garçons » devenus « femmes » prêtent à conquérir le monde, mais de l'autre elles sont montrées comme des purs objets sexuels ! 
Une expérience radicale, avec ses qualités et ses défauts !