Pas de salut pour qui entre dans le cercle
Melville, la référence du polar à la française, s’apprête à tirer sa révérence après ce nouveau chef d’œuvre. Réalisateur hors pair avec son sens du cadrage, ses ellipses ingénieuses et ses mouvements de caméra savamment pensés ; il faut être un maitre de la mise en scène pour installer des atmosphères puissantes quand on est aussi avare que lui en dialogue et que son intrigue est somme toute assez conventionnelle. Ce niveau de maitrise fait toujours référence et ce bien au-delà de l’hexagone ; Tarantino, Scorcese, Woo n’ont jamais caché leur enthousiasme pour l’œuvre de Melville qui fût parfois même source d’inspiration. Revenons aux silences déjà hyper exploités dans « Le samouraï », symbole d’un souci de tendre au plus vers l’abstraction et l’essence même du polar et de ses personnages (cf. la scène du cambriolage : 25’ sans un mot… malgré tout intense). Ce cercle rouge est à nouveau une épure du cinéma policier : aucune sensualité, aucun gras… juste un léger fond sonore jazzy collant parfaitement aux images. Dès la première scène où l’on pense que la voiture qui grille le feu rouge est conduite par des bandits, il pose les bases : pas de bons et pas méchants ni chez les flics ni chez les truands. Et différents personnages de ce film (Jansen, surveillant de prison,…) incarneront à merveille cette phrase prononcée par un ponte de la police : « Nous naissons tous innocents, mais çà ne dure pas. ». Et pour ses personnages pareils ; ils ne sont que fonction ; ils n’ont pas de vie personnelle : la commissaire Mattéi rentre chez lui accueilli par ses trois chats dans un même rituel sans cesse reproduit ; Jansen vit reclus chez lui ; Corey n’a aucune vie sentimentale ;… Vides de plaisir, d’affects et de sentiments ; ils sont juste régis par leur propre code de conduite de manière mécanique. Ce qui fait de ses personnages des sortes de poupées fatigués et entrainés dans un tourbillon de la fatalité sur lequel ils n’ont guère d’emprise. Melville profite alors de ce petit théâtre de marionnettes pour amener des thèmes chers à son œuvre : échec, solitude, trahison. Finissons avec ce qui pète encore aujourd’hui : les noms figurant en haut de l’affiche. Bourvil, à bout de souffle, malmené par un cancer qui le laissera sur le carreau quelques mois plus tard joue pour son dernier film un contremploi incroyable. La mélancolie et la bonhommie du bonhomme emporte tout sur son passage. Delon nous refait le coup du taiseux samouraï. Montand est incroyable. Gian Maria Volonté électrique, un Bardem avant l’heure.Juste pour finir j’ai bien aimé une réflexion à propos de ce film que j’ai lu sur un blog : « D'ailleurs, tout le film ne pourrait être qu'un rêve : lors de la succession de plans liant Vauchel et Corey endormis, on voit Mattéi fermer les yeux quelques secondes. Une fraction de temps qui suffit à glisser en nous l'idée que Le Cercle Rouge pourrait n'être qu'un songe de film policier. »
Un grand Melville dans une œuvre haut de gamme.Sorti en 1970Ma note: 19/20
Melville, la référence du polar à la française, s’apprête à tirer sa révérence après ce nouveau chef d’œuvre. Réalisateur hors pair avec son sens du cadrage, ses ellipses ingénieuses et ses mouvements de caméra savamment pensés ; il faut être un maitre de la mise en scène pour installer des atmosphères puissantes quand on est aussi avare que lui en dialogue et que son intrigue est somme toute assez conventionnelle. Ce niveau de maitrise fait toujours référence et ce bien au-delà de l’hexagone ; Tarantino, Scorcese, Woo n’ont jamais caché leur enthousiasme pour l’œuvre de Melville qui fût parfois même source d’inspiration. Revenons aux silences déjà hyper exploités dans « Le samouraï », symbole d’un souci de tendre au plus vers l’abstraction et l’essence même du polar et de ses personnages (cf. la scène du cambriolage : 25’ sans un mot… malgré tout intense). Ce cercle rouge est à nouveau une épure du cinéma policier : aucune sensualité, aucun gras… juste un léger fond sonore jazzy collant parfaitement aux images. Dès la première scène où l’on pense que la voiture qui grille le feu rouge est conduite par des bandits, il pose les bases : pas de bons et pas méchants ni chez les flics ni chez les truands. Et différents personnages de ce film (Jansen, surveillant de prison,…) incarneront à merveille cette phrase prononcée par un ponte de la police : « Nous naissons tous innocents, mais çà ne dure pas. ». Et pour ses personnages pareils ; ils ne sont que fonction ; ils n’ont pas de vie personnelle : la commissaire Mattéi rentre chez lui accueilli par ses trois chats dans un même rituel sans cesse reproduit ; Jansen vit reclus chez lui ; Corey n’a aucune vie sentimentale ;… Vides de plaisir, d’affects et de sentiments ; ils sont juste régis par leur propre code de conduite de manière mécanique. Ce qui fait de ses personnages des sortes de poupées fatigués et entrainés dans un tourbillon de la fatalité sur lequel ils n’ont guère d’emprise. Melville profite alors de ce petit théâtre de marionnettes pour amener des thèmes chers à son œuvre : échec, solitude, trahison. Finissons avec ce qui pète encore aujourd’hui : les noms figurant en haut de l’affiche. Bourvil, à bout de souffle, malmené par un cancer qui le laissera sur le carreau quelques mois plus tard joue pour son dernier film un contremploi incroyable. La mélancolie et la bonhommie du bonhomme emporte tout sur son passage. Delon nous refait le coup du taiseux samouraï. Montand est incroyable. Gian Maria Volonté électrique, un Bardem avant l’heure.Juste pour finir j’ai bien aimé une réflexion à propos de ce film que j’ai lu sur un blog : « D'ailleurs, tout le film ne pourrait être qu'un rêve : lors de la succession de plans liant Vauchel et Corey endormis, on voit Mattéi fermer les yeux quelques secondes. Une fraction de temps qui suffit à glisser en nous l'idée que Le Cercle Rouge pourrait n'être qu'un songe de film policier. »
Un grand Melville dans une œuvre haut de gamme.Sorti en 1970Ma note: 19/20