Au départ du projet, il y a le scénariste Chris Bergoch. Emmenant sa mère emménager en Floride, il remarque des enfants tout jeune joués au bord de l’autoroute menant à Dinsey Land Orlando. Renseignement pris, il découvre que la plus part des motels longeant la voie routière et construits pour loger les touristes du parc sont désormais habités par les familles pauvres du secteur. De ce constat, il co écrira avec le réalisateur, Sean Baker, le scénario de ce pamphlet montrant avec justesse le revers de la médaille du rêve américain. Un film dans la veine de ce qui se fait de mieux dans le cinéma indépendant américain actuellement et qui fût présenté à Cannes.Sean Baker loge donc son film dans un motel dans lequel vivent des gens au bord de la rupture et axe son histoire autour d’une petite fille de 6 ans à l’énergie folle et d’une bande d’enfants délurée. Sean Baker assume la filiation avec la série des 30’s, « Les petites canailles », qui mettaient en scène des enfants pauvres toujours partants pour de nouvelles aventures et surtout bêtises. Donc il enchaine les scénettes de vie de ce monde toujours sur la même note, çà pourrait être redondant et pénible à la longue ; mais il parvient à instiller des variations, des modulations dans un crescendo émotionnel intense. Donc dans ce récit mené tambour battant, pas le temps pour le glauque, pour s’appesantir sur le sort de ces pauvres gens ; filmé à hauteur d’enfant dans l’arrière court colorée et chatoyante de Disney, ce monde devient un terrain de jeu féérique et improbable pour cette bande de gosses mal élevés. Oreilles chastes s’abstenir, car ces sales garnements menés par la jeune et incroyable Brooklyn Prince hurle, insulte, invective, crache, remue dans tous les sens de la première à la dernière minute. Et ce pauvre envers du décor d’une Amérique de cartes postales prend un autre aspect dans les yeux des enfants. Et au milieu de ce monde d’échoués de la vie, Willem Dafoe. Seul homme du film toujours juste même si parfois dur, il tente de maintenir tout ce monde à flot ; une belle composition par un grand comédien militant. Ce film pourrait être dramatique, le fond l’est, mais le traitement est revigorant, drôle, enlevé et frais ; car il évite bien de donner des leçons morales ou sociales, Sean Baker pose juste un regard bienveillant sur ses ouailles (comme Willem Dafoe dans le film). On voit juste que quelque chose ne tourne plus rond en ce bas monde, mais que les enfants parviennent très bien à s’adapter et à composer… mais jusqu’à quel âge encore ? Pour ce film parmi mes préférés de cette année ; deux adjectifs me viennent : somptueux et déchirant.
Et pour finir car c’est l’atout majeur du film ; Cécile Mury dans Télérama : « Rares sont les films qui captent aussi bien l'énergie volatile, la spontanéité crue de l’enfance, la toute puissance de son imaginaire. »
Sorti en 2017Ma note: 19/20