Un grand merci à Elephant Films pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « La kermesse des aigles » de George Roy Hill.
« Le public ne vient pas voir de grands pilotes, il vient flairer la mort. Moi je vends de la mort. Pas de grands pilotes. »
Après la Première Guerre mondiale, l’aviateur Waldo Pepper gagne sa vie en donnant des spectacles aériens dans des petites villes américaines. Frustré de n’être jamais devenu un as de l’aviation, il s’invente un passé prestigieux, prétendant avoir survécu à un affrontement contre l’as allemand Ernst Kessler. Mais alors que son talent le mène à Hollywood, où il devient cascadeur, son passé le rattrape sous la forme de Ernst Kessler, venu participer à un tournage…
« Je ne suis ni chauffeur ni facteur. Je suis aviateur »
George Roy Hill fut un homme de passions. En premier lieu, il y eut ainsi l’aviation, pour laquelle il se prit d’intérêt dès son plus jeune âge. Il obtint lui-même son brevet de pilotage à l’âge de 16 ans avant d’être enrôlé dans l’armée américaine comme pilote durant la seconde guerre mondiale puis durant la guerre de Corée. Mais Hill fut aussi un passionné de (belles) lettres qui alla jusqu’en Irlande pour étudier la littérature sur les traces de son idole James Joyce. Après une brève carrière de journaliste, cet amour des textes l’emmènera presque naturellement à Broadway où il mènera une première carrière au théâtre. Mais c’est à la télévision qu’il fera ses armes de scénariste puis de réalisateur au cours des années 50, ce qui lui ouvrira les portes du cinéma, sa troisième passion. A Hollywood, où il mènera une carrière de près de trente ans, son nom restera inévitablement associé à ceux de Paul Newman et de Robert Redford, qu’il fit tourner à deux reprises dans ce qui restera comme ses deux plus grands succès - « Butch Cassidy et le Kid » (1969) et « L’arnaque » (1973) – avant de les diriger séparément dans « La kermesse des aigles » (1974) puis « La castagne » (1977) qui restera comme son dernier gros succès public.
« La vie n’a de sens pour moi que là-haut tout seul »
Fort du succès de « L’arnaque » qui lui vaut l’Oscar du meilleur réalisateur et d’un regain d’intérêt d'Hollywood pour les épopées aériennes de la première guerre mondiale (« Le crépuscule des aigles » en 1966, « Le baron rouge » en 1971, « Le tigre du ciel » en 1976), George Roy Hill se lance avec « La kermesse des aigles » dans ce qui sera sans doute son film le plus personnel et lui tenant le plus à cœur. En effet, ce passionné d’aviation – qui dévora, enfant, les récits des exploits des as de la première guerre mondiale – ambitionnait de rendre hommage au travers d’un film à tous les pionniers de l’aviation qui l’ont tant fait rêver. Hill choisit ainsi de prendre les années 20 et l’Amérique profonde pour décor de son récit. Une période charnière où l’aviation balbutiante et le ciel n’étaient pas encore réglementés et où les pilotes – pour la plupart des jeunes hommes ayant fait leurs armes au cours de la bataille de France quelques années plus tôt – étaient libres de leurs mouvements, y compris les plus fous. Des pilotes qu’il voit comme les derniers aventuriers du monde moderne, ultimes pionniers d’un monde sans territoire vierge à découvrir pour qui le ciel représente le dernier rêve de liberté et de conquête. Un espace à défricher où tous les records demeurent encore à inventer. Des pilotes qui sont également les derniers dépositaires d’un esprit chevaleresque désuet, à l’image de ce dernier combat aérien où seul l’honneur et le respect sont en jeu. Mais la technologie encore rudimentaire de ces avions de bois et de tissus fait de chaque vol et de chaque acrobatie une partie de poker-menteur avec la mort. D’ailleurs, derrière la jeunesse et les sourires innocents des protagonistes, il flotte sur le film une ombre mortifère (terrible scène dans laquelle le héros préfère tuer son camarade plutôt que de le voir brûler dans la carcasse de son appareil sans pouvoir le sortir). Au sommet de sa beauté, Robert Redford trouve en Waldo Pepper, looser magnifique et nihiliste en quête d’une reconnaissance qu’il n’a pas eu le temps de gagner durant la guerre, l’un de ses rôles les plus complexes et les plus forts. Quant à Hill il signe là son chef d’œuvre, un film élégiaque d’une rare mélancolie.
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Le blu-ray : Le film est présenté en version intégrale restaurée, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné de « L’Aube des aigles », présentation du film de Julien Comelli, journaliste en culture pop (13 min.) ainsi que de bandes-annonces et d’une galerie de photos.
Edité par Elephant Films, « La kermesse des aigles » est disponible en DVD ainsi qu’en combo DVD + blu-ray depuis le 5 septembre 2017.
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